Au sein des tous petits immeubles, certains syndics bénévoles utilisent leur compte bancaire personnel pour éviter les frais bancaires liés à un compte au nom de la copropriété. C’est tout simplement illégal. Le syndic bénévole doit ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat de copropriété, aussi petit soit-il, sous peine de nullité de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation (art. 18 II loi 1965) et également pour une question de transparence. L'établissement bancaire est choisi par le syndic lui-même ou par l’assemblée générale à la majorité absolue.
Le compte bancaire sert pour le versement des appels de fonds, des indemnités d’assurance et pour différents paiements : assurance de l’immeuble, factures d’eau et d’électricité, envois des convocations aux assemblées générales, photocopies des annexes, ménage des parties communes…
Il n’y a aucune dérogation pour les petites copropriétés, ni pour un syndic bénévole. L’exception de compte bancaire séparé pour les copropriétés de quinze lots principaux au plus ne vaut que pour les syndics professionnels qui peuvent utiliser un sous-compte.
Le syndic bénévole peut avoir à ouvrir un second compte bancaire, celui-ci rémunéré, lorsque la copropriété est soumise à la constitution d’un fonds de travaux. A l’inverse du compte courant, une exception est possible. La copropriété comportant moins de 10 lots (principaux) peut se dispenser de ce fonds de travaux et du compte bancaire associé, par un vote à l’unanimité en assemblée générale. Deux autres cas de dispense existent en dehors de toute décision d’assemblée : l’immeuble a moins de 5 ans ou le diagnostic technique global (DTG) conclut à l’absence de besoin de travaux sur les 10 années suivant sa réalisation.
Conseil : le compte bancaire au nom de la copropriété est indispensable et le syndic doit mettre à disposition du conseil syndical une copie des relevés périodiques des comptes, dès réception de ceux-ci.
« Pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel. L'assemblée générale des copropriétaires appelée à voter le budget prévisionnel est réunie dans un délai de six mois à compter du dernier jour de l'exercice comptable précédent.
Les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté. Toutefois, l'assemblée générale peut fixer des modalités différentes.
La provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l'assemblée générale. »
Cet article 14-1 de la loi de 1965 impose l’établissement et le vote, à la majorité relative, d’un budget prévisionnel annuel et des appels de fonds correspondants. Ce budget prévisionnel est le budget de fonctionnement.
Cet article pose le principe du paiement par avance, éventuellement par fractions. Aussi faible soit son budget, le syndic ne peut avancer de fonds au syndicat des copropriétaires.
Cet article est précis, il détermine :
Le syndic doit tenir compte des évolutions des coûts, de toute modification dans les modalités de fonctionnement de la copropriété qui auraient une influence sur son budget. Il ne faut pas voter un budget trop serré, cela pourrait rapidement nuire à la copropriété pour honorer le règlement des factures, notamment en cas de retard de paiement de charges d’un copropriétaire. Ce budget prévisionnel doit être présenté en assemblée générale sous forme d’un récapitulatif suivant les postes de répartition (charges générales, charges parking, charges ascenseur…) fixés par le règlement de copropriété.
Le syndic bénévole désigné lors de la vente du premier lot, très souvent le vendeur, peut exiger le versement d'une provision, qui doit être fixée par le règlement de copropriété, pour faire face aux premières dépenses qui entreraient dans le budget prévisionnel.
A défaut de mention dans le règlement de copropriété ou dans le cas d’une provision insuffisante, le syndic peut appeler auprès des copropriétaires le remboursement des dépenses jusqu'à la première assemblée générale réunie à son initiative qui votera le premier budget prévisionnel et approuvera les comptes de la période écoulée. Il s’agit du seul cas où le syndic est autorisé par la loi à avancer des fonds à la copropriété.
Conformément au premier alinéa de l’article 14-2 de la loi de 1965, l’article 44 du décret de 1967 fixe la liste des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel et qui doivent donc faire l’objet de budgets distincts :
Pour tous ces travaux, il faut déterminer des modalités d’exigibilité en assemblée générale : nombre, montant et temporalité des appels de fonds pour l’essentiel.
Souvent, les syndics bénévoles font voter à tort une enveloppe globale incluant les travaux dans le budget de fonctionnement de la copropriété.
Pour rappel, ce fonds est obligatoire dans tous les immeubles en copropriété à usage partiel ou total d’habitation, sauf exceptions précisées précédemment.
