Depuis la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016, et l’entrée en vigueur de la loi Évolution du logement de l’aménagement et du numérique (ELAN) du 23 novembre 2018, plusieurs villes sont tenues d’établir une procédure d’enregistrement pour tous les meublés de tourisme. Les hôtes, dont les logements entiers sont concernés, doivent donc obtenir un numéro d’enregistrement pour pouvoir continuer à accueillir des voyageurs depuis Airbnb, sur des courtes périodes. Le but, selon les autorités, étant de responsabiliser le tourisme de courte durée, et de lutter contre la prolifération d’annonces illégales sur la plateforme.
L’obtention de ce numéro d’enregistrement est en effet nécessaire pour collecter la taxe de séjour. À Nice, cette taxe a par exemple rapporté 1.4 million d’euros pour la saison 2021. Cette obligation, à laquelle se soumet désormais Airbnb, s’adresse ainsi aux personnes qui louent leur résidence secondaire au cours de l’année, ou bien leur logement principal plus de 120 jours par an. Les propriétaires, pour obtenir leur numéro d’authentification, doivent soumettre une déclaration de changement d’usage de leur bien auprès de leur mairie, qui validera ou non leur requête. Si elle répond positivement, le précieux code à treize chiffres sera remis aux propriétaires, qu’ils pourront publier ensuite sur la plateforme pour s’authentifier. Dans le cas contraire, ils ne seront pas autorisés à publier une annonce sur Airbnb, sous peine de recevoir une amende de 5 000 euros. La plateforme sera également en droit de supprimer l’annonce si elle ne répond pas aux nouvelles règles. Sans oublier que, pour les appartements, le règlement de copropriété doit lui aussi autoriser la location en Airbnb. Si ce n’est pas le cas, l’amende peut cette fois grimper à 50 000 euros.
L’autorisation de délivrer un numéro d’enregistrement n’est pas automatique en effet, et le choix des villes n’est pas effectué par Airbnb. La plateforme met simplement en application les demandes des villes et communes qui souhaitent mettre en œuvre ce changement d’usage des logements concernés. Cette procédure doit d’ailleurs avoir été votée en conseil municipal au préalable. Les élus de ces villes cherchent, pour la plupart, à résoudre les phénomènes de tension immobilière auxquels ils sont amenés à faire face. En zones touristiques, comme sur les communes de la Côte d’Azur, les propriétaires préfèrent généralement louer leur logement sur une courte durée, plutôt qu’à l’année, ce qui représente une solution moins risquée et moins contraignante. Mais cela contribue à réduire le nombre de locations disponibles pour les actifs qui ne peuvent pas, ou ne souhaitent pas, devenir propriétaires. Les élus craignent donc pour l’attractivité de leur territoire, et les difficultés à recruter dans les bassins d’emplois où il devient difficile de se loger. Qui plus est en période où le niveau des loyers va de pair avec l’inflation, et où les conditions d’obtention de prêt se durcissent pour acheter. Ainsi, lorsqu’un secteur affiche déjà un grand nombre de locations saisonnières sur son territoire, les demandes de numéro d’enregistrement risquent moins facilement d’aboutir positivement auprès des mairies, qui n’hésitent pas à opérer des contrôles en cas de fraude.
L’obligation d’enregistrement ne concerne que les meublés de tourisme, qui sont des logements entiers destinés à la location de courte durée. Celle-ci ne s’applique donc pas aux autres types d’hébergement comme les hôtels ou les chambres d’hôtes, les chambres chez l’habitant et les hébergements atypiques. Mais, en ce qui concerne les autres cas, des moyens sont déployés pour débusquer les récalcitrants à cette nouvelle règle appliquée par Airbnb. La plateforme met ainsi un outil, à disposition des municipalités, qui permet de contrôler les annonces dans leur territoire, pour vérifier que la réglementation locale est respectée, si celle-ci existe. C’est notamment le cas à Nice, qui a été choisie comme ville-pilote pour expérimenter un logiciel capable d’analyser les annonces publiées sur le marché. Une première version avait été testée en 2021 et avait permis d’identifier près de 2 000 annonces illégales, à partir de 1 113 contrôles. Il n’y en avait eu que 44 en 2020, sans logiciel. Depuis cette initiative, six agents de la mairie ont été assermentés par le procureur de la République pour assurer en continu ces contrôles anti-fraude. L’heure n’est décidément plus à la légèreté.
Par Louis Janmot, journaliste