Investir dans une foncière

Investir dans une foncièreUne « foncière » est une société commerciale de taille importante cotée en bourse, propriétaire d’actifs immobiliers variés qu’elle valorise au profit de ses actionnaires. Nous examinerons le périmètre des foncières, leur régime fiscal et enfin leur rendement.

Le mot foncier ou foncière est généralement mal cerné dans la langue française. L’adjectif foncièrement renvoie au « fond », et ainsi une personne foncièrement honnête est une personne qui l’est profondément, totalement. Le substantif foncier ou foncière renvoie lui dans l’ancien français au fonds au sens de la terre, c’est-à-dire par extension à la propriété immobilière. Le mot foncier est donc synonyme d’immobilier.

Ce que la pratique nomme une « foncière » est une société commerciale de taille importante, cotée en bourse, propriétaire d’actifs immobiliers variés qu’elle valorise au profit de ses actionnaires. Étant une société cotée en bourse, tout un chacun peut investir dans une foncière et en espérer un rendement.

Inspirées des Real Estate Investments Trusts (REIT) des pays anglo-saxons, les foncières sont appelées en France des S.I.I.C., acronyme de Société d’Investissement Immobilier Cotée.

Les foncières sont des sociétés anonymes (SA) dont certaines existent depuis la fin du 19ème siècle, mais elles ont été fiscalement réglementées par la loi de finances pour 2003 ; ainsi les SIIC font aujourd’hui l’objet d’un régime fiscal favorable et dérogatoire dit de «transparence» décrit par l’article 208 C du Code général des impôts.

Que sont les foncières et en quoi diffèrent-elles des autres sociétés d’investissement immobilier ?

Le principe des foncières est simple : ces sociétés acquièrent ou construisent des immeubles et les louent en vue de distribuer les revenus locatifs et les plus-values de cession à leurs actionnaires. Les immeubles acquis et gérés peuvent être de tous types : habitation, bureaux, entrepôts, commerces, hôtels, centres commerciaux, et être situés en France ou à l’étranger.

Les SIIC sont des mastodontes de l’immobilier dont le capital social ne saurait être inférieur à 15 millions d’euros (par exemple le capital de la Société Foncière Lyonnaise, SFL, est de 94 M€). On compte seulement un peu plus de 25 sociétés en France, la plus importante d’entre elles est aujourd’hui Unibail-Rodamco-Westfield avec quelques 3 800 employés dans 13 pays et plus de 60 milliards d’euros d’actifs immobiliers, principalement des centres commerciaux, parcs d’exposition.

La capitalisation boursière totale des foncières est de l’ordre de 70 milliards d’euros (avant la crise du Covid-19). La capitalisation boursière est la valeur des actions cotées multipliée par leur nombre total. C’est donc un indicateur de spéculation qui est différent de la valeur du patrimoine immobilier de ces sociétés, lequel peut être inférieur ou supérieur à la capitalisation boursière, d’autant que le capital d’une société n’est jamais entièrement placé sur le marché boursier.

La cotation en bourse signifie que les actions qui représentent le capital social des SIIC sont, au moins pour partie, échangées sur un marché boursier. La valeur des actions ne dépend donc pas directement de la valeur des actifs immobiliers de la société mais du jeu de l’offre et de la demande. Ainsi par exemple si le cours des foncières spécialisées dans les ensembles commerciaux a fortement chuté en 2020 en raison de la crise sanitaire, ce fort repli ne signifie pas que le marché immobilier s’est déprécié d’autant. A l’extrême, l’action d’une foncière pourrait perdre plus de la moitié de sa valeur d’un jour sur l’autre en raison d’effets d’annonces, alors même que son patrimoine immobilier est stable. Cette volatilité peut également fonctionner en sens inverse. C’est ce qui fait l’intérêt des marchés boursiers mais également leur risque.

Les foncières sont d’une certaine manière de la pierre-papier au sens où les actions émises représentent des actifs immobiliers, mais elles se distinguent des SCPI et OPCI sur plusieurs points. Bien évidemment les foncières se distinguent également des SCI classiques, mais elles peuvent en détenir le capital directement ou indirectement.

Revenons sur la distinction foncière / SCPI et OPCI.

Fondamentalement, les deux systèmes fonctionnent de manière identique : ces structures investissent dans l’immobilier pour le compte de leurs associés. Elles gèrent un portefeuille d’investissements immobiliers diversifié et parfois sectorisé (commerce, bureaux...) et permettent à leurs associés de bénéficier des rendements des immeubles possédés et gérés, tout en diluant les risques en raison de l’effet de compensation du portefeuille (si un actif est perdant, les autres compensent). Outre la taille des portefeuilles, nettement à l’avantage des foncières, la différence majeure entre les deux systèmes réside dans la cotation en bourse ; en effet les parts de SCPI/ OPCI ne sont pas cotées sur les marchés boursiers alors que les actions des foncières le sont. La conséquence est que les valeurs des foncières sont plus volatiles car dépendantes des fluctuations des marchés alors que la valeur des parts des SCPI est directement en relation avec les valeurs immobilières qu’elles représentent. Sur le plan du rendement, les SCPI comme les OPCI démontrent des performances sensiblement en dessous de celles des foncières, au moins hors période de crise. Enfin, conséquence directe de la cotation en bourse, les actions des foncières se négocient plus facilement que les parts de SCPI (meilleure liquidité).

