Rémunération des syndics, ce que vous devez payer... ou pas !

Depuis la loi ALUR, les règles de rémunération des syndics se sont considérablement simplifiées. La loi a en effet imposé dès 2014 un contrat type de syndic, entré en vigueur le 2 juillet 2015. Mais, si la situation s’est améliorée, de nombreux abus persistent.

La loi ALUR a instauré un contrat type de syndic, une trame, un peu longue, mais qui présente l’avantage d’être très claire. Elle suit en effet le principe du « tout sauf » : tout est compris dans les honoraires de base sauf certaines prestations prévues par décret (une vingtaine énumérées dans le contrat de syndic).

« Avec cette évolution, les copropriétaires sont censés être protégés de facturations abusives, telles qu’elles ont pu être pratiquées dans le passé » décrit Rachid Laaraj, le directeur général de Syneval, courtier en syndic.

Ainsi par exemple le contrat type impose d’intégrer dans le forfait un certain nombre de visites de la copropriété par le syndic. « Nous engageons les copropriétaires à vérifier que le contrat le prévoit bien, avec un minimum de deux visites par an » indique le fondateur de Synéval.

Le contrat type contient aussi un questionnaire de vente fourni obligatoirement par le syndic (l’Etat daté) en cas de mutation dans la copropriété. Ce document est facturé par le syndic à un prix non encore plafonné à ce jour. « Un décret est attendu sur le sujet, mais en attendant, nous préconisons de ne pas dépasser une fourchette entre 400 et 500 euros » avance Rachid Laaraj.

Parmi les autres points précisés par ce contrat type : les frais de tirage, sont désormais intégrés dans la rémunération forfaitaire, ainsi que la tenue de l’AG annuelle. Le contrat prévoit cependant que des prestations particulières peuvent être facturées sur la base d’un tarif horaire qui peuvent donner lieu à négociation entre les copropriétaires et le syndic. « Toutefois, nous recommandons de ne pas dépasser 120 euros TTC de l’heure sur les heures ouvrables pour ces prestations », précise Rachid Laaraj.

Dans 41 % des cas, un contrat pas respecté

Si la mise en œuvre de ce contrat type a sans doute amélioré la situation, elle n’a cependant pas mis fin à tous les abus. En cause ? Une application encore trop faible ou erronée de ce contrat type par les syndics. C’est ce qu’a montré en effet une enquête de la DGCCRF réalisée en 2016. L’étude a mis en évidence que si les syndics mettent en place ce contrat type, dans 41 % des cas ils ne le respectent pas. « Certains s’en affranchissent complètement et d’autres suppriment des clauses », constate aussi le courtier Synéval.

Selon l’étude de 2016, les principaux manquements consistent en effet en la suppression de clauses ou de paragraphes ce qui est contraire au principe de contrat type et rend plus difficile pour les copropriétaires la comparaison entre syndics. De telles pratiques, ne permettent pas aux copropriétaires de faire leur choix de façon éclairé.

Parmi les autres abus constatés, il faut noter une augmentation du niveau des honoraires pour le forfait annuel de gestion courante chez tous les syndics contrôlés. Les trois formes les plus courantes de cette augmentation concernent l’intégration dans le forfait de prestations précédemment considérées comme complémentaires (par exemple, les frais de reprographie).

Une augmentation liée aux nouvelles obligations instaurées par la loi ALUR, c’est-à-dire la création du compte bancaire séparé et du fonds de travaux. Enfin, une augmentation à champ constant liée au marché, les prix dans ce secteur d’activité étant libres. L’étude a par ailleurs mis en évidence des écarts de prix de l’ordre de 25 % entre syndics pour les prestations particulières hors forfait.

Plusieurs pratiques interdites ont été constatées, telles que la mention de plusieurs coûts horaires en fonction du niveau hiérarchique du personnel du syndic chargée d’exécuter les prestations mais aussi en fonction des heures ouvrables. Ceci alors que la réglementation prévoit un seul coût horaire.

Si ces tarifs horaires peuvent donner lieu à négociation, Syneval recommande « de ne pas dépasser 120 euros TTC de l’heure sur les heures ouvrables pour ces prestations ».

En cas de litiges, le cabinet de conseil préconise aux copropriétaires de se rapprocher du syndic pour faire part du désaccord ; puis d’une association de copro- priétaires pour être accompagné en cas de procédure, si un accord amiable n’a pas été trouvé.

Sanctions et transparence depuis mai 2019

Six mois après la promulgation de la loi Elan valant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, le gouvernement a publié fin mai, plusieurs décrets, dont deux, incitent les syndics à plus de transparence et instaurent des sanctions en cas de non conformité.

