Dans un projet de vente, sauf si l’opération bénéficie d’un régime d’exonération – notamment la vente de la résidence principale – l’impôt sur la plus-value est un élément à ne pas négliger par le propriétaire. Le présent article vise à expliquer comment se calcule l’impôt sur la plus-value en cas de vente par un particulier résident fiscalement en France (personne physique ou société non soumise à l’impôt sur les sociétés), dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé. L’objectif de cet article est de donner à un propriétaire les clés lui permettant de calculer les impôts qu’il aurait à régler en cas de vente d’un appartement ou d’une maison lui appartenant.
Il sera successivement présenté l’impôt sur la plus-value des biens bâtis, la taxe complémentaire sur les plus-values élevées puis les modalités pratiques de déclaration et de paiement des impôts. Les terrains à bâtir ne suivent que partiellement ce régime et sont soumis à d’autres taxes qui ne seront pas abordées.
Afin d’illustrer les modalités de calcul de l’impôt, il sera suivi le cas de Monsieur JACQUES.
Ce dernier a acquis le 1er juin 2010 un appartement situé à Toulouse moyennant le prix de 110.000 €, en ce compris 5.000 € de meubles. Il a en outre réglé une commission d’agence de 5.000 € et les frais d’acte d’acquisition d’environ 8.300 €.
Entre deux locataires, Monsieur JACQUES a effectué des travaux de rénovation pour 20.000 €, qu’il a déduit de ses revenus fonciers.
L’appartement a été loué, et suite au départ du dernier locataire Monsieur JACQUES envisage aujourd’hui (avril 2020) de le vendre moyennant le prix de 210.000 €, en ce compris 5.000 € de meubles et 10.000 € de commission d’agence.
La particularité de cet impôt est sa dégressivité dans le temps. Afin de calculer l’impôt à régler, il convient dans un premier temps de calculer la plus-value brute (A), puis d’appliquer des abattements pour durée de détention afin d’obtenir la plus-value nette imposable (B).
La plus-value brute est la différence entre le prix de vente (1) et le prix d’acquisition (2). Quelques ajustements sont cependant pris en compte pour tenir compte des frais et travaux.
Le prix de vente est celui fixé dans l’acte de vente. Sauf à justifier de l’existence et de la valeur vénale des meubles, notamment par la production d’un inventaire d’un commissaire-priseur, le mobilier n’est pas déduit du prix global. En pratique, compte tenu de la faible économie d’impôt dont il est question et des frais d’intervention d’un commissaire-priseur, la valeur des meubles n’est pas déduite du prix global.
Dans notre cas, il ne sera pas déduit du prix de vente la valeur des meubles.
Ce prix de vente doit ensuite être majoré de certaines charges et indemnités. Il s’agit de tout avantage pour le vendeur que l’acquéreur lui confère, sans qu’ils soient compris dans le prix. Par exemple le remboursement par l’acquéreur d’un prêt consenti au vendeur.
Dans notre cas, aucun avantage n’est conféré au vendeur au sus du prix.
Le prix est corrélativement diminué, sur justificatifs et de manière exhaustive, des frais suivants :
Dans notre cas, il est proposé à Monsieur JACQUES de vendre son appartement moyennant le prix de 210.000 €, en ce compris 5.000 € de meubles et 10.000 € de frais d’agence :
Prix de vente ajusté : 200.000 €.
Le prix d’acquisition est celui fixé dans l’acte d’acquisition. Si le bien a été reçu par donation ou succession, la valeur à prendre en compte est celle déclarée pour le calcul des droits de donation (dans l’acte de donation) ou de succession (dans la déclaration de succession).
Les meubles éventuellement visés dans l’acte d’acquisition sont déduits du prix. En effet, au jour de l’acquisition les droits d’enregistrement ont été perçus sur la valeur de l’immeuble, déduction faite des meubles. S’agissant de la valeur d’acquisition, l’administration fiscale prend pour base la même assiette.
Dans notre cas, Monsieur JACQUES a acquis l’appartement moyennant le prix de 110.000 €, en ce compris 5.000 € de meubles.
