ANALYSE — Il n’aura échappé à personne que l’État français a fait de la rénovation énergétique du parc immobilier un objectif majeur. Quitte à imposer une pression notable sur les propriétaires de biens immobiliers anciens. Il deviendra en effet impossible de louer un bien immobilier classé G à compter de 2025, les logements classés F en 2028 et les logements classés E en 2035.
L'objectif est louable puisque la disparition des fameuses « passoires thermiques » permettra de répondre aux enjeux environnementaux actuels tout en impactant très favorablement le pouvoir d’achat des occupants. Il n’en reste pas moins que cette marche forcée vers le logement responsable soulève d’épineux problèmes en raison de la pénurie d’artisans dans le secteur de la rénovation, du prix des matériaux ou encore des taux d’emprunt ayant significativement augmenté. Fort heureusement, l’État français a prévu la mise en place d’un ensemble d’aides permettant d’alléger l’impact financier de ces opérations de rénovation. Nous nous attacherons ici à en faire un état des lieux et à en clarifier les lignes directrices.
Les aides financières
MaPrimeRénov’ : Le dispositif MaPrimeRénov’ est la principale aide financière à la réalisation de travaux en vue de l’amélioration de la performance énergétique d’un logement.
Qui peut y prétendre
Cette prime s’adresse aux propriétaires, occupants ou bailleurs. Seules sont visées les personnes physiques. Les biens immobiliers détenus par une société ne peuvent donc pas en bénéficier. À cette règle, il existe une exception notable : les associés personnes physiques d’une SCI soumise à l’IR peuvent en bénéficier lorsqu’ils occupent le bien à titre de résidence principale.
Quels sont les logements concernés ?
Il s’agit des logements occupés à titre de résidence principale, c'est-à-dire les logements effectivement occupés au moins 8 mois par an. Les résidences secondaires sont donc exclues. Par ailleurs, le logement doit avoir été construit depuis au moins 15 ans. La seule exception concerne les travaux de remplacement des chaudières au fioul pour lesquels ce délai minimum est réduit à 2 années.
Quels sont les travaux éligibles
Les travaux de rénovation énergétique éligibles à MaPrimeRénov’ sont notamment les travaux d’isolation thermiques, de remplacement d’appareils de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire, d’installation d’une VMC Double-flux ou encore la réalisation d’un audit énergétique. La liste exhaustive des travaux éligibles est détaillée par le décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique. Ces travaux doivent par ailleurs répondre à un certain nombre de critères techniques et doivent être réalisés par une entreprise du bâtiment qualifiée RGE, c’est-à dire reconnue garante de l’environnement.
Pour quels montants ?
La prime dont le montant est forfaitaire variera en fonction du type de travaux réalisés, des revenus du propriétaire, de la localisation du logement et du gain énergétique visé. S’agissant des conditions de ressources, les bénéficiaires sont classés en plusieurs catégories, chacune bénéficiant d’un niveau d’aide différent. Il sera tenu compte du dernier revenu fiscal de référence du bénéficiaire afin de déterminer la catégorie à laquelle il appartient. Les plafonds d’aide sont déterminés par type de travaux réalisés. Mais plusieurs primes peuvent être accordées dès lors que le propriétaire réalise différentes catégories de travaux dans un même logement. Le montant maximal annuel de la prime s’étale de 5 000 € pour les foyers les plus aisés à 11 000 € pour les plus modestes. En toute hypothèse, le plafond global d’aide par logement est fixé à 20 000 € pour des travaux réalisés sur une période de 5 ans maximum. Ce plafond par logement est également applicable aux propriétaires bailleurs, dans la limite de trois logements.
Conditions d’octroi
La prime est versée sur justification d’achèvement des travaux et de leur montant. Ils doivent être réalisés dans les deux ans à compter de l’avis d’attribution de la prime. S’agissant des propriétaires bailleurs, ils doivent par ailleurs s’engager à louer le logement en tant que résidence principale pour une durée minimale de 5 ans. Ils doivent également informer les locataires de la réalisation des travaux.
