La domotique s'installe durablement dans notre salon

La domotique et les objets connectés entrent en force dans nos lieux de vie pour rendre la maison plus communicante, plus confortable, plus économe, plus intelligente. 

Source d'innovations et de nouveaux usages, la domotique transforme notre quotidien et génère de fortes attentes. Mais si le futur est entré dans notre salon, la maison connectée reste confrontée à quelques défis: complexité et coûts des équipements, sécurité et fiabilité des systèmes, protection des données, effractions virtuelles. 

Grâce à votre smartphone, vous avez votre maison en perma­nence au bout des doigts. Vous pilotez votre Foyer à distance, vous recevez des alertes en cas de problème, vous intervenez pour modifier des paramètres, en Fonction de vos envies, de la météo, de votre emploi du temps. La maison s'adapte pour vous rendre la vie plus Facile. Dans un secteur en pleine explosion, le numérique s'im­pose à tous les étages pour transformer nos habitudes et notre relation à l'habitat. Le Futur s'est-il déjà installé dura­blement dans notre salon ou notre chambre à coucher ?

Evolution positive et Fortes attentes

Pour 2/3 des Français, les objets connectés pour l'habitat {OCH) constituent une évolu­tion positive et Facilite le déve­loppement de services à domi­cile, selon la récente étude Promotelec qui réunit acteurs de l'énergie, du bâtiment et associations de consomma­teurs. « Une période charnière est en train de s'ouvrir, ces objets sortent de la science-fic­tion pour entrer dans l'ère du quotidien, souligne l'étude. Si une partie des Français semble prête à basculer, l'adoption massive va-t-elle se faire pour autant ? 43 % sont plutôt ouverts aux objets connectés, la même proportion les consi­dère encore comme des gadgets. Tout dépendra de la capacité des OCH à se rendre vraiment utiles et à répondre à de vrais besoins. »

Si l'image est positive, la présence des équipements domotiques reste encore plutôt discrète. Seuls 11 % des Français déclarent être équipés d'un système de vidéosurveillance, 10 % d'un chauffage intelligent, 7 % de volets roulants connectés. Le vrai avantage pour 84 % des utilisateurs potentiels c'est le pilotage à distance et à tout moment, pour l'énergie, l'éclai­rage, l'électroménager ou les dispositifs de sécurité. « Les marques doivent faire des efforts pour convaincre pleine­ment les utilisateurs potentiels de l'utilité des OCH qui ne sont pas seulement attendus sur les bénéfices rationnels (gain de temps, de sécurité, écono­mies) mais aussi émotionnels, contribuant à une qualité de vie augmentée », note encore l'enquête Promotelec. 

Pas simple de se connecter

Pour l'heure, moins de 20 % des propriétaires sont équipés, mais 75 % d'entre eux incluent des équipements connectés dans les projets de rénovation. Encore Faut-il bien identifier ses besoins, Faire les bons choix et trouver l'installateur spécialisé qui saura vous conseiller et vous accompa­gner. Pas si simple ! Certes, les plaquettes sont attractives et les discours bien ficelés mettant en avant des solutions Faciles à installer et à utiliser grâce aux techno­logies sans fils, via une box pour se connecter à internet, une interface qui centralise les commandes et, bien sûr, les accessoires : capteurs, caméras, thermostats intelli­gents, ampoules connectées, assistants vocaux... Le tout pouvant être géré depuis votre smartphone. En réalité, la domotique qui peut passer par le câble, notamment dans les loge­ments neufs équipés, les circuits électriques, les ondes ou le wifi, combine des systèmes complexes et des matériels de différentes marques. Pas facile de s'y retrouver, d'autant que le coût Anal peut très vite grimper, de quelques centaines d'euros à plus de 20 000 € pour des installations élaborées, tout dépend des attentes et confi­gurations.

On peut commencer par un équipement de sécurité comme la vidéosurveillance et intégrer ensuite de nouvelles fonctions dédiées aux écono­mies d'énergie ou au confort. Pour vous accompagner au mieux dans ce parcours, la Fédération Française de la Domotique propose un baro­mètre du marché et un label de certification pour les instal­lateurs, répertoriés sur le site www.ffdomotique.org.

Maisons intelligentes et responsables

Face à l'étendue de ces possi­bilités et au foisonnement de nouvelles applications, le secteur est à la recherche de dispositifs facilitant l'opérabi­lité entre tous les systèmes. Si 69% des Français sont persuadés que les objets connectés peuvent faciliter leur vie, ils sont 80 % à ne pas vouloir perdre du temps pour savoir comment ça marche. La simplicité d'utilisation appa­raît comme la condition essen­tielle du développement de la domotique. 