Quel est le régime fiscal de l’investissement dans une foncière ?


D’un point de vue fiscal, la foncière ou SIIC est une société très particulière. Alors qu’une société classique paie l’impôt sur les sociétés sur la base de ses bénéfices réalisés et peut ensuite distribuer des dividendes à ses actionnaires (ou les réinvestir), une foncière est une société que l’on pourrait qualifier de transparente fiscalement, au sens où l’impôt n’est pas payé par la SIIC mais uniquement par les actionnaires ; de plus, la SIIC a l’obligation de distribuer une part importante de ses revenus et des plus-values réalisées :

  • la « transparence » signifie que la SIIC est exonérée d’impôt sur les sociétés et que seules les distributions sont imposées ; elle n’est exonérée que sur la part de ses revenus provenant des locations et plus-values im- mobilières ; les revenus acces- soires de la SIIC sont imposés à l’IS au taux normal ;
  • en contrepartie elle s’engage à distribuer à ses actionnaires au moins 95 % des revenus locatifs et au moins 70 % des gains provenant de la vente des actifs, c’est-à-dire les gains de plus-value ;
  • les revenus versés aux actionnaires par la SIIP (provenant des locations et des cessions d’immeubles) sont imposés au PFU à 30 % (12,8 % d’IR1 et 17,2% de prélèvements sociaux) ;
  • enfin, les plus-values de cession d’actions par l’investisseur sont soit imposées au PFU2 à 30 %, soit au barème progressif de l’impôt sur le revenu avec des abattements pour durée de détention (50% entre 2 et 8 ans, 65% à partir de 8 ans de détention).

Les SIIC bénéficient d’un régime de niche extrêmement favorable à la fois en raison de l’exonération d’IS et de l’application du PFU à l’ensemble des distributions. A titre de comparaison, les revenus versés par les SCPI sont imposés comme des revenus fonciers c’est-à-dire au barème de l’IR auquel il faut ajouter 17,2 % de prélèvements sociaux (CSG et RDS) ; ainsi, pour un contribuable imposé à l’IR à 30 %, la charge fiscale totale sera de 47,2%. Dans les SCPI, les plus-values de cession des parts sont traitées comme des plus-values immobilières avec une exonération de l’IR au bout de 22 ans et des prélèvements sociaux au bout de 30 ans. Le taux d’imposition est de 19 % + 17,2 % = 36,2 %.

Enfin, du point de vue de l’IFI3, lorsque l’actionnaire détient moins de 5 % de la foncière, ses actions ne sont pas prises en compte pour la base imposable.

Le rendement d’une foncière est-il performant en 2021 ?


Investir dans une foncière c’est investir en bourse. Même si la diversification des actifs est une des clés du rendement, les lois de la bourse échappent parfois à la rationalité et l’investissement représente un risque de perte en capital non négligeable. On rappellera au préalable qu’un investisseur particulier dans une foncière ne peut pas perdre plus que sa mise initiale ; il n’est ja- mais responsable sur ses deniers personnels. Actionnaire d’une société anonyme, il bénéficie du principe de responsabilité limitée.

En tant qu’actionnaire, il bénéficie également de droits au-delà des seuls dividendes qui lui sont versés et notamment du droit de prendre part aux assemblées générales de la société. Si en théorie l’investisseur particulier a son mot à dire sur les choix stratégiques de la foncière, son poids restera toujours infime au regard de la taille de l’entité et en pratique la gouvernance est entre les mains des investisseurs institutionnels.

Si le yo-yo des cotations n’effraie pas l’investisseur, le rendement des SIIC est excellent. Avant la crise du COVID-19, le rende- ment moyen approchait les 7 % avant PFU (et 12 % pour certaines d’entre elles). Ce rendement est calculé par le rapport entre le cours de bourse de la foncière et le dividende versé. A noter enfin que l’investissement en SIIC ne suppose pas de frais d’entrée importants puisqu’il suffit d’ouvrir un compte titre auprès de son établissement bancaire.

Qu’en est-il du rendement des foncières aujourd’hui ? 

Sans surprise, ces valeurs ont été fortement impactées par la crise sanitaire et la crise économique qui lui est liée. Les premières SIIC touchées sont les foncières dites commerciales c’est-à-dire celles dont l’actif est constitué de boutiques en centres commerciaux (moins 45 % en moyenne depuis le début de la pandémie en mars 2020). Non seulement la crise sanitaire a porté un coup d’arrêt au commerce de détail en raison des confinements, mais le développement irréversible du commerce en ligne va peser lourd sur ce secteur dans les années à venir... Du côté des bureaux, la situation n’est guère meilleure en raison de l’avènement du télétravail ; beaucoup d’entreprises, notamment dans le domaine des services, ont réalisé que leurs salariés pouvaient être aussi performants en restant chez eux et en économisant le temps du transport. Le marché des bureaux va lui aussi se modifier sur le long terme.

1- Impôt sur le revenu

2- Prélèvement forfaitaire unique
3- Impôt sur la fortune immobilière

Laurent Grosclaude • Maître de conférences à l’UT1 Toulouse Capitole

Source : 25 millions de propriétaires • N°550 avril 2021


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