Régime de la location meublée, une fiscalité spécifique

Alors que la demande des locataires évolue, notamment dans les centres villes, de plus en plus de bailleurs s’interrogent sur le régime de la location meublée. Alors que les revenus issus d’une location classique, dit nue, sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers, la location meublée répondra aux mécanismes fiscaux des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC). Détails.

Pour rappel, dans le régime de la location nue, les revenus locatifs nets vont être imposables dans la catégorie des revenus fonciers. Deux mécanismes permettent de déterminer les revenus locatifs nets. Le régime micro permet de bénéficier d’un abattement de 30% sur les loyers. Le régime réel permet de déduire des loyers réellement encaissés toutes les charges d’exploitation (les dépenses d’entretien et réparation, les charges de copropriété, frais de gestion, primes d’assurances, les intérêts d’emprunt…)

Une fois déterminé, le revenu foncier imposable sera additionné aux autres revenus et imposé au barème fiscal. Le montant net des revenus foncier est également soumis aux prélèvements sociaux (17.2%).

Origine de la spécificité fiscale de la location meublée

Alors que l’activité de la location nue est considérée fiscalement comme une activité civile, la location meublée est traitée comme une activité commerciale. Toutes les spécificités fiscales de ce régime trouvent leurs sources dans cette distinction. A l’origine le législateur a voulu intégrer un principe d’équité entre le contribuable loueur meublé et l’hôtelier en considérant que leurs fonds de commerce étaient identiques.

L’intérêt de la location meublée réside dans cette imposition au titre des bénéfices industriels et commerciaux. Le propriétaire est considéré être à la tête d’une entreprise individuelle. En offrant la possibilité de tenir une comptabilité commerciale cette option va permettre de modifier considérablement le mécanisme de détermination du bénéfice imposable.

La détermination du bénéfice imposable

Le loueur en meublé devra donc se plier aux caractéristiques fiscales propres aux BIC. Il verra ses bénéfices imposés par principe au régime du micro-BIC et sur option au régime réel.

Le régime micro

Le régime d’imposition micro bénéfice industriels et commerciaux (micro BIC) s’applique de plein droit aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 70 000 €.

Ces entreprises peuvent bénéficier d’un abattement forfaitaire de 50% afin de déterminer le montant du bénéfice imposable. Dans un contexte de location meublée, le chiffre d’affaires correspond aux loyers encaissés. Ainsi, de l’application du régime micro BIC, il résulte que seul 50% des loyers sont fiscalisés à l’impôt sur le revenu. La simplicité déclarative du régime micro BIC peut satisfaire les propriétaires non imposables et désirant limiter les contraintes de gestion administrative. Mais de manière générale, cet abattement paraît peu satisfaisant pour le propriétaire désireux de maitriser sa fiscalité.

Le régime réel simplifié

Sur option tout bailleur pourra opter pour le régime réel. Ce régime va permettre au propriétaire d’établir son bénéfice imposable dans des modalités similaires à une entreprise individuelle.

De manière commune, et comme pour de la location nue, les charges déductibles des loyers encaissés vont concerner toutes les charges liées à l’exploitation du bien (charges de copropriétés, intérêts d’emprunt, frais d’assurance, taxe foncière…). Les travaux d’entretien et de réparation qui permettent uniquement de conserver en l’état le bien, sans lui apporter de modification, sont aussi considérés comme une charge déductible.

 La conséquence majeure de l’imposition au titre des bénéfices industriels et commerciaux dans le régime réel, par rapport aux revenus fonciers, est l’impact des amortissements.