Le premier est le décret n°2019- 502 du 23 mai 2019, applicable à partir du 1er juillet 2020, il fixe la liste des documents à mettre gratuitement à disposition des copropriétaires sur leur extranet. Le décret fixe trois sortes d’éléments, d’une part la liste minimale des documents relatifs au lot d’un copropriétaire et mis à sa seule disposition par le syndic (son compte individuel, le montant de ses charges courantes du budget prévisionnel et hors budget prévisionnel, les avis d’appels de fonds...) D’autre part, la liste des documents relatifs à la gestion de l’immeuble et accessible à l’ensemble des propriétaires (règlement de copro, carnet d’entretien, diagnostics techniques...)

Enfin, la liste des documents relatifs à la gestion de l’immeuble et accessibles aux seuls membres du conseil syndical (balances générales des comptes, liste des copropriétaires, carte professionnelle du syndic...)

Par ailleurs, un autre décret (n° 2019-503) également publié le 23 mai 2019, fixe le montant de pénalités applicables au syndic de copropriété en cas d’absence de communication des pièces au conseil syndical. Le décret fixe le montant des pénalités à 15 euros par jour de retard, imputables à compter d’un mois après la demande du conseil syndical restée sans suite.

Honoraires de base : de grandes disparités

Le cabinet Syneval a sollicité les dirigeants des cabinets de syndic afin qu’ils communiquent leur grille d’honoraires de base indicative pour l’année 2018 par lot principal.

Cette grille prévoit une tarification différenciée en fonction de la taille de la résidence et intègre également la possibilité de préciser un « forfait minimal » éventuellement facturé par le syndic quelle que soit la taille de la copropriété. Il faut noter que cette grille s’entend pour une copropriété moyenne et n’intègre donc pas un éventuel surcoût lié à la présence d’éléments collectifs très spécifiques ou de dossiers lourds à gérer tels que des contentieux, des travaux ou des impayés.

Forfait de base par lot

Paris

Ile-de-France

Lyon

Jusqu’à 10 lots

419 HT

350 HT 304 HT

De 11 à 20 lots

334 HT 264 HT 244 HT

De 21 à 50 lors

243 HT 229 HT 215 HT

De 51 à 100 lots

221 HT 213 HT 198 HT

Plus de 100 lots

207 HT 200 HT 186 HT

Application d’un forfait minimal

4085 HT 3406 HT 2503 HT

Verdict ? De grandes disparités sont à noter selon les régions et des augmentations substantielles ont été appliquées entre 2017 et 2018. Revue de détail.

Honoraires de base

C’est sans surprise à Paris que les tarifs sont les plus élevés et Syneval constate d’ailleurs que « pour la deuxième année consécutive, la moyenne de tarification par lot principal dépasse les 200 euros, quelle que soit la taille de la propriété. » D’autres part, les honoraires de base ont fortement augmenté pour les copropriétés de moins de 20 lots principaux, notamment du fait de la hausse du forfait minimal qui dépasse les 4000 euros à Paris (en hausse de 10 % par rapport à 2017) et les 2500 euros à Lyon (en hausse de 20 % par rapport à 2017).

Une augmentation qui peut néanmoins s’expliquer par les obligations règlementaires imposées par la loi ALUR, notamment la création d’un extranet de la copropriété, assez coûteux à mettre en place. Seules les copropriétés de plus de 50 lots semblent épargnées par cette tendance. Pour Synéval, « elles bénéficient sans doute de l’obligation de mise en concurrence du mandat de syndic imposée par la loi ALUR. »

Fin du vide juridique pour le Pré-Etat-Daté ?

Si le Pré-Etat-daté n’existe pas au regard de la loi (en effet, l’Etat Daté est le seul document exigible lors de la vente d’un lot de copropriété prévu par l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965), les litiges concernant ce document sont nombreux. Ils seront peut être définitivement réglés par la publication du 23 mai 2019 (voir article). « Le Pré-Etat Daté est né d’une construction de la pratique notariale qui a consisté à essayer de renseigner les transactions plus en amont (avant le compromis de vente) », explique en effet Xavier Martin, qui dirige le syndic de copropriétés Martin Gestion à Toulouse. Dans les faits, les vendeurs qui ont du mal à obtenir les éléments demandés (compte rendus des AG, informations liées au degré d’impayés au dernier exercice comptable clos, fiche synthétique de l’immeuble..., les demandent à leur syndic, qui parfois les leur facturent. « Or il y a un vrai vide juridique sur le sujet, car ces Pré-Etat-Datés ne figurent pas dans l’annexe 2, ils n’ont donc pas d’existence légale au regard des éléments facturables », indique l’expert.

Le décret pré-cité du 23 mai 2019, relatif à la liste minimale des documents dématérialisés concernant la copropriété, accessibles sur un espace sécurisé en ligne, devrait cependant changer la donne. « Il prévoit que le syndic devra mettre ces éléments à libre disposition sur son extranet, mais ne sera applicable qu’à partir du 1er juillet 2020. »

Béatrice Girard • Journaliste

Source : 25 millions de propriétaires • N°juillet-août 2019


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