ÉTUDE - Le logement des jeunes (étudiants et travailleurs) est une des préoccupations actuelles majeures. Il faut appréhender la situation des jeunes (étudiants et actifs) sur le terrain de la location mais aussi de l’accession. Un contrat (d’occupation / de bail) adapté à leur situation est plus que nécessaire. Afin de réduire les coûts, les jeunes (étudiants et actifs) ont recours à la colocation qui présente des risques pour le propriétaire bailleur notamment en cas de départ d’un des colocataires et de dégradations locatives. La colocation est le mode d’occupation le plus répandu à ce jour.
Par Maître Anne-Cécile Naudin, Avocat
Pour les étudiants et jeunes actifs il existe un arsenal textuel et règlementaire permettant de recourir non seulement à un bail de location nue classique prévu par la loi n°89-642 du 6 juillet 1989 mais également à d’autres contrats d’occupation.
Quelles sont les alternatives au bail classique nu de trois ans prévu par la loi du 6 juillet 1989 ?
Contrats d’occupation
La loi du 6 juillet 1989 dispose en son article 25-4 : « Un logement meublé est un logement décent équipé d'un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d'y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante. La liste des éléments que doit comporter ce mobilier est fixée par décret ». Le montant du dépôt de garantie est limité à deux mois en principal. Il est conclu pour une durée d'au moins un an. Si les parties au contrat ne donnent pas congé dans les conditions prévues à l'article 25-8, le contrat de location parvenu à son terme est reconduit tacitement pour une durée d'un an. Le locataire peut résilier le contrat à tout moment, sous réserve du respect d'un préavis d'un mois. Le propriétaire, quant à lui, peut donner congé trois mois avant la date anniversaire du bail. Conformément à l’article 25-10 de la loi du 6 juillet 1989, les charges locatives accessoires au loyer principal sont récupérées par le bailleur au choix des parties et tel que prévu par le contrat de bail :
1° Soit dans les conditions prévues à l'article 23, lorsqu'il s'agit de provisions pour charges ;
2° Soit sous la forme d'un forfait versé simultanément au loyer, dont le montant et la périodicité de versement sont définis dans le contrat et qui ne peut donner lieu à complément ou à régularisation ultérieure. Le montant du forfait de charges est fixé en fonction des montants exigibles par le bailleur en application du même article 23 et peut être révisé chaque année aux mêmes conditions que le loyer principal. Ce montant ne peut pas être manifestement disproportionné au regard des charges dont le locataire ou, le cas échéant, le précédent locataire se serait acquitté.
Il s’agit un bail meublé pour une durée maximale de neuf mois. Ce contrat ne se reconduit pas tacitement. Il concerne tous les types de logements. Généralement ce type de bail débute au mois de septembre pour se terminer au mois de juin. Le locataire peut résilier le contrat à tout moment, sous réserve du respect d'un préavis d'un mois.
Crée par la loi n°2018-2021 du 23 novembre 2018 dite ELAN, ce bail concerne tous types de logements. Le bien est loué meublé. Un bail mobilité peut être signé avec un candidat locataire majeur en formation professionnelle, en études supérieures, stagiaire, volontaire dans le cadre d’un service civique, en mutation professionnelle ou en mission temporaire dans le cadre de son activité professionnelle. Le bail mobilité concerne les logements meublés du parc locatif privé au sens de l’article 25-4 de la loi de 1989 loués à titre de résidence principale ou non. Ce bail ne s’applique ni aux logements-foyers, ni aux logements des organismes HLM, conventionnés ou non à l’APL. Le bail mobilité est conclu pour une durée minimale d’un mois et une durée maximale de dix mois, non renouvelable et non reconductible. La durée du contrat de location peut être modifiée une fois par avenant sans que la durée totale du contrat ne dépasse dix mois. Si, au terme du contrat, les parties concluent un nouveau bail portant sur le même logement meublé, il prend la forme d’un bail meublé classique.
Le bail mobilité doit indiquer en plus des stipulations du bail meublé :
Les charges locatives doivent être forfaitisées selon la durée du bail. Il n’y a pas de possibilité de demander une provision pour charges, ni complément ou régularisation.
