Retour sur la réforme de l'état des risques

Alors que cette réforme est censée être entrée en vigueur le 1er janvier 2023, aucun nouveau modèle d’état des risques n’a encore été publié. Les portails internet officiels permettant de compléter l’état des risques n’ont pas non plus été mis à jour.

Dans ce contexte, quelle est la meilleure manière d’établir l’état des risques ?  

 

Ce qui change

La réforme ajoute un nouveau risque à prendre en compte et avance le moment où l’information doit être délivrée par le vendeur ou le propriétaire bailleur. 

Champ d’application de l’état des risques

Concernant les immeubles ou baux concernés, la réforme n’opère aucun changement de fond.
S’agissant des ventes immobilières (quel que soit l’immeuble en cause, qu’il s’agisse par exemple d’un bâtiment ou d’un terrain), l’état des risques doit systématiquement être annexé à la promesse de vente (lorsqu’une promesse est signée) et à l'acte authentique de vente (même lorsqu’il a déjà été annexé à une promesse). 
S’agissant des locations, formellement, le Code de l’environnement ne fait de l’état des risques une annexe obligatoire que pour les baux d’habitation et les baux commerciaux. Cependant, l’article L.125-5 du Code de l’environnement débute en posant le principe que tous les « les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers » doivent être informés des risques via un état des risques.  
▶ Quel que soit le bail en cause, qu’il porte sur un bien bâti ou non, à usage de logement ou non, il est conseillé de faire signer un récépissé de remise de l’état des risques ou d’annexer l’état des risques au bail. 

Concernant les secteurs concernés, un état des risques n’est en théorie obligatoire que lorsque l’immeuble considéré est situé dans une des zones à risque listées à l’article R.125-23 du Code de l’environnement. Cependant, la liste des risques pris en compte dans l’état des risques n’a cessé de s’allonger au fil des ans. En dernier lieu, le Code de l’environnement imposait l’établissement d’un tel document dès lors que le bien loué était situé dans le champ d’un plan de prévention des risques technologiques, naturels ou miniers approuvé ou prescrit ou dont certaines dispositions avaient été rendues immédiatement opposables, dans une zone de sismicité 2 à 5, ou dans une zone à potentiel radon de niveau 3.
A cette liste de risques la loi Climat et résilience du 22 août 2021 a ajouté le risque lié au recul du trait de côte (érosion côtière).
▶ En pratique, compte tenu de la multiplicité des risques listés, la tendance est à établir systématiquement un état des risques pour tout bien, quitte à ce que, le cas échéant, cet état des risques ne fasse mention d’aucun risque répertorié. 

Un état des risques imposé dès les annonces et visites

Conformément à la loi Climat et résilience, c’est désormais dès le stade des annonces que l’état des risques est requis. 
Ainsi, « l’annonce relative à la vente ou la location d'un bien pour lequel doit être établi l'état des risques mentionné à l'article L. 125-5, quel que soit son support de diffusion, comporte la mention suivante : “ Les informations sur les risques auxquels ce bien est exposé sont disponibles sur le site Géorisques : www.georisques.gouv.fr » (article R.125-25 du Code de l’environnement, modifié par le décret du 1er octobre 2022). 

Remarque : cet article n’impose pas d’établir un état des risques en tant que tel dès la publication d’une annonce immobilière. En effet, il ne s’agit que de renvoyer vers la plateforme georisques.gouv.fr où chacun peut télécharger un état des risques pour n’importe quelle adresse (voir plus loin). 
Une difficulté vient ici directement à l’esprit. Pour télécharger un état des risques sur cette plateforme officielle, il faut renseigner une adresse. Or, les annonces immobilières indiquent la commune de situation du bien, parfois un quartier, mais jamais l’adresse précise du bien… Via Géorisques on ne pourra donc qu’avoir une idée des risques répertoriés pour une commune considérée (en « tapant » une adresse au hasard dans la commune), pas précisément pour l’immeuble en cause. 

