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Publication de la loi du 9 avril 2024 sur la rénovation de l’habitat dégradé

ÉTUDEAprès une seule lecture par l’Assemblée nationale et le Sénat (la procédure accélérée avait été engagée), puis accord en commission mixte paritaire, la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement a été publiée au journal officiel du 10 avril 2024. Elle comporte pas moins de 59 articles destinés, entre autres, à permettre de mieux repérer l’habitat dégradé, de renforcer le rôle de prévention des syndics de copropriété, de faciliter la décision d’effectuer des travaux en copropriété et leur financement, de contrôler davantage les locations, ou encore de mieux traiter les situations d’habitat dégradé.

 

Mieux repérer l’habitat dégradé

La loi du 9 avril 2024 comprend plusieurs mesures visant à améliorer la connaissance par l’État et les collectivités locales de l’état des immeubles.

 

Un « diagnostic structurel » pour les immeubles d’habitation dans certains secteurs

Aux termes de la nouvelle loi, « la commune peut définir des secteurs dans lesquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet, à l’expiration d’un délai de quinze ans à compter de la réception des travaux de construction du bâtiment et au moins une fois tous les dix ans, d’un diagnostic structurel du bâtiment, incluant une description des désordres observés qui portent atteinte à sa solidité et évaluant les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle des tiers » (nouvel article L. 126-6-1 du Code de la construction et de l’habitation). Alors que le texte issu de l’Assemblée nationale ne visait que les secteurs d’« habitat dégradé », le champ potentiel du diagnostic structurel a été étendu par la commission mixte paritaire aux secteurs d’« habitat ancien ». Le maire pourra en faire réaliser un d’office si le diagnostic ne lui est pas transmis à sa demande.

Concernant les immeubles placés sous le régime de la copropriété, la loi nouvelle précise que, lorsqu’un projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT) a été élaboré, celui-ci peut faire office de diagnostic structurel. Rappelons ici qu’un PPPT est aujourd’hui obligatoire dans toutes les copropriétés à usage d’habitation de plus de quinze ans et de plus de cinquante lots (article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965). Il ne sera obligatoire pour les immeubles de cinquante lots au plus qu’en 2025 (sur ce sujet, voir notre article suivant). Cependant, si un diagnostic technique global a été réalisé (il est facultatif dans le cas général) et qu’il ne fait apparaître aucun besoin de travaux dans les dix prochaines années, la copropriété est dispensée d’élaborer un PPPT. Dans ce cas précis, puisqu’aucun PPPT n’a été élaboré, sans doute faut-il quand même établir un diagnostic structurel, comme c’est le cas pour tous les immeubles d’habitation en monopropriété. L’UNPI va réclamer ici un correctif.

Le contenu du nouveau diagnostic structurel et les garanties de compétences des professionnels pouvant les réaliser seront précisés par décret.

 

Nouvelles informations à renseigner dans le registre national d’immatriculation des copropriétés

La loi ALUR de 2014 a créé un registre national d’immatriculation des copropriétés afin d’aider les autorités à recenser davantage l’état des copropriété en France et mieux anticiper leurs difficultés. Les services de l’État, ainsi que les collectivités territoriales (pour les immeubles situés sur leur territoire) ont ainsi accès à une multitude d’informations que chaque syndic de copropriété doit renseigner dans le cadre du registre.

Pour simplifier les améliorations à venir de ce registre, la loi du 9 avril 2024 remplace la liste précise des informations devant y être renseignées par des rubriques libellées de façon générale, à charge pour un décret de les préciser (article L.711-2 modifié du Code de la construction et de l’habitation). En attendant la parution d’un tel décret, on sait déjà que de nouvelles informations devront être renseignées par les syndics, qu’il s’agisse des informations issues des différents diagnostics obligatoires (tels que le DPE) ou des procédures de mise en sécurité ou d’insalubrité (que le syndic devra désormais reporter).