Créée par la loi ELAN du 23 novembre 2018, la cohabitation intergénérationnelle solidaire permet à des personnes de soixante ans et plus de louer ou de sous-louer à des personnes de moins de trente ans une partie du logement dont elles sont propriétaires ou locataires dans le respect des conditions fixées par le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire prévu à l'article L. 631-17 du code de la construction et de l'habitation, afin de renforcer le lien social et de faciliter l'accès à un logement pour les personnes de moins de trente ans. Le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire est un contrat par lequel une personne de soixante ans et plus, propriétaire ou locataire, s'engage à louer ou sous-louer une partie de son logement à une personne de moins de trente ans moyennant une contrepartie financière modeste. Lorsque la personne de soixante ans et plus est locataire de son logement, elle informe préalablement le bailleur de son intention de sous-louer une partie de son logement à une personne de moins de trente ans dans le cadre d'un contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire, sans que le bailleur puisse s'y opposer. La durée du contrat et la contrepartie financière sont librement convenues entre les parties. Lorsque l'un des cocontractants décide de mettre fin au contrat, le délai de préavis applicable est d'un mois. La loi du 6 juillet 1989 ne s'applique pas aux contrats de cohabitation intergénérationnelle solidaire. Une charte de la cohabitation intergénérationnelle solidaire définie par arrêté précise le cadre général et les modalités pratiques de la cohabitation intergénérationnelle solidaire. Le contrat peut prévoir, en complément de la contrepartie financière, la réalisation, sans but lucratif pour aucune des parties, de menus services par la personne de moins de trente ans. Le contrat organise une collaboration exclusive de tout lien de subordination entre les cocontractants. Il ne relève pas du code du travail. Hors ces baux et contrats d’occupation, les étudiants et jeunes actifs ont recours la plupart du temps à la colocation comme mode d’occupation.
Le mode d’occupation : la colocation
La loi ALUR du 24 mars 2014 encadre la colocation par quelques dispositions spécifiques contenues dans un article 8-1 nouveau de la loi du 6 juillet 1989. Le contrat devra respecter un contrat type défini par le décret n° 2015-587 du 29 mai 2015, du moins lorsqu’il s’agit d’une colocation à bail unique, par opposition aux colocations à baux multiples (voir ci-après). L’article 8-1 de la loi de 89 définit la colocation comme « la location d’un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale et formalisée par la conclusion d’un contrat unique ou de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur ».
Ainsi la définition donnée par l’article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit que :
-soit un seul bail est conclu entre un bailleur et des locataires (les colocataires bénéficiant d'un droit de jouissance indifférencié portant sur la totalité du logement) ;
-soit il y a autant de contrats qu’il y a de locataires, parce que le propriétaire loue plusieurs chambres dans un même appartement à des locataires distincts. Bien qu’il y ait plusieurs contrats différents conclus entre locataires et bailleur, il s’agit bien d’une colocation dans la mesure où les différents locataires d’un même appartement partageront les pièces communes (cuisine, salle de bains…). Dans ce cas, chaque colocataire dispose d’un droit de jouissance exclusif sur une partie du logement et d'un droit de co-jouissance sur le surplus.
La loi n°2015-990 du 6 août 2015 dite loi Macron a modifié la définition de la colocation afin d'en exclure les époux et les partenaires pacsés, aux termes du nouvel article 8-1, I de la loi du 6 juillet 1989.
Du moment que le local est donné à bail à plusieurs personnes, il est nécessaire de stipuler une clause de solidarité qui permettra de bénéficier de la surface financière de chaque signataire solidaire pour l'intégralité des sommes dues. La clause de solidarité doit couvrir toutes les obligations découlant du contrat de bail. À noter cependant qu’on ne peut instituer de solidarité que s’il s’agit d’une colocation à bail unique (dans une colocation à baux multiples, les colocataires ne peuvent valablement être rendus solidaires les uns des autres). L’article 25-13 de la loi du 6 juillet 1989 répute également non-écrite toute clause de solidarité entre colocataires dans un bail mobilité.
La signature d'un bail unique n'emporte pas de plein droit solidarité entre les locataires. L'insertion d'une clause de solidarité et d'indivisibilité offre ainsi une garantie importante au propriétaire, notamment pour le paiement des loyers dus pendant la période de préavis d'un colocataire. L’extinction de la solidarité suppose néanmoins qu’un nouveau locataire figure au bail. À défaut, la solidarité du colocataire sortant et de sa caution s’éteignent au plus tard à l’expiration d’un délai de six mois. La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 avril 2021 (3e civ, 08 avril 2021, n°19.23-343), a précisé : « Le colocataire solidaire sortant ne saurait donc être tenu au paiement d’une somme couvrant la remise en état des lieux dès lors que cette créance est née après l’extinction de son obligation, au moment où la période de solidarité avait déjà cessé ».