S’il ne s’agit que de renvoyer vers Géorisques au stade de l’annonce, c’est un état des risques en bonne et due forme qui doit pouvoir être « remis » à tout potentiel acquéreur ou locataire dès la première visite des lieux (même article), ce document devant être « établi depuis moins de six mois ».
Un délai plus ou moins long étant susceptible de s’écouler entre la visite des lieux et la signature du contrat, le Code de l’environnement prend désormais soin de préciser que l’état des risques doit être « actualisé par le promettant, le réservant, le vendeur ou le bailleur, selon le cas, si les informations qu'il contient ne sont plus exactes à la date de signature de la promesse de vente, du contrat préliminaire en cas de vente en l'état futur d'achèvement, de l'acte authentique ou du contrat de bail, auquel il doit être annexé ».

A noter : si on lit le Code de l’environnement, l’état des risques annexé par exemple à un contrat de location peut dater de plus de six mois dès lors que, lors de la visite, le document remis au candidat locataire datait de moins de six mois. Les bailleurs – ou leurs mandataires – seront évidemment bien avisés de faire signer une attestation de remise lors de la visite. Pour sûr, en cas de visites multiples, tout ceci ne va pas dans le sens d’un allègement de la « paperasse ». 

Sanctions applicables 

La réforme ne modifie pas la sanction de base prévue pour le défaut d’état des risques au moment de la signature du contrat : « l'acquéreur ou le locataire peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix » (article L.125-5 du Code de l’environnement). 
En revanche, en matière de vente de logements, la réforme suspend désormais le délai de réflexion de 10 jours tant que l’état des risques n’est pas remis. Ainsi, lorsque l'état des risques n'est pas remis à l'acquéreur au moment de la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente, le délai de rétractation « ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ce document à l'acquéreur » (même article). 
Ne pas établir un état des risques fait donc courir un risque grave, même si, concernant par exemple le risque de résolution du contrat aux torts du bailleur ou du vendeur, les cours d’appel s’écharpent sur la question de savoir s’il faut ou non caractériser un préjudice du locataire ou de l’acquéreur pour prononcer la résolution[1]

A noter : l’article L.125-5 n’envisage expressément de sanction qu’en cas de défaut d’état des risques ou d’information relative à l’existence d’un sinistre ayant donné lieu à indemnité d’assurance après une catastrophe naturelle (information devant figurer dans l’état des risques). Le défaut de remise d’un état des risques lors de la visite des lieux ou de renvoi vers Géorisques dans les annonces ne sont pas non plus visés. Bailleurs et vendeurs ne doivent pas pour autant se sentir libres de diffuser des annonces non conformes ou de remettre des états des risques incomplets…

Quid du risque lié à la pollution des sols ?

Depuis 2010, le vendeur ou le bailleur d’un terrain pour lequel un risque de pollution des sols est identifié doit en informer l’acquéreur ou le locataire. 

Bien que cette obligation soit traitée à part dans le Code de l’environnement, le risque lié à la pollution des sols est intégré dans le dernier modèle d’état des risques de 2018. Ce dernier est même intitulé « Etat des risques et pollutions ». Cependant, depuis la réforme, « l’information des acquéreurs et locataires sur les risques » et « l’information des acquéreurs et locataires sur la pollution des sols » sont traitées dans deux sous-sections bien distinctes de la partie réglementaire du Code de l’environnement. Par ailleurs, le défaut d’information sur les sols pollués (lorsque le terrain est situé dans un « secteur d’information sur les sols ») entraîne une sanction propre. Ainsi, la résolution du contrat, la diminution du prix, voire la réhabilitation du terrain ne peut être demandée qu’en cas de découverte de pollution sévère (article L.125-7 du Code de l’environnement). 
Certains commentateurs[2] en concluent donc que l’information sur les sols pollués (lorsque le terrain considéré est situé dans un « secteur d’information sur les sols ») doit dorénavant être délivrée dans un document différent de l’état des risques.  

A noter : l’état des risques téléchargeable sur Géorisques (voir ci-après) continue d’intégrer le risque lié à la pollution des sols. 

Une entrée en vigueur au 1er janvier 2023 mais toujours pas de nouveau modèle d’état des risques ! 

La loi Climat et résilience comme le décret du 1er octobre dernier ont fixé la date d’entrée en vigueur de la réforme de l’état des risques au 1er janvier 2023. 

