Les Trente Glorieuses ont marqué l’avènement de la maison individuelle. Les années 60 représentent la grande époque du développement urbain de type lotissement. D’un côté les familles quittent les campagnes pour s’installer à proximité des grandes villes, de l’autre les citadins, las de voir leur centre-ville congestionné par la circulation, viennent s’installer dans une zone pavillonnaire. La création des lotissements répond à ces 2 mouvements de population.
On note cependant depuis quelques années une décroissance du lotissement, d’abord lié au prix de l’immobilier, les centres-villes et premières couronnes sont aujourd’hui développés autour de projets de promotion immobilière (immeubles, appartements), les grands projets de lotissements sont donc repoussés loin des centres-villes et attirent, de fait, moins qu’auparavant.
Cependant, si les grands projets de lotissement se font de plus en plus rares, un nouveau type de division a fait son apparition depuis quelques années : la subdivision d’une parcelle déjà bâtie. Cette subdivision peut viser plusieurs objectifs. Le premier des objectifs est la valorisation du patrimoine : je projette de vendre ma maison, mais avec un jardin de 1500 m², le prix de vente est-il optimum ? Pourquoi ne pas céder la maison d’un côté et un ou deux terrains à bâtir de l’autre ?
Le second des objectifs est de diminuer l’entretien d’une part et la fiscalité d’autre part en réduisant la taille du terrain : je suis propriétaire d’une maison avec un grand terrain de 3000 m², mais aujourd’hui je commence à fatiguer et n’ai plus le courage d’en faire l’entretien. Pourquoi ne pas détacher un ou deux terrains à bâtir et ainsi ne conserver que la surface nécessaire attenante à la maison ?
Ces créations de terrains à bâtir parfois même au sein d’un ancien lot de lotissement répondent aussi au besoin de l’acheteur qui, il y a 30 ans cherchait un terrain de 3000 m² et qui aujourd’hui cherche un terrain de taille réduite pour y construire sa propre maison mais avec un entretien réduit des espaces extérieurs.
Au fil du temps, le législateur a règlementé la création de terrain à bâtir en suivants 2 objectifs : le premier, d’encadrer le développement des terrains à bâtir et le second de garantir la constructibilité à l’acquéreur. Sur les 20 dernières années, on note 4 grandes évolutions législatives.
La loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbains) du 13 décembre 2000 a remis à plat toute la gestion de l’urbanisme en France. Dans notre sujet, on notera notamment la modification des documents d’urbanisme et l’obligation de bornage de chaque terrain à bâtir afin d’en garantir les limites et la superficie.
L’ordonnance du 8 décembre 2005 a modifié le régime des autorisations d’urbanisme.
La loi ALUR (Accès au Logement et Urbanisme Rénové) du 24 mars 2014 a supprimé la taille minimum de terrain à bâtir et le coefficient d’emprise au sol. Cette loi a, de fait, levé un des freins à la subdivision de terrains existants.
La loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) du 23 novembre 2018, vient compléter les lois précédentes. Elle précise notamment la dématérialisation totale des demandes d’urbanisme au 1er janvier 2022 et prévoit une nouvelle garantie à apporter à l’acquéreur à partir du 1er janvier 2020 : fourniture d’une étude de sol dans le cas de sols argileux (décret du 22 mai 2019)
Cette première étude consiste à étudier, avant de se lancer dans des démarches plus approfondies, les différentes possibilités de division sur une propriété. Cinq aspects sont étudiés de près :
Cette étude de faisabilité est la clé de la réussite de tout projet.
Une fois bouclée, les démarches permettant la création du ou des terrains à bâtir peuvent être lancées.
Avant de déposer une autorisation d’urbanisme, il est nécessaire de maîtriser les limites du terrain, objet du projet de division. La loi SRU impose au vendeur de garantir à l’acheteur les limites du terrain. En contexte urbain, les limites sont généralement physiquement visibles (clôtures, murs, haies) mais il est important d’aller au-delà des éléments visibles et de définir l’appartenance des murs et clôtures. Cette définition des limites se fait de manière contradictoire obligatoirement par un géomètre-expert lors d’une procédure de bornage et de reconnaissance des limites.
A l’issue de la procédure, le géomètre-expert établit un plan et un procès-verbal de bornage, seuls documents garantissant les limites de propriété.
A titre d’information, les superficies et plans cadastraux sont des documents fiscaux, ceux-ci n’apportent aucune garantie sur les limites de propriétés.