Les parties au contrat de bail d'une colocation peuvent convenir dans le contrat de la souscription par le bailleur d'une assurance pour compte récupérable auprès des colocataires dans les conditions prévues au g de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989. Les colocataires peuvent provoquer la résiliation de l'assurance pour compte dans les conditions fixées au même article. En matière de colocation se pose la question de la décence. En effet, les critères de décence ont longtemps posé des difficultés sur le plan juridique, en particulier lorsque chaque colocataire dispose d’un bail. L'article 8-1, II, modifié par la loi ELAN du 23 novembre 2018, vient combler ce vide et dispose qu'en cas de colocation à baux multiples, il est tenu compte, pour apprécier les conditions de décence, de l'ensemble des éléments, équipements et pièces du logement.
Il arrive que soit mis en place un pacte / une charte de colocation pour encadrer les modalités de la vie en collectivité. Ce document facultatif peut être réalisé par les colocataires afin de fixer les droits et obligations dans le but de préciser les règles de vie gouvernant la jouissance du bien loué.
Cette charte de colocation est ainsi jointe au bail afin que tous les colocataires en aient connaissance, la signent et puissent la respecter. De cette charte de colocation vont naître des obligations entre les colocataires. Elles pourront concerner les règles de vie, la répartition des tâches ménagères, l’attribution des chambres, la possibilité ou l’interdiction d’inviter des tiers à la colocation…
Il n’en demeure pas moins que les bailleurs sont réticents à louer à des jeunes (étudiants/ actifs) par crainte de nuisances mais surtout d’impayés et de dégradations locatives. Dans ce dernier cas, la garantie Visale est peut être une solution.
Compte tenu des faibles revenus d’un étudiant voire d’un jeune actif, il est difficile pour eux de présenter un dossier conforme aux attentes des assurances (garantie loyers impayés). De même avoir une caution n’est pas chose aisée, qu’elle soit bancaire, familiale, professionnelle… Aussi est entrée en vigueur la garantie Visale. Il s’agit d’une caution locative qu'Action Logement accorde pour certains logements mis en location en métropole ou dans les départements et régions d’outre-mer.
Pour cela, le locataire doit obtenir le visa d'Action Logement et le bailleur doit accepter l'acte de cautionnement. En cas de dégradations locatives ou de loyers impayés, Action logement verse d'abord au propriétaire (bailleur) le montant dû, et se fait ensuite rembourser par le locataire. Conçu pour les propriétaires du parc privé souhaitant proposer leur logement à la location, Visale est un cautionnement qui couvre toute la durée du bail dans la limite de 36 mensualités impayées. Pour les dégradations locatives, le montant maximum est de deux mois de loyer et charges inscrits au bail. En cas d’état des lieux de sortie contradictoire ou fait par huissier mentionnant des dégradations du logement imputable au locataire, le bailleur s’engage à déclarer dans un délai de 30 jours sa demande de prise en charge de dégradations locatives à Visale. La sortie des lieux du locataire peut être caractérisée par la remise des clés au bailleur ou au mandataire, par l’état des lieux de sortie ou la reprise par huissier. Les frais de remise en état du logement en cas de dégradations locatives imputables au locataire sont couverts dans le cadre de la garantie Visale toujours dans la limite de deux mois de loyer et charges inscrits au bail.
En revanche ne sont pas pris en charge :
Les conditions d’éligibilité d’un locataire à la garantie Visale sont notamment les suivantes : soit avoir entre 18 et 30 ans, soit être salarié de plus de 30 ans (embauché(e) depuis moins de 6 mois (hors CDI confirmé) ou gagnant jusqu’à 1500€ nets/mois ou en mobilité professionnelle ou en possession d’une promesse d’embauche de moins de 3 mois)…
Le bail :
- doit être conforme à la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et intégrer une clause résolutoire ;
- doit avoir un loyer charges comprises maximum de 1300€ (1500€ en Île de France) ;
- doit être signé après l’obtention du contrat de cautionnement Visale et avant la fin de validité du visa du locataire ;
- ne peut pas être couvert par d’autres garanties (caution personne physique ou assurance) ;
- ne peut pas être conclu avec les membres de la famille du propriétaire ;
- doit être individualisé pour chaque colocataire en cas de colocation.
Pour plus de détails sur les conditions d’éligibilité à Visale, on peut se reporter au portail www.visale.fr.
Mais qu’en est-il désormais du jeune (étudiant/actif) qui souhaite devenir propriétaire ?
Pour un premier achat, il est indispensable de négocier un taux pour son prêt immobilier et les jeunes bénéficient à cet égard du prêt à taux zéro.