Les poids lourds du secteur, comme Schneider ou Legrand, ont bien compris l'impératif de faciliter au maximum l'usage et de sécuriser l'écosystème créé à l'intérieur du domicile, tout en favorisant l'efficacité énergétique. « La consomma­tion électrique domestique va doubler d'ici 2050, alors que nous devons impérative­ment réduire les émissions de CO2 de nos maisons, explique Manish Pant, vice-président exécutif Home et Distribution de Schneider Electric. Nos loge­ments, toujours plus connectés, vont consommer davantage, alors qu'ils sont déjà les plus gros contributeurs de dioxyde de carbone. Grâce à l'intelli­gence artificielle, nous pouvons rendre nos maisons non seule­ment intelligentes mais respon­sables et durables, en reliant les systèmes électriques et digitaux. » C'est la promesse de Wiser, tableau électrique nouvelle génération que vient de lancer le groupe mondial sur le marché européen. Ce système qui permet de contrôler toutes les sources d'énergie {réseau et solaire) est capable de passer du solaire à l'énergie tradition­nelle, de déceler les risques, les évènements imprévus et donner l'alerte. li calcule le meil­leur moment et le tarif le plus adapté pour chaque besoin, par exemple il peut favoriser le chargement de votre véhicule électrique à partir de l'énergie solaire, tout en tenant compte du contrat avec le fournisseur et de la consommation des autres appareils de la maison. Une formule souple et évolu­tive qui offre un pilotage pièce par pièce et optimise le fonctionnement de la maison connectée. « Les consomma­teurs disposent d'un véritable outil personnalisé de contrôle et de gestion de l'énergie à domi­cile et peuvent réaliser jusqu'à 50 % d'économies », assure le dirigeant de Schneider Electric. 

Protection et sécurité

Avec l'efficacité énergétique, les besoins de protection et de sécurité restent en tête des motivations des propriétaires prêts à franchir le pas. Il est désormais possible non seule­ment de surveiller son bien très facilement de n'importe quel endroit, mais aussi de prendre la main à distance pour contrôler les équipements ou modifier un scénario programmé. Ainsi, en cas d'intrusion, les volets s'ouvrent, les lumières s'allu­ment, un message est envoyé à un contact sur place. En matière de sûreté la domotique est aussi une alliée précieuse : fuite d'eau, de gaz, fumée détectée ou autres incidents de ce type font l'objet d'une alerte sur votre mobile. Votre maison intelligente connaît vos habitudes. Elle peut vous réchauffer, vous réveiller en vous enveloppant dans votre mélodie préférée, mettre votre cafetière en marche juste avant de déclencher le radia­teur dans la salle de bain. Elle peut arroser le jardin quand il ne pleut pas ou mettre la tondeuse automatique en marche. Elle sait aussi relever les volets quand le soleil se lève, vous ouvrir le portail du jardin quand vous partez et refermer les volets en votre absence. Et elle ne déteste pas entendre votre voix quand vous avez besoin de quelque chose, via l'assistant vocal. Votre maison prend soin de vous. Mais attention, plus elle est connectée, plus elle véhi­cule des données person­nelles qui circulent via le wifi et peuvent être exploitées à des fins notamment commer­ciales. Où sont-elles stockées, comment sont-elles exploitées, par qui? Les risques d'effraction virtuelle, d'espionnage, d'uti­lisation malveillante des données sont réels. La prise de contrôle d'un équipement de vidéosurveillance par exemple est aujourd'hui possible sans être un génie de l'informa­tique. Les fabricants l'affirment, les protections des systèmes évoluent et ces risques sont infimes. Beaucoup proposent des solutions permettant de regrouper toutes vos données en les stocRant sur place, pour éviter qu'elles ne voyagent dans les fameux « clouds », les nuages virtuels du web. Comment se protéger en cas de dysfonctionnement ou d'intru­sion ? Quelles sont les garan­ties existantes ? Que prévoit la loi? Entrée en vigueur en 2018, la directive européenne RGPD ou Règlement Général de Protec­tion des Données encadre les droits et obligations des entre­prises en matière de collecte et de traitement des données personnelles des citoyens. Une évolution majeure face au Aou juridique qui régnait jusque-là, même si les recours sont complexes, comme l'explique notre expert juridique, Maître Stanley Claisse {voir ci-après).

