Recherche d'un locataire, garanties... : habitudes des propriétaires

L’Agence nationale pour l’information sur le logement a publié en juin 2019 une enquête sur les « pratiques et appétences » des propriétaires au moment de louer leur bien et de se prémunir contre le risque d’impayés (1).
Cette enquête a été réalisée à partir de questionnaires proposés de juin à septembre 2018 à plus de 2.400 propriétaires bailleurs venus consulter une ADIL (2).
Même si le public sondé peut ne pas refléter l’ensemble des propriétaires (l’enquête est sous-titrée « pratiques et appétences des bailleurs ayant consulté une ADIL »), ses résultats renseignent utilement sur les habitudes des propriétaires en terme de recherche et sélection des locataires (A) comme de recours à une garantie (B).
Enfin, ils soulignent l’impopularité d’un dispositif de sécurisation globale qui priverait les propriétaires de la faculté de choisir leur locataire ou le montant du loyer (C).

A) Recherche et sélection des locataires

Selon l’enquête de l’ANIL, la moitié des propriétaires recherchent un locataire en postant une annonce sur internet (chiffre en augmentation).
42 % des propriétaires font plutôt jouer leurs relations et le bouche à oreille, ce chiffre atteignant presque 50 % en zone tendue.
Seuls 13 % des propriétaires ayant consulté une ADIL font appel à une agence pour trouver un locataire.

La solvabilité du candidat locataire est évidemment un critère de choix pour quasiment tous les propriétaires. Ce n’est cependant pas un critère impératif pour 50 % des propriétaires interrogés. Lorsque le locataire n’a pas de revenus fixes, le propriétaire se contente le plus souvent de la fourniture d’une caution (une caution est par exemple demandée dans 66 % des locations à un étudiant).

Si les agences immobilières sont plutôt intraitables sur les critères de solvabilité, les propriétaires louant sans intermédiaire accordent de l’importance à des critères plus subjectifs.
50 % des propriétaires font ainsi de la « bonne impression » produite par le candidat locataire un critère impératif. Le contrat de location est assurément un contrat intuitu personae, c’est-à-dire un contrat conclu en considération de la personne.

Plus généralement, l’ANIL note que les exigences des propriétaires sont plus fortes s’agissant d’un propriétaire d’un seul bien locatif que concernant un propriétaire de plusieurs biens, ce dernier pouvant, entre autres, « diluer » le risque d’impayés.

B) Recours à une garantie contre le risque d’impayés

L’enquête révèle que deux tiers des propriétaires couvrent le risque d’impayés via un instrument dédié.
47 % des propriétaires ont recours à un engagement de caution (chiffre stable).

Ce succès s’explique avant tout par la simplicité de sa mise en place. La caution personnelle est également conçue comme un instrument de responsabilisation via le « contrôle social ». Selon les mots d’un couple de propriétaires retraités cités par l’enquête, « cela oblige le locataire à se dire attention, j’ai mes parents derrière moi ». Les propriétaires apprécient également de pouvoir compter sur la « solidarité familiale » en cas de coup dur. Précisons que « cette solidarité  familiale  semble  souvent  entendue  par  les  bailleurs  comme  une solidarité  intergénérationnelle,  entre  parents  cautions  et  enfants  locataires.  En  effet,  72%  des  bailleurs  dont  le locataire est étudiant demandent une caution d’une personne physique, tandis que 24% des bailleurs logeant des ménages  retraités  ont  recours  à  ce  mécanisme ».

Loin derrière, une assurance « loyers impayés » est souscrite par 14 % des propriétaires interrogés. Le plus souvent, elle est souscrite sur proposition d’une agence immobilière (42 % des bailleurs pratiquant la gestion déléguée souscrivent une GLI).

Lors de l’enquête réalisée à l’été 2018, seuls 3 % des propriétaires avaient recours à la garantie VISALE. Si sa mise en place est facilitée, l’ANIL souligne la garantie VISALE est encore peu connue, tandis que la force des habitudes maintient le recours aux cautions à un niveau élevé.

Un tiers des propriétaires interrogés ont déclaré louer un logement sans y associer une garantie (ce chiffre atteint 40 % chez les propriétaires louant en direct et tombe à 15 % en cas de gestion déléguée). Le plus souvent, les propriétaires sondés motivent cette absence de garantie soit par le fait que le « bon dossier » de leur locataire rend – de leur point de vue – superflue une garantie, soit par le surplus de complexité que la mise en place d’une garantie implique, soit par l’impossibilité de souscrire par exemple une garantie « loyers impayés » (faute pour le locataire de rentrer dans les critères d’éligibilité requis).
Plus largement, des propriétaires rechignent, face à certains publics (les locataires âgés en particulier) à exiger une garantie ou craignent que la formalisation du risque d’impayés soit « perçue comme faussant la relation de confiance établie avec le locataire ».
Néanmoins, les exigences de garantie restent toujours élevées en zone « tendue » (seuls 11 % des bailleurs y louent leur bien sans garantie).

C) Contre un dispositif de sécurisation au prix du libre choix du locataire et du loyer

L’ANIL a saisi l’occasion de son enquête pour sonder l’intérêt des propriétaires pour ce qu’elle appelle un « dispositif global de sécurisation ». Les propriétaires sont-ils prêts à bénéficier d’une garantie contre les impayés et les dégradations en échange du plafonnement du loyer et/ou de la sélection du locataire par un tiers, notamment Action Logement ?  
Les résultats de l’enquête sont sans appel. Seul un bailleur sur dix est prêt à abandonner à la fois le choix de son locataire et le choix d’un loyer libre.
Au-delà du désavantage financier d’un tel dispositif global, les propriétaires semblent résolument attachés au caractère intuitu personae du contrat de location. Comme évoqué ci-dessus, l’immense majorité des propriétaires fondent leurs locations sur une relation de confiance.

Frédéric Zumbiehl • Juriste UNPI


(1) « Sécuriser sa mise en location face au risque d’impayés (pratiques et appétences des bailleurs ayant consulté une ADIL) », Aline Abauzit, Maxime Chodorge, Clément Pavard, ANIL, juin 2019
(2) Agence départementale d'information sur le logement