Ce prêt est destiné aux primo-accédants souhaitant acheter leur première résidence principale. Voici quelques points clés concernant ce prêt :
1. Conditions d'éligibilité : Le PTZ est réservé aux personnes qui achètent pour la première fois et respectent :
2. Types de logements concernés : Ce prêt peut être utilisé pour l'achat de logements neufs, pour des logements anciens nécessitant des travaux, ou pour la construction d'une maison sur un terrain à bâtir.
3. Utilisation : Le montant du PTZ doit être destiné à l'acquisition de la résidence principale, ce qui signifie que l’on ne peut pas l'utiliser pour un investissement locatif.
4. Plafonds de ressources : Les bénéficiaires doivent respecter certains plafonds de ressources, qui varient en fonction de la localisation du bien et de la composition du ménage. Le prêt à taux zéro permet de financer jusqu’à 50 % du prix d’acquisition du bien sans intérêt.
Le grand avantage de ce prêt est la possibilité de le rembourser sur une durée longue, celle-ci pouvant aller jusqu’à 25 ans. Mais également ce prêt peut être remboursé de manière différée jusqu’à 15 ans. Ainsi l’accédant va d’abord rembourser son prêt principal, et à l’issue de celui-ci, viendra rembourser son prêt à taux zéro, ce différé permettant d’alléger considérablement les mensualités. Hormis les cas classiques de vente immobilière pour les jeunes, l’accession sociale à la propriété est la solution la plus adaptée aux jeunes. En effet, cette accession permet aux ménages aux revenus modestes d’acheter leur résidence principale et de devenir propriétaire à des conditions avantageuses et adaptées à leur situation financière.
Pour préparer un projet d'accession sociale, il faut :
1. Identifier les dispositifs accessibles : selon sa situation financière, on peut prétendre à divers dispositifs comme le prêt social location-accession (PSLA), le bail réel solidaire (BRS), etc.
2. Évaluer votre budget :
- Apport personnel : déterminer combien on peut investir au départ.
- Besoin de financement : tenir compte du prix du bien ainsi que des frais supplémentaires (agence, dossier, assurance).
- Capacité de remboursement : généralement, cela ne doit pas dépasser un tiers de ses revenus.
- Durée de remboursement : choisir une durée qui s'aligne avec ses projets de vie.
3. Vérifier l'éligibilité du logement : s’assurer que le logement qu’il est envisagé d'acheter répond aux critères des dispositifs d'accession sociale.
4. Consulter les plafonds de ressources : vérifier que ses revenus ne dépassent pas les plafonds requis pour bénéficier de l'accession sociale.
Il s'agit d'un mécanisme destiné à favoriser l'accès à la propriété pour les ménages aux revenus modestes ou intermédiaires en facilitant l'achat de logements neufs à prix réduit, tout en encourageant les promoteurs à proposer des offres accessibles. Cette démarche peut permettre de stimuler la construction de logements sociaux ou abordables dans des zones tendues où l'immobilier est particulièrement cher. Voici les principaux éléments du dispositif :
En résumé, ce mécanisme permet d'offrir des logements neufs à prix réduit pour des ménages qui n'auraient pas les moyens d'acheter à prix plein tout en contrôlant les risques de spéculation immobilière. Il représente un compromis entre les besoins des promoteurs immobiliers et ceux des ménages modestes en matière d'accession à la propriété. Pour pouvoir bénéficier de ces logements neufs à prix maîtrisés, il faut absolument être éligible au prêt à taux zéro et acheter pour la première fois. Pour rendre certains quartiers attractifs, l’acquéreur bénéficie d’une TVA réduite à 5,5 % au lieu de 20 % pour l’accession à la propriété d’un appartement ou d’une maison, construit jusqu’à 300 mètres d’une zone ANRU (zone d’aménagement et de rénovation urbaine).
Il s’agit d’un dispositif d’accession à la propriété comportant 2 phases successives :
L’avantage de cet achat est finalement d’occuper le bien avant de l’acheter et surtout de s’assurer de la possibilité de pouvoir financer ce projet. En outre, à compter de la date d’achèvement du bien il est prévu une exonération de la taxe foncière pendant 15 ans. La TVA à taux réduit de 5,5 % s’applique également.
Il s’agit d’un dispositif dissociant le foncier et le bâti pour permettre de minorer le prix des logements. L’acquéreur achète uniquement le logement et loue le terrain à un Organisme Foncier Solidaire (OFS) pour un loyer faible, en signant un bail réel solidaire, d’une durée comprise entre 18 et 99 ans. L’acquéreur pourra revendre à tout moment son logement aux conditions fixées dans le contrat initial.