le logement neuf accélère

L'habitat neuf ouvre lui aussi portes et fenêtres à la domo­tique. De grands noms de la promotion, comme Vinci ou lcade accélèrent sur ce domaine encore peu mature mais très prometteur. Lono, premier portail dédié à la digitalisation du logement, travaille avec une soixan­taine d'acteurs du secteur et accompagne 1/3 de la produc­tion des programmes immo­biliers connectés. « Nous sommes dans une période de transition mais le marché va décoller assure Jérôme Barthez, le co-fondateur de l'entre­prise. Certains promoteurs frôlent déjà les 100 % de loge­ments connectés, les autres s'y mettent ; d'ici 2 ans, l'offre va se généraliser. Nous propo­sons plusieurs gammes évolu­tives concernant la gestion du chauffage, des volets roulants et des points lumineux qui sont intégrées directement dans les opérations. Ainsi, les coûts qui représentaient un des freins majeurs pour les particuliers, ne constituent plus vraiment un handicap. Selon l'équipe­ment, la facture s'élève pour le promoteur, de 140 € à 1 500 € par appartement, ce qui pèse peu sur le projet global et le coût final global. » A leur arrivée dans le loge­ment, les résidents peuvent personnaliser leur nouveau lieu de vie : systèmes d'alarmes, analyses de la qualité de l'air, serrures connectées, systèmes audio multi-room, électromé­nager connecté, smart tv ou assistants vocaux ... « Il reste cependant à faire de la péda­gogie et de l'information pour une meilleure acceptabilité par les usagers, reconnaît Jérôme Barthez. Les marques développent des référentiels communs et mettent en ce moment sur le marché des appareils compatibles. » A l'extérieur du logement, les parties communes, espaces verts ou jardins partagés béné­ficient aussi de l'intelligence artificielle pour la gestion de l'éclairage, de l'arrosage auto­matique, de l'évolution des plantes ou même du compost. L'habitat connecté Facilite également la gestion des copropriétés. Les équipements permettent en effet d'individua­liser l'utilisation du chauffage, de mieux évaluer les consom­mations d'eau ou d'anticiper les besoins en maintenance ou réparations.

Maintien à domicile toujours plus de solu­tions

L'ensemble de ces innovations et services liés à la domotique Facilite le maintien à domicile, grand défi des années à venir. Labos de recherche et entre­prises croisent leur savoir-Faire pour développer des applica­tions permettant d'anticiper la dépendance et d'améliorer la vie des personnes malades ou handicapées. Téléassis­tance, téléalarme, consulta­tions à distance, appareils à commandes vocales, détec­tion des chutes, prévention des accidents domestiques, capteurs de mouvements, surveillance des comporte­ments ... Le panel de solutions ne cesse de s'accroître. En cas de chute, par exemple, le domi­cile peut se configurer en mode alerte, permettre l'ouverture des portes et Faciliter l'accès des secours. Des dispositifs toujours plus simples d'utilisation. Parmi les dernières nouveautés, la lampe intelligente Nobi destinée aux séniors. Créée par une start-up belge, Nobi capte les données dans toutes les pièces, adapte l'éclairage, transmets les paramètres de santé, donne l'alerte. La nouvelle serrure connectée de Somfy, accroît considéra­blement la sécurité, elle est capable d'actionner tous types de portes en 3 secondes, mais peut aussi détecter des vibra­tions en cas d'intrusion, donner l'alerte via lecteur avec clavier à code, badge, bracelet, smart­phone ou clé. Elle peut aussi générer des codes temporaires pour livreurs, Famille ou aide à domicile. Autre innovation, avec le nouveau système d'alarme d'Origin Wirless, plus besoin de truffer votre habitation de capteurs, un seul suffit pour détecter les mouvements et envoyer une alerte sur votre mobile. Et puis, voici le petit robot Scout, conçu par Moorebot, intelligent et autonome, doté de caméras, capable de surveiller la maison, de se faufiler dans les coins les plus difficiles d'accès, de vous mettre en communication avec votre animal préféré quand vous êtes absent. Et il peut même recharger ses batteries tout seul. Des merveilles de technologies aujourd'hui très accessibles, Scout est commer­cialisé à moins de 150 €. 

Aides financières pour l'adaptation du logement
Les propriétaires peuvent bénéficier d'aides spécifiques pour adapter et sécuriser les logements,
dans le cadre de la loi du 28 décembre 2015 sur le vieillissement : 
- pose de volets roulants automatisés ;
- amélioration de l'éclairage pour éviter les risques de chute ;
- douches à l'italienne, revêtements antidérapants, WC surélevés, chemin lumineux...