Il peut être utilisé pour tous les travaux énumérés ci-dessus (c’est-à-dire les travaux qui ne sont pas compris dans le budget prévisionnel) et ceux prescrits par les lois et règlements.
Son montant annuel doit faire l’objet d’un vote avec un seuil qui ne peut être inférieur à 5% du budget prévisionnel. Par praticité, il suit la même récurrence d’appels de fonds que le budget prévisionnel.
Les sommes versées au titre du fonds de travaux sont attachées aux lots et définitivement acquises au syndicat des copropriétaires. Lors de la vente d’un lot, le vendeur n’est donc pas remboursé par la copropriété.
Au titre des sommes que le syndic est en droit d’exiger[1], en sus de celles précisées précédemment, s’ajoute le versement de l'avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété, laquelle ne peut excéder 1/6ème du montant du budget prévisionnel. Si le règlement est muet, l’assemblée générale peut l’instaurer à la double majorité.
Ce fonds de roulement peut faciliter le paiement ponctuel des fournisseurs mais ne doit pas servir à l’octroi de délais supplémentaires à un copropriétaire débiteur, ni à abaisser le budget prévisionnel.
Conseil : l’assemblée générale peut donc être amenée à voter plusieurs budgets. Rappelons qu’une assemblée générale approuve les comptes de l’année précédente et vote les budgets de l’année suivante. Les budgets de l’année en cours ont été votés l’année précédente pour permettre les appels de fonds au 1er janvier de l’année. Ce procédé garantit le bon fonctionnement de la comptabilité.
Le syndic doit tenir un exercice comptable sur 12 mois, 18 mois maximum pour le premier à la création de la copropriété[2], présenter les comptes clos en assemblée générale et tenir les justificatifs à disposition, soit une somme de documents comptables avec des modalités de saisie strictes. L’article 2 de l’arrêté de 2005 liste ces documents : le livre journal, le grand livre, les balances générales. Les écritures comptables de ces documents correspondent à un numéro de compte de la nomenclature comptable dédiée à la copropriété[3] :
Une subtilité est à retenir en préalable : le compte banque (classe 5) est débiteur lorsqu’il reste de l’argent sur le compte bancaire de la copropriété et il est créditeur lorsqu’il faut rembourser de l’argent à la banque. Il se regarde du point de vue de la banque et non du syndicat des copropriétaires.
- Une comptabilité d’engagement
L’article 14-3 de la loi de 1965 énonce que « les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L'engagement est soldé par le règlement. ». Tout doit être saisi immédiatement : envoi des appels de fonds, paiement des appels de fonds, réception facture, paiement facture… Cela permet de savoir exactement où en est la copropriété à tout moment et d’éviter d’oublier une facture à régler par exemple.
- Une comptabilité en partie double
Toute opération est inscrite au débit d’un compte et au crédit d’un autre afin d’obtenir un résultat nul. A réception d’une facture d’entretien par exemple, la somme est inscrite au débit du compte 615 Entretien et au crédit du compte 401 Fournisseur et au paiement de la facture la somme est inscrite au débit du compte 401 Fournisseur et au crédit du compte 512 Banque.
Ces écritures en débit et en crédit sont ardues à appréhender, le « + » et le « - » s’inversent : le « + » devient le débit et le « - » devient le crédit.
En reprenant l’exemple, à la réception de la facture d’entretien, le compte fournisseur est crédité de la somme, au paiement de la facture le compte fournisseur est débité de la somme, le « + » devient le débit.
- L’exception de la comptabilité de trésorerie
En raison du nombre de lots de la copropriété ou de son budget, la comptabilité peut être en partie allégée. Cette dérogation a été modifiée dans son étendue par l’ordonnance n°2019-1101 du 30 octobre 2019 et intégrée à la partie nouvelle de la loi de 1965 traitant des dispositions spécifiques aux petites copropriétés (chapitre IV ter – article 41-10). Il s’agit désormais des copropriétés de maximum 5 lots principaux ou ayant un budget prévisionnel moyen sur 3 exercices consécutifs inférieur à 15 000 €. L’abaissement du nombre de lots est peut-être dû à la tentation de minimiser le budget pour entrer dans ce cadre de comptabilité simplifiée.
Le texte précise : « Par dérogation à l'article 14-3, le syndicat n'est pas tenu à une comptabilité en partie double ; ses engagements peuvent être constatés en fin d'exercice. ».