MaPrimeRénov’ Sérénité
Des aides plus importantes sont attribuées aux ménages modestes et très modestes pour la rénovation énergétique globale de leur logement permettant un gain énergétique minimum de 35 %. La prime finance alors jusqu’à 65 % du coût des travaux, en fonction des conditions de ressources, élevant le plafond annuel de prime à 22 750 € maximum.
Cumul avec les autres aides disponibles
MaPrimeRenov’ est cumulable avec les aides de l’Anah, les aides des collectivités territoriales, les primes énergie générées par les certificats d’économies d’énergie, l’éco-prêt à taux zéro.
Les primes Coup de pouce économies d’énergie
Le dispositif « coup de pouce économies d’énergie » regroupe un certain nombre d’aides financières destinées à financer certains travaux de rénovation énergétique. Leur montant dépend du niveau de ressources des ménages.
Pour quels bénéficiaires ?
Ils sont attribués aux propriétaires occupants ou bailleurs par les fournisseurs d’énergie dans le cadre du dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE). Ils concernent les logements existants de plus de deux ans, résidence principale ou secondaire. Ces logements peuvent être détenus par une SCI soumise à l’IR.
Pour quels travaux ?
Des primes peuvent être versées pour plusieurs catégories de travaux : chauffage, isolation, thermostat avec régulation performante ou encore rénovation globale.
La prime rénovation globale
La prime rénovation globale des maisons individuelles peut s’avérer particulièrement intéressante. La rénovation globale consiste à mettre en œuvre un ensemble de travaux considérés comprenant la rénovation des équipements de chauffage, de distribution d’eau sanitaire et d’isolation. Ces travaux de rénovation globale doivent respecter les exigences suivantes :
1° Les travaux portent au moins sur une des catégories de travaux d’isolation telles que définies par la réglementation existante et répondant à un cahier des charges précis ;
2° Les travaux permettent d’atteindre une baisse de consommation annuelle énergétique d’au moins 55 % ;
3° Les travaux ne doivent pas conduire à l’installation d’équipements consommant du charbon, du fioul ou du gaz ou entrainant une hausse des émissions de gaz à effet de serre. La prime est alors calculée sur la base de la consommation annuelle d’énergie finale économisée de la maison rénovée exprimée en euros par MWh. Son montant peut atteindre 350 € / MWh. L’octroi de ces aides est conditionné à la réalisation d’un audit énergétique et à la réalisation des travaux par un professionnel certifié RGE.
Cumul avec les autres aides disponibles
Les primes coup de pouce sont cumulables avec les aides de l’Anah, les aides des collectivités territoriales, l’éco-prêt à taux zéro, le dispositif MaPrimeRenov’.
Travaux réalisés dans le cadre du dispositif Loc’Avantages
Les propriétaires bailleurs peuvent obtenir une aide financière de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) pour la réalisation de travaux de rénovation énergétique de leur bien immobilier. Mais ces mêmes aides sont également disponibles pour la réalisation de travaux lourds de réhabilitation d’un logement indigne ou très dégradé. Ce dispositif est ouvert aux propriétaires détenant le bien directement ou au travers d’une SCI soumise à l’IR. Ce dispositif répond au double objectif de proposer des logements à des prix abordables pour les locataires aux revenus modestes et de lutter contre la précarité énergétique de ces mêmes populations par la diminution de leurs factures énergétiques. Son application est donc conditionnée à la location du bien à des locataires ayant des revenus inférieurs à certains plafonds et en tant que résidence principale. Les travaux réalisés doivent permettre un gain énergétique d’au moins 35 % et d’atteindre au minimum une étiquette D. Il s’agira de réaliser un ensemble de travaux incluant l’isolation et le remplacement des systèmes de chauffage ou de production d’eau chaude. L’aide proposée pourra alors atteindre 25 % du montant total des travaux HT dans la limite de 15 000 € par logement. Pour bénéficier de ce dispositif, le propriétaire devra signer une convention avec l’Anah dans le cadre de Loc’Avantages précisant ses engagements, notamment en termes de plafonnement du loyer et de durée de location du bien (6 ans minimum). De façon complémentaire, le propriétaire pourra bénéficier d’une réduction d’impôt sur ses revenus fonciers bruts pouvant aller jusqu’à 65 %. Ce dispositif est cumulable avec les aides des collectivités territoriales, les primes énergie générées par les certificats d’économies d’énergie, l’éco-prêt à taux zéro, le dispositif MaPrimeRenov’.