« Toute dépréciation des éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise constitue pour celle-ci une perte de substance. Cette perte doit être enregistrée par la comptabilité et, pour maintenir la valeur initiale des capitaux engagés dans l'entreprise, l'exploitant doit la compenser par un prélèvement sur les bénéfices de l'exploitation. Tel est le principe de l'amortissement. … Le terme d'amortissement industriel (ou amortissement commercial et industriel) désigne généralement la déduction opérée sur les produits d'exploitation, par les entreprises relevant de l'impôt sur le revenu (bénéfices industriels et commerciaux) ou de l'impôt sur les sociétés, en vue de constater et de compenser la dépréciation que subissent avec le temps certaines immobilisations sujettes à dépérissement. » BOFIP BOI-BIC-AMT-10-10-20120912.

A condition que votre bien soit inscrit au bilan de votre activité, l’amortissement se définit comme le mécanisme comptable qui permet de déduire de vos revenus la dévalorisation dans le temps de votre outil de production (le bien immobilier). Le montant de cet amortissement est encadré par les normes comptables, et un plan d’amortissement de l’immeuble sera établi au démarrage de l’activité sur les bases de sa valeur vénale. Chaque année, une charge comptable d’amortissement pourra être déduite des revenus de l’activité. Cette charge est uniquement comptable et n’a aucun impact sur la trésorerie.

Les travaux d’amélioration qui ne sont pas considérés comme des charges courantes seront immobilisés et entreront dans la base d’amortissement.

Enfin la dernière spécificité du régime réel des locations meublées réside dans le traitement des frais d’acquisition. Aussi, contrairement à la location nue imposable au revenu foncier, le loueur en meublé pourra déduire, l’année de son paiement ou réparti sur la durée d’amortissement, les frais d’acquisition, c’est-à-dire :

  • les frais d’acte notarié ;
  • les frais de garantie ;
  • la rémunération des intermédiaires (y compris la commission du vendeur)
  • les émoluments du notaire

Cette possibilité de déduire les frais d’acquisition est un atout majeur de la location meublée, et permettra de fortement réduire l’imposition des bénéfices réalisés. Au final, ce régime fiscal particulièrement attrayant permettra de percevoir des revenus non fiscalisés pendant une longue période.

Loueur Meublé Professionnel (LMP) ou loueur Meublé Non Professionnel (LMNP)

En sus de la distinction « micro BIC » ou régime réel, une autre distinction majeure devra être établie. Afin de bénéficier du régime des « bénéfices industriels et commerciaux Professionnels » (l’étude de ce régime sera détaillée ci-après) le propriétaire doit avoir la qualité de loueur meublé professionnel. Cette notion est définie par l’article 155 du Code Général des Impôts (CGI) et complété par une récente jurisprudence du conseil constitutionnel.

« L'activité de location directe ou indirecte de locaux d'habitation meublés ou destinés à être loués meublés est exercée à titre professionnel lorsque les conditions suivantes sont réunies : (…)

  • Les recettes annuelles retirées de cette activité par l'ensemble des membres du foyer fiscal excèdent 23 000 € ;
  • Ces recettes excèdent les revenus du foyer fiscal soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires au sens de l’article 79, des bénéfices industriels et commerciaux autres que ceux tirés de l'activité de location meublée, des bénéfices agricoles, des bénéfices non commerciaux et des revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62. »

Les loueurs en meublé qui ne respectent pas une de ces conditions sont donc considérés comme des loueurs en meublé non professionnels.

Sur le plan fiscal cette distinction aura principalement deux conséquences.

Le sort des déficits 

Les déficits d’une activité de loueur en meublé non professionnel s’imputent uniquement sur les revenus provenant d’une même activité au cours des dix années suivantes pendant lesquelles l’activité est exercée à titre non professionnel.

A contrario les déficits d’une activité de loueur en meublé professionnel sont imputables sur l’ensemble des autres revenus du contribuable (salaire, revenus fonciers, BNC…), et ce sans limitation de montant.

Le traitement des plus-values

Dans le cadre d’une activité de loueur meublé non professionnel, les plus-values réalisées lors de la cession de locaux d’habitation meublés sont soumises aux règles des plus-values immobilières des particuliers. La plus-value imposable sera soumise, après un abattement progressif dans le temps, à une imposition de 19% et aux prélèvements sociaux. Après 30 ans la plus-value est totalement exonérée.