D’une part, cette saisie simplifiée se limite aux opérations ayant une incidence financière pour la copropriété (encaissement, paiement). Par exemple, le paiement d’une facture ou le règlement d’un appel de fonds par un copropriétaire.
D’autre part, les engagements peuvent être constatés en fin d'exercice. Cela signifie que la date du fait générateur, date d’encaissement ou de décaissement, n’est pas prise en compte. Le syndic peut donc établir les comptes en fin d’exercice sans tenue chronologique.
- Le livre journal
Il s’agit de l’enregistrement chronologique de toutes les opérations : numéro, date de la saisie de l’écriture, numéro de compte (du plan comptable), intitulé (appel de provision M. X, facture), libellé de l’écriture (appel 1er trimestre, facture eau n°), inscrite au débit (montant appel fonds) ou au crédit (montant facture).
Au premier jour de l’exercice comptable, il faut y reporter toutes les saisies en attente (régularisation copropriétaire, la banque, une facture non réglée…) de l’exercice précédent au débit ou au crédit.
Avec une comptabilité de trésorerie, le nombre de lignes de saisie est ainsi divisé par deux.
N° | Date | N° compte | Intitulé | libellé | Débit | Crédit |
44 | 25/05/20 | 615 | Facture | Facture n° … entretien | 320 |
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45 | 01/06/20 | 701 | Appel de fonds M. X | Appel 3ème trimestre |
| 100 |
46 | ................. |
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- Le grand livre
Il regroupe l’ensemble des comptes utilisés par le syndicat, opération par opération. Sous chaque compte, il doit y avoir toutes les opérations dont il a fait l’objet. Le grand livre reprend les éléments du journal dans un classement différent et une présentation dite en T en raison du format du tableau.
En cas de comptabilité de trésorerie, seules les opérations d’encaissement ou de décaissement y figurent. Selon les exemples ci-dessous, il s’agit du paiement de la facture et du règlement de l’appel de fonds.
- Facture d’entretien
Enregistrement à la réception de la facture |
| 615 – Entretien et petites réparations |
| 401 – Fournisseur | ||
| Débit | Crédit |
| Débit | Crédit | |
| 320 |
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| 320 |
Enregistrement au paiement de la facture |
| 512 – Banque |
| 401 – Fournisseur | ||
| Débit | Crédit |
| Débit | Crédit | |
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| 320 |
| 320 |
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- Appel de fonds à un copropriétaire
Enregistrement à l’envoi de l’appel de fonds |
| 450 – Copropriétaire M. X |
| 701 – Provision sur opérations courantes | ||
| Débit | Crédit |
| Débit | Crédit | |
| 100 |
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| 100 |
Enregistrement au règlement de l’appel |
| 450 – Copropriétaire M. X |
| 512 – Banque | ||
| Débit | Crédit |
| Débit | Crédit | |
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| 100 |
| 100 |
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- Les balances
Une balance est un tableau de synthèse au terme de l’exercice comptable. Il en faut deux en copropriété afin de faciliter le contrôle de la répartition des charges par chaque copropriétaire :
Les colonnes du tableau sont les suivantes : n° compte, libellé, somme au débit, somme au crédit, solde débiteur, solde créditeur.
Ces balances sont à annexer à la convocation à l’assemblée générale.
- L’état des dépenses
Connu également sous la terminologie de relevé général des dépenses, ce document est à joindre à la convocation à l’assemblée générale. Il reprend, en ligne, toutes les dépenses de l’année classées par nature de charges (il ne s’agit pas de toutes les factures payées) et en colonne : charges concernées, montant, total, part TVA.
Par suite de l’approbation des comptes en assemblée générale, il faudra régulariser les comptes auprès des copropriétaires en produisant un arrêté de compte individuel, justifiant le restant dû au syndicat ou le trop-perçu par celui-ci.
Pour la présentation des comptes en assemblée générale, l’article 8 du décret du 14 mars 2005 prévoit que les comptes font l'objet de « documents de synthèse » comprenant obligatoirement l'état financier, le compte de gestion général du syndicat, l'état des travaux hors budget prévisionnel et des opérations exceptionnelles votés et non clôturés en fin d'exercice (annexes 1 à 5 du décret du 14 mars 2005, sous la forme de 5 tableaux).
Ce décret, avec ses 5 annexes, peut être consulté :
en cliquant sur ce lien
Pour rappel, ces documents doivent être annexés à la convocation sous peine de nullité des décisions d’approbation des comptes.