Pourtant, tous les portails officiels continuent de renvoyer vers le modèle d’état des risques publié par un arrêté du ministre de la Transition écologique du 13 juillet 2018. Ce modèle n’est plus conforme aux nouvelles règles. Notamment, il ne prend pas en compte le risque lié au recul du trait de côte. La fiche dédiée du portail « service-public.fr » en est encore à annoncer la parution d’un décret devant préciser les nouvelles règles de l’état des risques (Diagnostic immobilier : état des risques et pollutions | Service-public.fr). 

De même, l’état des risques prérempli qu’il est possible de télécharger sur la plateforme « Géorisques » (voir ci-après) n’a pas encore été mis à jour. Enfin, les cartographies nécessaires à l’établissement de l’état des risques semblent pour partie encore introuvables. Notamment, l’article R.125-23 du Code de l’environnement indique que les zones exposées au recul du trait de côte sont « consultables » sur le portail national de l’urbanisme. A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous n’avons pas trouvé l’information désirée (pire : lors d’une nouvelle tentative, ce portail était inaccessible). 

Il est fort regrettable que les pouvoirs publics imposent une entrée en vigueur au 1er janvier 2023 alors que les outils pour remplir l’état des risques n’ont pas encore été mis à jour. 
Dans ce contexte, quelle façon d’établir l’état des risques est à privilégier ? 

Comment établir un état des risques ?

On peut concevoir trois façons de procéder. 

Remplir le modèle officiel (solution à proscrire)

Une première façon d’établir l’état des risques consiste à remplir le modèle d’état des risques arrêté par le ministère de la Transition écologique (ce document est facilement accessible après avoir tapé « modèle état des risques » sur n’importe quel moteur de recherche internet).  
Mais, de notre point de vue, cette façon de faire doit désormais être déconseillée. D’une part, comme nous l’avons souligné, le modèle actuel date de 2018 et n’est plus conforme à la règlementation. D’autre part, il n’est pas toujours facile d’accéder aux informations nécessaires pour remplir ce formulaire. Certes, le Code de l’environnement précisait jusqu’ici qu’un arrêté du préfet du département devait récapituler les risques répertoriés pour chaque commune. Mais les portails internet de chaque préfecture sont différents et parfois obscurs (il faut en général chercher la rubrique « IAL », pour information des acquéreurs et locataires)[3]. Compte tenu du fait qu’il y a sept types de risques à prendre en compte, le risque d’erreur est notable. Enfin, dans sa dernière version, le Code de l’environnement ne prévoit plus expressément que le préfet doive prendre des arrêtés récapitulatifs des risques…

A noter : d’un certain côté, la logique invite à penser qu’on ne peut se voir reprocher d’utiliser le modèle obsolète de 2018 tant qu’un nouveau modèle n’a pas été publié. D’un autre côté, à la différence de l’ancien article R.125-26 du Code de l’environnement, le nouvel article R.125-24 du Code de l’environnement ne précise plus que l’état des risques doive être conforme à un modèle établi par arrêté ministériel. En réalité, il n’est donc pas acquis du tout qu’un nouveau modèle soit publié, l’état des risques n’obéissant à aucune forme particulière mais devant simplement renseigner toutes les informations requises à l’article R.125-24. Autrement dit, il est théoriquement possible de porter toutes les informations requises par cet article « sur papier libre »… 

Télécharger un état des risques prérempli sur le portail Géorisques

Depuis plusieurs années, le ministère de la Transition écologique a mis en place la plateforme en ligne « Géorisques », qui permet, à partir d’une adresse ou d’un numéro de parcelle, de télécharger un état des risques prérempli (https://errial.georisques.gouv.fr/). Cette procédure permet d’obtenir un document récapitulant automatiquement les risques répertoriés pour une parcelle donnée. 

Les autorités poussent clairement le public à se saisir de ce nouvel outil. S’ils fournissent des informations pour remplir le modèle papier, les portails des préfectures (section IAL) font généralement la promotion de Géorisques. De même, la dernière version du Code de l’environnement multiplie les références à Géorisques (voir l’article R.125-24 du Code de l’environnement). 