 

Accès des agents municipaux assermentés aux immeubles

Il existe de nombreux droits de visite des autorités pour vérifier par exemple la sécurité ou la salubrité des logements (1). Les articles L.651-6 et suivants du CCH prévoient notamment un droit de visite des logements par les « agents assermentés du service municipal du logement », ces derniers pouvant constater « les conditions dans lesquelles sont effectivement occupés les locaux qu’ils visitent ». Ils sont habilités « à se faire présenter par les propriétaires, locataires ou autres occupants des lieux toute pièce ou document établissant ces conditions ». L’article L.651-7 du CCH prévoyait déjà que « sans pouvoir opposer le secret professionnel, les administrations publiques compétentes et leurs agents sont tenus de communiquer aux agents du service municipal du logement tous renseignements nécessaires à l’accomplissement de leur mission de recherche et de contrôle ». La loi du 9 avril 2024 ajoute les syndics de copropriétés à la liste des personnes tenues de faciliter les recherches des agents assermentés (en fournissant par exemple les codes d’accès aux parties communes ou le règlement de copropriété). Cette mesure est destinée notamment à faciliter le travail des agents assermentés aussi bien pour dénicher des meublés de tourisme non déclarés que pour relever des situations d’habitat indigne.

1) Voir Petit Tour de France du permis de louer, 25 millions de propriétaires, mai 2022.

 

Renforcer le rôle de prévention des syndics

La loi pour la rénovation de l’habitat dégradé mise beaucoup sur les syndics pour prévenir les situations d’habitat dégradé.

 

Devoir d’alerte du syndic en cas de procédure de mise en sécurité ou d’insalubrité

Le syndic est dorénavant formellement tenu « d’informer les copropriétaires et les occupants de la copropriété qu’un immeuble fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles » (alinéa ajouté à l’article 18, I de la loi du 10 juillet 1965 sur les missions du syndic). Le but est que chacun prenne conscience de l’urgence qu’il y a à effectuer des travaux.

Dans le même sens, en cas de procédure contradictoire préalable à la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ne touchant que les parties communes d’un immeuble, le syndic doit informer les occupants de l’immeuble, en plus des copropriétaires.

 

Nouvelle sanction du syndic qui ne lance pas la procédure d’alerte (désignation d’un mandataire ad hoc)

La désignation d’un mandataire ad hoc (on parle parfois de « procédure d’alerte ») est un outil de prévention des difficultés d’une copropriété créé par la loi « Boutin » de 2009. Tout syndic est obligé de demander en justice la désignation d’un mandataire ad hoc en présence de 25 % d’impayés à la clôture des comptes (ou 15 % dans les copropriétés de plus de 200 lots). Le mandataire est choisi parmi des professionnels inscrits sur une liste nationale, sauf décision spéciale du juge. « En l’absence d’action du syndic dans un délai d’un mois à compter de la clôture des comptes », le juge peut être saisi par « des copropriétaires représentant ensemble au moins 15 % des voix du syndicat ou le président du conseil syndical » (article 29-1 A de la loi du 10 juillet 1965), certains créanciers ou les autorités (préfet, procureur, maire, président d’intercommunalité). Le mandataire désigné par le juge dresse un rapport sur la situation de l’immeuble avec ses préconisations pour ramener l’équilibre financier ou assurer la sécurité de l’immeuble. Les copropriétaires doivent ensuite statuer sur les résolutions mettant en œuvre les préconisations. À défaut de transmission du procès-verbal d’assemblée, le juge peut être saisi pour désigner un administrateur provisoire.

La loi du 9 avril 2024 retouche cette procédure pour accélérer sa mise en œuvre ou encourager les syndics à la mobiliser. Tout d’abord, « l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans » devient un motif de saisine du juge aux côtés de l’importance des impayés (article 29-1 A modifié). En second lieu, lorsqu’une copropriété est placée sous administration provisoire (procédure plus lourde évoquée plus loin) sans que le syndic ait, avant cela, demandé la désignation d’un mandataire ad hoc, « le président du tribunal judiciaire peut imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic » (article 29-1, II modifié). Enfin, il est désormais précisé que les personnes (autres que le syndic) habilitées à demander la désignation d’un mandataire peuvent saisir le juge sans attendre l’inaction du syndic pendant un mois « en l’absence de syndic ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans ».

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