Exemple : on considère que l’assemblée générale est celle de 2020 avec l’exercice comptable 2019 (N) à approuver (du 01/01/19 au 31/12/19).
Ce document est une photographie de la situation financière de la copropriété à la date de clôture de l’exercice comptable.
Pour l’exercice précédent 2018 approuvé en 2019 et l’exercice clos 2019 à approuver en 2020 (colonnes), il fait apparaître à la date de clôture de l’exercice comptable les lignes suivantes :
Il faut y ajouter un tableau de la répartition par copropriétaire (lignes) : solde en début d’exercice, appels de budget, règlements effectués, charges réelles sur la période, solde à approuver (colonnes). Cela permet de constater l’état du recouvrement des charges auprès de chaque copropriétaire.
Elle distingue les charges et les produits par nature, avec un comparatif avec l’année précédente et le budget suivant, mettant ainsi en évidence l’évolution des dépenses.
Ce tableau distingue les charges en partie gauche et les produits en partie droite avec les catégories (lignes).
Toutes ces informations sont détaillées, en colonnes, pour l’approbation des comptes (exercice précédent approuvé 2018, exercice clos budget voté 2019, exercice clos à approuver 2019), et pour le budget prévisionnel (budget prévisionnel en cours voté 2020, budget prévisionnel à voter 2021). Le solde doit apparaître au bas de chaque colonne.
Il s’agit de classer les charges suivant la clé de répartition : charges communes générales, charge par bâtiment, ascenseur, eau froide, eau chaude, chauffage, parking… en ligne.
En colonne, comme pour l’annexe 2, les charges doivent apparaître pour l’approbation des comptes (exercice précédent approuvé 2018, exercice clos budget voté 2019, exercice clos à approuver 2019) et pour le budget prévisionnel (budget prévisionnel en cours voté 2020, budget prévisionnel à voter 2021). Elle se termine par le solde (charges moins provision) en positif ou négatif.
Elle fait apparaître les colonnes suivantes : montants des dépenses travaux votés, dépenses effectuées, provisions appelées et solde.
Il faut distinguer, en lignes, les travaux selon leur catégorie du plan comptable.
Cette annexe permet aux copropriétaires de vérifier si le montant utilisé pour les travaux correspond au montant voté lors de l’assemblée générale l’année précédente.
Cette annexe peut être sans objet s’il n’y a pas eu de travaux sur l’année.
Elle permet de suivre l’avancée des travaux et de vérifier les montants (colonnes) :
En lignes, il faut détailler les travaux par marché (toiture, ravalement, cage d’escalier...)
Cette annexe peut être sans objet s’il n’y a pas de travaux en cours.
Comment faites-vous face aux obligations comptables ?
Mon approche est très pragmatique car je n’ai aucune connaissance particulière sur le sujet. Je suis devenu le syndic bénévole de l’immeuble, car le précédent, lui-même bénévole, ne pensait plus avoir les compétences nécessaires pour poursuivre sa fonction.
Je me suis « fabriqué » mes propres feuilles de calcul sur Excel en copiant ce qui avait été fait précédemment.
Il ne s’agissait pas d’une comptabilité dans les « règles de l’art » de la législation mais tous les copropriétaires pouvaient vérifier les dépenses par rapport aux provisions qu’ils avaient versées suivant leurs quotes-parts.
Depuis la loi ÉLAN et au vu des difficultés que représente la gestion d’une copropriété et de sa comptabilité, j’ai adhéré à une association UNPI afin d’être accompagné et conseillé. J’ai participé à un atelier sur la gestion comptable mais pour un non professionnel ces notions restent ardues à appréhender.
Quelles adaptations seraient nécessaires pour assurer à la fois la bonne information des copropriétaires, la sécurité de la comptabilité et la gestion par un non professionnel ?
Il serait souhaitable que le législateur produise des documents type de comptabilité simplifiée pour les syndics bénévoles ou un logiciel agréé à un coût qui soit acceptable pour les petits syndicats de copropriétaires et facilement utilisable grâce à une comptabilité simplifiée.
[1] Article 35 du décret de 1967
[2] Article 5 du décret n° 2005-240 du 14 mars 2005
[3] Arrêté du 14 mars 2005 disponible sur www.legifrance.gouv.fr
[4] Article 55 du décret de 1967
[5] Réponse ministérielle n°7780, JO Assemblée nationale, 11 septembre 2018
Source : 25 millions de propriétaires • N°juillet-août 2020
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