Les aides locales à la rénovation énergétiques et Mon Accompagnateur Rénov’
Il existe par ailleurs de nombreuses aides accordées par les collectivités locales pour l’amélioration des performances énergétiques des logements. Il est impossible de les lister ici de façon exhaustive, mais elles sont recensées sur le site de l’Agence Nationale pour l’Information sur le Logement (l’ANIL) (2). Afin de gérer au mieux le financement des travaux de rénovation énergétique, il est intéressant de solliciter le plus rapidement possible Mon Accompagnateur Rénov’, c’est-à-dire l’interlocuteur tiers de confiance chargé d’assister les particuliers dans leur projet de travaux de rénovation. Il assure un accompagnement des particuliers dans tout leur parcours de travaux en proposant un appui technique, administratif, financier et social. Il est d’ailleurs obligatoire d’y avoir recours depuis janvier 2023 pour pouvoir prétendre aux principaux dispositifs d’aide mis en place par l’état.
Les changements attendus en 2024
À partir de 2024, les dispositifs d’aides à la rénovation énergétique seront intégralement refondus en deux piliers principaux :
> Un pilier performance qui reprendra l’essentiel du dispositif MaPrimeRenov’, mais recentré sur les rénovations globales. Ce dispositif vise à accélérer la sortie de certains logements de leur catégorie de passoire thermique. L’attribution des primes sera donc conditionnée au gain d’au moins deux classes de DPE.
>Le second pilier — efficacité — a pour objectif de soutenir les rénovations par petits bouquets de travaux ayant pour finalité la rénovation de l’isolation et l’installation d’équipement de chauffage décarboné.
L’objectif est d’évoluer vers un reste à charge minimal pour les propriétaires avec un taux de prise en charge pouvant aller jusqu’à 90 % pour les ménages les plus modestes. L’ensemble de ces mesures sera porté par le renforcement du rôle de l’Accompagnateur Rénov’ dont l’accompagnement deviendra obligatoire pour l’ensemble des dossiers d’aide.
Les aides fiscales
L’imputation du déficit foncier sur le revenu global
En principe, une part importante des charges liées à un projet de rénovation énergétique devrait pouvoir être considérée comme déductible fiscalement. Or, lorsque l’immeuble est loué nu, son exploitation est susceptible de générer un déficit déductible du revenu global dans la limite d’un plafond annuel dont le montant est fixé à 10 700 € pour la généralité des immeubles. Ce régime est applicable aux biens détenus directement ou par le biais d’une SCI soumise à l’IR. Ce plafond de déficit foncier imputable sur le revenu global est relevé de 10 700 à 21 400 € maximum, à titre temporaire et sous certaines conditions, pour les immeubles loués faisant l’objet de travaux de rénovation énergétique leur permettant de sortir du statut de « passoire thermique ». Ce relèvement de la limite d’imputation du déficit concerne :
> Les immeubles faisant l’objet de travaux de rénovation énergétique destinés à les faire passer d’une classe énergétique E, F ou G à une classe A, B, C ou D.
> Les dépenses pour lesquelles le contribuable justifie de l’acceptation d’un devis à compter du 5 novembre 2022 et qui sont payées entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025.
Attention, l’avantage lié à l’imputation des déficits sur le revenu global doit être nuancé. Cela permet bien entendu de réaliser une économie immédiate de trésorerie, bénéfice non négligeable en période de travaux. Néanmoins, elle représente en réalité un coût fiscal sur la durée globale de l’exploitation : la part des déficits qui aura été imputée sur le revenu global ne pourra plus l’être sur les revenus fonciers futurs. Or ces derniers supportent, en sus de l’IR, les prélèvements sociaux au taux de 17,2 %. Ainsi, l’économie immédiate de l’impôt coûtera au propriétaire le montant des prélèvements sociaux.