Du prix d’acquisition est déduite la valeur des meubles, soit 105.000 €.
On remarque ici que le prix des meubles entrera dans le prix de vente pour le calcul de la plus-value, mais sera déduit pour la valeur d’acquisition.
Le prix peut ensuite être majoré des frais d’acquisition - qu’ils soient à titre onéreux (1) ou à titre gratuit (2) - et des dépenses pour travaux (3). Ces retraitements permettent d’établir le montant de la plus-value brute (4).
Le prix d'acquisition est majoré d'un certain nombre de frais et de dépenses diverses limitativement énumérés par décret. Ils sont retenus soit pour leur montant réel soit forfaitairement à 7,5 % du prix d’acquisition.
Les frais pouvant être pris en compte sont exclusivement les suivants :
Ces frais ne peuvent s'ajouter au prix d'acquisition que s'ils ont effectivement été supportés par le contribuable lors de l’acquisition et s'ils sont justifiés (notes d'honoraires, factures, etc.).
Dans notre cas, Monsieur JACQUES a acquis l’appartement moyennant le prix de 105.000 € (hors meubles). Il a également réglé une commission d’agence de 5.000 € et les frais d’acte d’acquisition d’environ 8.300 €.
En appliquant les frais pour leur montant réel :
Prix d’acquisition majoré : 118.300 €.
En appliquant le forfait de 7,5% :
Prix d’acquisition majoré : 112.875 €.
Dans le cas de Monsieur JACQUES, il est plus intéressant d’opter pour les frais réels que pour le forfait. D’une manière générale, lorsqu’une commission d’agence a été réglée lors de l’acquisition en sus du prix, il sera plus intéressant d’opter pour les frais réels.
Les frais afférents à l'acquisition par donation ou succession qui viennent en majoration du prix d'acquisition doivent avoir été effectivement supportés par le propriétaire sur justification, et s'entendent exclusivement :
Dans notre cas, si Monsieur JACQUES détenait son appartement pour lui avoir été donné par ses parents qui ont réglé les frais de donation, aucune majoration du prix au titre des frais ne pourrait être appliquée.
Les dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement, ou d'amélioration viennent en majoration du prix d'acquisition :
Les dépenses d'amélioration apportent un équipement ou un élément de confort nouveau ou mieux adapté aux conditions modernes de vie, sans modifier cependant la structure de l’immeuble (par exemple l'installation d'un ascenseur, d'une climatisation ou la réalisation de travaux d'isolation).
Les travaux doivent avoir été réalisés par une entreprise. Dès lors sont notamment exclus :
Ne sont pas pris en compte :
Dans notre cas
Monsieur JACQUES a rénové l’appartement pour environ 20.000 €. Cependant, ces travaux ayant d’ores et déjà été déduits de ses revenus fonciers, ils ne peuvent pas être déduits une seconde fois au titre de l’impôt sur la plus-value.
Il convient donc pour Monsieur JACQUES d’appliquer le forfait :
Les retraitements fiscaux ci-dessus permettent de calculer la plus-value brute :
Soit une plus-value brute de 65.950 €.
La plus-value nette imposable est déterminée en appliquant un abattement pour durée de détention.
La date de cession qui constitue le terme du délai de détention ne pose pas de difficulté. Il s’agit de la date de l’acte authentique de vente.
La date d’acquisition est davantage subtile à déterminer. Sont ci-dessous précisés les cas les plus fréquents :
Acquisition | Date de l’acte |
Acquisition par fractions successives | Date de chacun des actes |
Acquisition de la nue-propriété (à titre onéreux ou par donation) et décès de l’usufruitier | Date de l’acte d’acquisition ou de donation de la nue-propriété |
Succession | Date du décès |
Nue-propriété par succession et décès de l’usufruitier | Date du décès du premier |
Donation | Date de l’acte |
Acquisition par un couple et partage suite à un divorce ou une séparation de partenaires de pacs | Date de l’acquisition |
Acquisition par un couple de concubins moitié chacun et partage | Moitié : date de l’acte d’acquisition, Moitié : date de l’acte de partage. |
Partage de succession | Date du décès ayant ouvert l’indivision |
L’impôt sur la plus-value est composé d’une part de l’impôt sur le revenu (19%) et d’autre part de prélèvements sociaux (17,2%). Ces deux parties ne subissent pas les mêmes abattements.