L’activité de loueur meublé professionnel est soumise au régime des plus-values professionnelles. A l’occasion de la cession de l’immeuble les plus-values sont calculées par différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable (c’est-à-dire la valeur résiduelle inscrite au bilan après constatation des amortissements comptables).

Cette plus-value réelle est donc augmentée du montant des amortissements constatés durant l’exploitation de l’immeuble. La plus-value à court terme représentative du montant des amortissements constatés sera imposable en fonction de la tranche marginale du loueur en meublée alors que la plus-value à long terme constatant l’augmentation de valeur de l’immeuble sera taxée au taux de 16%.

Plus-value à court terme et plus-value à long terme supporteront en sus les prélèvements sociaux au taux de 17.20%.

Cependant en application de l’article 151 septies du CGI les plus-values de l’activité de location meublée professionnelle (LMP) seront exonérées dès lors que les recettes n’excèdent pas 90 000€ et que l’activité de location meublée professionnelle est exercée depuis plus de 5 ans

Cette exonération ne porte que sur la partie « impôts sur le revenu » des plus-values, les cotisation sociales ou prélèvement sociaux restent dus.

Pratique : les modalités pour déclarer son activité de loueur meublé

Tout préalable est de signer un bail d’habitation en meublé avec votre locataire, et de lui fournir les meubles nécessaires. Le logement doit être intégralement meublé afin que le locataire puisse y habiter en apportant seulement ses effets personnels. Ensuite, dans les 15 jours qui suivent le début de l’activité de location meublée, vous devez officialiser la création de cette nouvelle activité commerciale. Pour ce faire, vous devez remplir le formulaire P0i que vous devrez faire parvenir au centre des impôts des entreprises. Pour les autres logements exploités en meublé, vous devrez déposer un formulaire P2P4i.

Le formulaire P0i permettra à l’exploitant d’une location meublée de recevoir un numéro SIREN qui officialisera la création de l’activité de location meublée. C’est l’or de cette démarche que vous opterez pour le régime fiscal (micro ou réel) de votre choix. En cas de changement l’option pour le régime réel devra être faite au centre des impôts avant le 01 février de l’année de perception des revenus.

Fiscalité indirecte

En sus de la fiscalité sur les revenus, votre activité de loueur meublé peut générer d’autres charges fiscales, prélèvements sociaux, contribution foncière, impôt sur la fortune immobilière… Le choix de statut et de régime fiscal va avoir un impact sur ces « impôts indirects ».

Prélèvements sociaux ou cotisations sociales ?

En fonction de la situation personnelle de l’exploitant, du régime fiscal, de la nature de la location, du montant des revenus… le profit de l’activité meublé peut être soit soumis aux cotisations sociales à la Sécurité Sociale des Indépendants (SSI = ex RSI) ou aux prélèvements sociaux (17,2%). A la différence des prélèvements sociaux, les cotisations sociales sont génératrices de droits retraite et prestations sociales.

Pour connaître le régime social, il faut distinguer dans un premier temps le montant des recettes.

Si les recettes (loyers encaissés) sont inférieures à 23 000€, l’exploitant sera soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,2% sur le montant du bénéfice de l’activité meublé (régime micro ou régime réel).

Si les recettes (loyers encaissés) sont supérieures à 23 000€, l’exploitant peut alors être loueur en meublé professionnel ou non professionnel en fonction du respect ou non des autres critères qui autorisent la distinction entre location meublée professionnelle et non professionnelle.

  • S’il s’agit d’une activité de location saisonnière via un meublé de tourisme : l’exploitant est affilié au SSI.
  • S’il s’agit d’une activité de location meublée de logements destinés à devenir la résidence principale du locataire : l’exploitant est affilié au SSI s’il est loueur en meublé professionnel et simplement taxé aux prélèvements sociaux s’il est loueur en meublé non professionnel.