Sur la base de l’étude de faisabilité, la demande d’autorisation d’urbanisme est montée.
Il existe 2 types d’autorisations d’urbanisme : la déclaration préalable (DP) et le permis d’aménager (PA).
La déclaration préalable est requise pour le détachement d’un ou plusieurs lots à la condition qu’il n’y ait pas création d’équipements communs (réseaux, voirie).
Le permis d’aménager, dossier plus complexe, est requis dans le cas de la création d’équipements communs ou de projets aux abords d’un site patrimonial remarquable ou d’un monument historique.
L’autorisation d’urbanisme est obligatoirement montée sur un plan des lieux cotés en 3 dimensions (planimétrie et altimétrie).
Elle est déposée dans la mairie où se situe le projet. Le délai d’instruction est de 1 mois pour une déclaration préalable et de 3 mois pour un permis d’aménager.
Une fois l’autorisation obtenue, celle-ci doit être affichée sur le terrain, visible du public. C’est le point de départ du délai de recours. Les tiers ont 2 mois pour faire un recours contre l’autorisation d’urbanisme, l’administration dispose quant à elle d’un mois de plus pour retirer l’autorisation. Afin que les délais ne soient pas contestés, il est conseillé de faire constater l’affichage par un huissier.
Dans le cas du permis d’aménager, il est obligatoire de réaliser les travaux de viabilisation du ou des terrains à bâtir.
Après obtention de l’autorisation d’urbanisme, le géomètre-expert matérialise les limites du ou des terrains créés, établit le document modificatif du parcellaire cadastral et dresse le plan de bornage du ou des lot(s).
Après obtention de l’autorisation d’urbanisme, le terrain peut être mis en vente. Une promesse de vente est alors signée chez le notaire avec l’acquéreur. Cette promesse contient généralement en condition suspensive l’obtention du permis de construire de l’acquéreur.
L’étude de faisabilité d’un projet de division est rapide mais indispensable. Elle permet, en quelques jours ou semaines, de connaître la valorisation potentielle de la propriété. Celle-ci peut, par exemple, se révéler plus intéressante que de céder une maison en vue de construire un immeuble.
Lors d’un projet de division, quelques difficultés peuvent être rencontrées. Celles-ci, une fois appréhendées, peuvent être traitées sereinement.
La première difficulté est la gestion des délais. Cette difficulté est plus émotionnelle que technique mais à ne pas négliger. En effet, certains délais sont incompressibles (délais d’instruction de l’autorisation d’urbanisme, de recours, d’obtention du permis de construire de l’acquéreur) et d’autres dépendent du contexte (durée des travaux de viabilisation dans le cadre d’un permis d’aménager, recours éventuel d’un tiers…). Ces délais peuvent être éprouvants pour un vendeur.
La seconde difficulté est celle du financement. En effet, un projet de division dure au moins 6 mois et peut dépasser une année. Ce qui signifie que durant toute la durée du projet, le vendeur doit financer les frais de création du ou des terrains. Ces frais peuvent s’élever de 5 000 € pour la simple création d’un terrain à bâtir à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour la création de plusieurs terrains à bâtir. Le sujet du financement doit être abordé dès l’étude de faisabilité afin qu’il ne devienne pas bloquant dans le déroulement du projet.
Être entouré de professionnels qualifiés est la garantie de la réussite d’un projet de division.
Le géomètre-expert est le premier conseiller du vendeur, il maîtrise le tissu local et les règles d’urbanisme, il accompagne le vendeur de la faisabilité jusqu’à la vente.
Le notaire garantit les actes de vente qu’il reçoit. Il est un conseiller indispensable dans un projet immobilier. Il maîtrise notamment la fiscalité.
L’agent immobilier maîtrise le marché et peut accompagner le vendeur dans la recherche d’un acquéreur.
Le détachement d’un terrain à bâtir sur sa propriété est un bon moyen de valoriser au mieux son patrimoine. Cependant, se faire accompagner par un professionnel est indispensable pour étudier la faisabilité du projet avant de se lancer. On retiendra les étapes suivantes :
- étude de la faisabilité du projet,
- bornage du périmètre du projet,
- obtention d’une autorisation d’urbanisme,
- vente du terrain.
Thomas Cabanis • Géomètre-expert
Source : 25 millions de propriétaires • N°février 2019
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