Pour la détermination du montant imposable à l'impôt sur le revenu, l'abattement pour durée de détention est de :
Exonération après 22ans.
Dans notre cas :
*Attention : Le taux appliqué au titre de l’impôt sur le revenu est fixé forfaitairement à 19%, et ne correspond aucunement au taux marginal d’imposition du contribuable. Il s’agit d’un même taux quel que soit la situation du contribuable vis-à-vis de l’impôt sur le revenu.
Pour la détermination du montant imposable aux prélèvements sociaux, l'abattement pour durée de détention est de :
Exonération après 30ans.
Dans notre cas :
Ces deux taxes sont additionnées pour obtenir l’impôt global sur la plus-value.
Dans notre cas, l’impôt global s’élève à 20.118 €.
A l’impôt sur la plus-value s’ajoute une taxe assise sur les plus-values nettes immobilières d’un montant supérieur à 50 000 €. La plus-value nette à prendre en compte est celle calculée pour la quote-part de l’impôt sur le revenu dans la plus-value.
Dans notre cas, la plus-value nette imposable est de 50.122 €.
Les taux du tableau suivant (issu du Bulletin Officiel des Finances Publiques) sont applicables dès le premier euro :
Montant de la plus-value imposable | Montant de la taxe |
De 50 001 à 60 000 € | 2 % PV - (60 000 - PV) x 1/20 |
De 60 001 à 100 000 € | 2 % PV |
De 100 001 à 110 000 € | 3 % PV - (110 000 - PV) x 1/10 |
De 110 001 à 150 000 € | 3 % PV |
De 150 001 à 160 000 € | 4 % PV - (160 000 - PV) x 15/100 |
De 160 001 à 200 000 € | 4 % PV |
De 200 001 à 210 000 € | 5 % PV - (210 000 - PV) x 20/100 |
De 210 001 à 250 000 € | 5 % PV |
De 250 001 à 260 000 € | 6 % PV - (260 000 - PV) x 25/100 |
Supérieur à 260 000 € | 6 % PV |
Dans notre cas, la plus-value nette imposable est de 50.122 €.
La plus-value imposable étant supérieure à 50 000 €, la taxe sur les plus-values immobilières élevées s'applique. Le montant de la plus-value étant compris entre 50 001 € et 60 000 €, la taxe correspondante est calculée comme suit :
(2 % x 50.122) - [(60.000 – 50.122) x 1/20], soit 1.002 - 464 = 508 €.
La totalité des impôts sur la plus-value s’élève donc pour Monsieur JACQUES à 20.626 €.
Conseil pratique : Etre attentif à la date anniversaire de l’acquisition
Les années de détention se comptent d’année en année à la date anniversaire de l’acte d’acquisition.
La durée de détention a une incidence sur :
Dans notre cas, si Monsieur JACQUES attend le 2 juin 2020 pour vendre son appartement :
Les impôts sur la plus-value sont calculés, prélevés sur le prix de vente, et versés à l’administration fiscale par le notaire. Ce dernier rempli la déclaration de plus-value sur l’imprimé fiscal 2048 IMM (Cerfa n°12359) et la dépose auprès du service de la publicité foncière lors du paiement de l’impôt.
Aucune démarche n’est à effectuer par le contribuable. Il lui appartient uniquement de reporter le montant de la plus-value sur sa déclaration d’ensemble des revenus.
Tous justificatifs, notamment pour la déduction de frais et travaux, doivent être fournis par le contribuable sur demande de l'administration.
Avant d’envisagez une vente, il est prudent d’interroger son notaire sur le montant des impôts qui seront prélevés sur le prix de vente. Reporter une vente de quelques mois peut suffire à faire une économie substantielle.
Le notaire est le professionnel de référence en matière de calculs fiscaux des ventes immobilières.
Henri Chesnelong • Notaire à Toulouse
Source : 25 millions de propriétaires • N°avril 2019
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