TVA à 5,5 % pour les travaux d’amélioration de la qualité énergétique
Les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des locaux à usage d’habitation, principale ou secondaire, achevés depuis plus de deux ans bénéficient, sous certaines conditions, du taux réduit de TVA de 5,5 %. Ce dispositif bénéficie aux propriétaires personnes physiques détenant un bien immobilier directement ou par l’intermédiaire d’une société soumise à l’IR, ainsi qu’aux personnes morales. Les travaux concernés par l’application du taux sont ceux portant sur la pose, l’installation et l’entretien de matériaux et équipements dès lors qu’ils respectent des caractéristiques techniques et des critères de performance minimale. Le taux réduit s’applique également à la fourniture des matériaux, équipements et appareils lorsqu’ils sont fournis par le prestataire réalisant les travaux. En revanche, sont exclus du taux réduit les travaux qui concourent à la production d’un immeuble neuf ou augmentant la surface de plancher des locaux existants de plus de 10 %.
Exonération de la taxe foncière pour les travaux d’économies d’énergie
Les collectivités locales sont autorisées à exonérer temporairement de taxe foncières certains logements lorsqu’ils réunissent certaines conditions de performance énergétique. Cette exonération est applicable à l’ensemble des propriétaires. Les logements éligibles sont les logements :
> anciens achevés avant le 1er janvier 1989 ayant fait l’objet, par le propriétaire, de dépenses en faveur des économies d’énergie et du développement durable.
> neufs achevés à compter du 1er janvier 2009 dont le niveau élevé de performance énergétique globale est supérieur à celui qu’impose la législation en vigueur.
Ces logements bénéficient alors d’une exonération de taxe foncière pendant cinq ans à concurrence de 50 % ou de 100 %. Il doit être noté que le projet de loi de finances pour 2024 prévoit de modifier les conditions d’éligibilité de ces exonérations afin d’en clarifier la portée.
Les financements incitatifs : l’éco-prêt à taux zéro
Les banques peuvent accorder des prêts ne portant pas intérêt à des personnes physiques en vue du financement de travaux d’amélioration de performance énergétique des logements anciens. Ce prêt dénommé « éco-prêt à taux zéro » (éco-PTZ) s’adresse à l’ensemble des propriétaires, occupants ou bailleurs, pour les biens immobiliers détenus directement ou par l’intermédiaire d’une société soumise à l’IR. Ce prêt est accordé sans condition de ressources pour certains travaux portant sur les locaux déclarés en résidence principale (qu’ils soient occupés par le propriétaire ou le locataire) et achevés depuis plus de deux ans. Il peut s’élever jusqu’à 50 000 € et est strictement accordé pour les travaux suivants :
> Travaux de rénovation permettant au logement d’améliorer sa performance énergétique. Plusieurs actions sont éligibles : isolation, mise en place de double vitrage, installation d’équipement de chauffage ou de production d’eau chaude utilisant une source d’énergie renouvelable, etc.
> Travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale du logement, soit 331 kWh/mÇ maximum par an et un gain énergétique d’au moins 35 %.
> Travaux de réhabilitation des installations d’assainissement non collectif pour des systèmes peu consommateurs d’énergie.
Un audit énergétique réalisé par un diagnostiqueur qualifié doit être effectué au préalable pour déterminer les travaux nécessaires. Les travaux doivent obligatoirement être réalisés par des professionnels qualifiés RGE. L’éco-PTZ est cumulable notamment avec les aides de l’Anah, les aides des collectivités territoriales, les primes énergie générées par les certificats d’économies d’énergie, le prêt à taux zéro pour l’accession à la propriété, le dispositif MaPrimeRenov’. Ce dispositif serait prorogé de 4 ans par le projet de loi de finances pour 2024, soit jusqu’au 31 décembre 2027.