Le redevable des cotisations sociales peut choisir l’option pour le régime micro social applicable aux micro-entrepreneurs en-deçà de 33100 € de recettes annuelles. Les cotisations sociales seront alors de 22.7% calculées sur les recettes de location meublée (un régime spécifique existe pour les locations saisonnières classées).

Contribution foncière des entreprises 

L’activité de loueur en meublé, qu’elle soit professionnelle ou non professionnelle, est fiscalement considérée comme une activité commerciale. Le propriétaire devra par conséquent s’acquitter de la contribution foncière des entreprises (ex taxe professionnelle). La cotisation foncière des entreprises (CFE) est établie dans chaque commune où le contribuable dispose de locaux loués en meublés, en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés.

La taxe est donc due dans toute commune où un redevable utilise des installations entrant dans le champ d’application d’une taxe foncière, qu’elles constituent le siège social de l’entreprise ou le lieu d’exercice effectif de son activité

La CFE est due pour l’année entière par le redevable qui exerce l’activité le 1er janvier.

Dans la pratique, les loueurs en meublés, pour l’imposition de leur lieu d’exploitation principale, sont parfois assujettis à une base d’imposition minimale car l’imposition à la CFE qui ressort de cette formule de calcul est jugée comme trop faible.

L’impôt sur la fortune immobilière

L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) est dû par tous les contribuables dont le patrimoine immobilier taxable est supérieur à 1 300 000€. Par nature les biens professionnels sont exonérés. Les biens exploités sous un régime fiscal de la location meublée doivent être traités de manière spécifique.

Pour pouvoir être exonéré d’IFI sur son activité de location meublée, l’exploitant devra :

  • réaliser plus de 23000€ de recettes annuelles, on ne parle pas de bénéfice imposable, mais de recettes. Il s’agit donc du montant annuel des loyers perçus par l’exploitation de location meublée ;
  • retirer de cette activité plus de 50 % des autres revenus d’activité de l’exploitant (sans tenir compte des pensions retraites). Pour pouvoir être exonéré d’IFI, les revenus imposables (loyers – charges – amortissement) de l’activité de location meublée devront être supérieurs aux autres revenus du foyer fiscal, exclusion faites des pensions retraites. Mais attention tout de même aux exploitations non bénéficiaires qui ne pourraient donc pas bénéficier de l’exonération d’IFI ;
  • exercer l’activité de location meublée au titre d’une activité professionnelle principale.

Les critères de distinction entre location meublée professionnelle et location meublée non professionnelle ne sont pas les mêmes que les critères d’exonération d’IFI.

En effet, vous aurez noté qu’il s’agit dans un cas des recettes de l’activité de location meublée (pour obtenir le statut de loueur en meublé professionnel) et dans un autre cas des revenus imposables (pour obtenir l’exonération d’IFI).

TVA

Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés à usage d’habitation sont en principe exonérées de TVA. Les loyers perçus dans le cadre d’une location meublée sont exonérés de TVA mais le propriétaire ne pourra pas déduire la TVA qu’il a payée lors de son acquisition.

Cette exonération ne s’applique pas aux résidences de services proposant des prestations similaires à celles proposées par des hébergements hôteliers.

Focus réduction impôt Censi-Bouvard :

Un amendement voté dans le cadre du Projet de loi de finances pour 2019 proroge le « Censi-Bouvard » jusqu’au 31 décembre 2021. Pour rappel ce dispositif permet aux personnes physiques qui réalisent un investissement dans une résidence de services (étudiant, sénior Ehpad) de bénéficier d’une réduction d’impôt équivalente à 11% du prix d’investissement (plafonné à 300 000€) réparti sur 9 ans. Attention, le bénéficiaire de la réduction d’impôt ne pourra pas amortir son bien.

Pierre Brunet • Conseil en gestion de patrimoine CER France

Source : 25 millions de propriétaires • N°février 2019


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