Des aides spécifiques peuvent être accordées par plusieurs organismes:
Agence nationale de l'habitat (ANAH); Caisses de retraites; Collectivités locales; Action Logement; Aides fiscales 

 

Entretien Maitre Stanley Claisse, avocat au barreau de Toulouse, spécialisé en droit de l'informatique, de l'internet et de la propriété intellectuelle. 

L'Europe a mis en place un encadrement juridique pour la protection des données person­nelles. Une arme efficace ? La directive européenne RGPD, ou Règlement Général de la Protection des Données, est venue combler un vide juridique. Ce texte encadre les droits et obligations des entre­prises et organisations publiques et privées en matière de collecte et de traitement des données personnelles des citoyens. Il s'agit d'un progrès évident face à l'explosion des dispositifs numé­riques liés notamment aux objets connectés et à la télésurveillance qui génèrent des quantités consi­dérables de données concernant nos comportements, nos habi­tudes ou notre santé, sans que l'on sache comment elles sont stocRées et ce qu'elles deviennent.

Que prévoit ce dispositif? Il vise tous types d'entreprises gérant des données personnelles (collecte, utilisation, communica­tion à des tiers ... ) sur le territoire de l'Union européenne, même si les sociétés sont basées ailleurs dans le monde. Cela concerne donc aussi les plus importantes (GAFA), très actives en domotique, comme Google ou Amazon. Et les infractions peuvent aller jusqu'à 4% du chiffre d'affaires, ou 20 millions d'euros, ce qui peut réel­lement peser.

Quels sont les risques pour les usagers de domotique ? La data est une mine d'or très convoitée. Assureurs, mutuelles, banques, acteurs de la santé, réseaux commerciaux ... Beau­coup d'informations person­nelles semblent neutres mais croisées avec d'autres données, elles permettent de cibler votre personnalité, votre cadre de vie, votre état de santé, votre emploi du temps, vos besoins... De très nombreux objets du quoti­dien servent d'espions comme des compteurs, thermostats, assistants vocaux, des logiciels gratuits ou qui s'installent tout seuls dans nos téléphones pour nous géolocaliser. Il existe aussi des moyens simples pour explorer des ordinateurs ou prendre la main sur des caméras de surveil­lance des habitations. L'effraction virtuelle gagne du terrain, c'est un fléau qui va s'accroître.

Quelles sont les obligations des entreprises ? Un des principes de base, déjà inscrit dans la première loi fran­çaise de protection des données, datant de 1978, est le consente­ment des usagers. Les entreprises doivent par ailleurs traiter et utiliser uniquement des données néces­saires aux besoins. Le stocRage de données superflues est donc pros­crit. Le RGPD vise à renforcer la sécurité des données, notamment sensibles (médicales, financières, sexuelles ... ), à limiter la durée de conservation et à renforcer la transparence et le droit des personnes à l'accès et à l'oubli. 

En pratique, l'application et le contrôle sont-ils possibles ? L'application de ce droit reste complexe. Les intervenants sont nombreux dans un ensemble domotique qui concerne des entreprises et savoir-faire diffé­rents, souvent plusieurs marques et des sous-traitants. L'usager est face à un écosystème (fabri­cants, distributeurs, installateurs) opaque qui n'a pas trop intérêt à dévoiler les obligations des professionnels. Sachez aussi que l'installateur ne garantit rien sur l'aspect de la sécurité, il n'a qu'une obligation de moyens.

Que conseillez-vous aux particuliers pour se protéger ? Avant toute installation, s'informer, comparer, se faire conseiller par un professionnel de confiance et veiller à la conformité du contrat. Ne faites pas voyager vos données dans un nuage (cloud) avec un système en ligne, elles peuvent être stocRées sur place sans sortir de chez vous. Autre préconisation importante, pour piloter le dispo­sitif, utilisez un logiciel libre (open source), non imposé par un géant du Net. Et si tout fonctionne, effec­tuez régulièrement les mises à jour pour éviter les failles de sécurité, facilement exploitables. 

En cas de piratage, n'hésitez pas à porter plainte, contrat d'huissier à l'appui, en vous faisant accom­pagner par un avocat spécialisé. 

 

Pour en savoir plus

monprojet.anah.gouv.fr • Service-public.fr• Pourbienvieillir.fr

 

par Marc Pouiol, journaliste

Source : 25 millions de propriétaires • Hors-Série décembre 2021


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