Télécharger sur Géorisques un document prérempli représente un gain certain de temps et limite le risque d’erreurs. 
Cependant, ce document comporte encore de sérieux inconvénients : 

  • Même s’il est présenté comme un document conforme répondant « au modèle arrêté par le ministre », même si de nombreuses publications officielles renvoient vers Géorisques, le document téléchargé indique en première page qu’« il appartient au propriétaire du bien de vérifier l'exactitude de ces informations autant que de besoin et, le cas échéant, de les compléter à partir de celles disponibles sur le site internet de la préfecture » ; 
  • Dès lors que le bien en cause est situé dans le champ d’un plan de prévention des risques, il faut aller vérifier (ailleurs que sur Géorisques) que ce bien n’est pas soumis à une prescription de travaux ; de même, toujours dans cette hypothèse, il faut joindre au document des extraits de règlements et de cartes (non fournis par Géorisques) ; 
  • Surtout, le document fourni à l’heure actuelle par Géorisques n’est pas à jour de la dernière réglementation. Notamment, il ne prend pas en compte un nouveau risque intégré dans l’état des risques par la loi Climat et résilience, le risque lié au recul du trait de côte. 

Important : dans tous les cas, l’état des risques téléchargé sur Géorisques impose un minimum de recherches personnelles pour le bien considéré. Conformément au Code de l’environnement, le vendeur ou le propriétaire bailleur doit notamment préciser si le bien en cause a fait l’objet d’une indemnisation après un arrêté de catastrophe naturelle. 

En faisant appel à un professionnel (solution à privilégier)

En définitive, compte tenu de l’absence de mise à jour du modèle officiel d’état des risques ou de Géorisques, mais aussi du fait que l’établissement d’un état des risques est devenu un acte compliqué à établir, un propriétaire prudent aura intérêt à faire appel à un diagnostiqueur. Même s’il n’est pas dit que l’état des risques établi par un professionnel sera conforme en tous points à la réglementation (celle-ci est très technique et change régulièrement), le propriétaire bailleur ou vendeur aura au moins quelqu’un contre qui se retourner en cas de litige avec le locataire ou l’acquéreur. 

A la limite, si l’on tient à éviter des frais de diagnostic supplémentaires, on ne se résoudra à établir un état des risques soi-même que si le document téléchargé sur Géorisques conclut à l’absence du moindre risque pour le bien considéré. 

A noter : comme nous l’avons vu, la plateforme Géorisques ne renseigne pas encore sur le risque lié au recul du trait de côte. 
Si l’on ne fait pas appel à un professionnel et que l’on souhaite déterminer si un bien en particulier est potentiellement concerné par le risque lié au recul du trait de côte, on peut consulter le décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 établissant la liste des communes dont l'action en matière d'urbanisme et la politique d'aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l'érosion du littoral. Si le bien en cause est situé dans une des communes concernées, il est possible qu’il soit concerné par le risque lié à l’érosion côtière. 

De manière générale, l’UNPI milite pour une simplification des formalités préalables aux ventes et locations immobilières. Compte tenu des énormes défis que doivent relever les propriétaires (rénovation énergétique, mise sur le marché de logements en parfait état et à loyer abordable), il est impensable de perdre du temps à établir des annexes avec des outils non mis à jour. 
Concernant l’état des risques, le développement de la plateforme Géorisques est assurément une bonne solution. 
Mais il est urgent : 

  • Qu’elle soit mise à jour pour être conforme en tous points à la réglementation entrée en vigueur au 1er janvier dernier ; 
  • Que le propriétaire bailleur puisse télécharger un état des risques prérempli exact et complet. Ce document doit notamment comprendre toutes les annexes exigées par l’article R. 125-24 du Code de l’environnement. La seule rubrique à remplir par le propriétaire ne peut concerner que ses éventuelles indemnités d’assurance reçues à la suite d’un arrêté de catastrophe naturelle. 

L’UNPI a déjà alerté le service en charge de la plateforme Géorisques sur les difficultés rencontrées. Vous pouvez compter sur votre fédération pour continuer d’alerter les autorités sur ce sujet. 


[1] Loyers et Copropriété n° 4, Avril 2022, comm. 59

[2] Voir Dictionnaire permanent Gestion immobilière, bulletin 560, octobre 2022 

[3] La recherche « état des risques + nom de commune » donne aussi de bons résultats

Par Frédéric Zumbiehl, juriste à l'UNPI

Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°571; mars 2023

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