Après la pandémie et la fermeture des agences immobilières traditionnelles lors du premier confinement, nombreuses sont les personnes à avoir fait appel à ces agences d'un nouveau genre.
« Je me demande bien comment ces agences en ligne font pour vendre un bien sans le voir, ni les clients »
À l'instar de Welmo, une start-up digitale, fondée en 2016 par Nicolas Gay, d'origine bordelaise et deux associés proposant des offres alléchantes à partir de 990 euros de frais. « Pendant les confinements, nous avons eu des acheteurs qui ont fait des offres sur des biens dans lesquels ils n'avaient jamais physiquement mis les pieds. Nous rendons cela possible grâce à un panel d'outils nous permettant de mettre en avant le bien et surtout à l'acheteur de se projeter comme s'il y était », raconte Nicolas Gay.
Cela comprend les photos du bien avec des plans en 3D pour visualiser les espaces, une visite virtuelle avec prises de mesures, avec possibilité d'échanger avec le vendeur. « Nous proposons aussi à nos clients, la validation du plan de financement, un devis en ligne pour le déménagement et les travaux, tout cela à distance », précise-t-il sans donner de chiffres sur le nombre de transactions réalisées à Bordeaux.
C'est selon. Si le prix d'appel à 990 euros séduit au premier abord, il ne comprend qu'une « base » de services, à savoir, un accompagnement pour la vente entre particuliers. Si le client souhaite un accompagnement personnalisé, il faudra qu'il débourse davantage. Par exemple, le forfait tranquillité, où Welmo a un mandat exclusif, coûte 1,9 % de commissions à l'acquéreur le jour de la vente. La formule Liberté, plus onéreuse avec 2,9 % de commissions pour Welmo, toujours payable par l'acquéreur au moment de l'acte de vente, permet au client de pouvoir continuer à vendre son bien de son côté.
Prenons l'exemple concret d'une vente d'un logement bordelais à 500 000 euros net vendeur. Frais d'agence inclus, le prix de vente du bien s'élèvera à 509 500 euros avec l'offre exclusive Welmo contre 530 000 euros en moyenne dans une agence immobilière traditionnelle. Les commissions des agences immobilières traditionnelles oscillent entre 5 % et 10 %. Et une commission de 6 % sur un bien immobilier à 500 000 euros, ça représente 30 000 euros. C'est le pourcentage moyen des frais d'agences demandés, lors des transactions engagées à l'agence immobilière Human dont le siège national est bordelais.
« Certains comparent aux compagnies d'avion low cost, dont personne ne voulait et que tout le monde prend aujourd'hui »
Un responsable d'agence girondine reconnaît l'essor de ce nouveau type de structures sur internet. Certains clients qui franchissent le pas de son enseigne, n'hésitent pas à le mettre en concurrence avec des agences immobilières en ligne. « Mon approche est à la fois simple et légale. Je prends l'exemple d'un T1 à Bordeaux dont les clients voulaient tirer 100 000 euros. Ils m'ont parlé d'une agence en ligne qui leur prenait 3 000 euros de frais, c'est-à-dire moins cher que nous à 13 000 euros. Je leur ai demandé d'exiger que l'agence en ligne augmente son prix de vente net vendeur, en le mettant à 110 000 euros et on est au même niveau ».
Le professionnel s'interroge néanmoins sur la transparence de ces ventes et achats de biens en ligne. « En tant qu'agent immobilier, nous avons l'obligation, au moment du montage d'un dossier, de connaître nos clients afin d'identifier une opération potentiellement douteuse, en repérant un comportement insolite ou atypique. Je me demande bien comment ces agences en ligne font pour vendre un bien sans le voir, ni les clients, alors que nous devons, si nous avons un doute, transmettre un document à Tracfin, un organisme du Ministère de l'Économie chargé de la lutte contre la fraude, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. En tout cas, ces contraintes ne semblent pas entamer le développement de ces agences digitales. Certains vont même jusqu'à les comparer aux compagnies d'avion low cost, dont personne ne voulait entendre parler à l'époque, et que tout le monde prend aujourd'hui. Denis Jacques, président de l'Union Nationale des Propriétaires Immobiliers (UNPI 33-24) confie lui aussi ses réticences pour ce type de transactions digitales « On n'achète pas une maison tous les jours dans sa vie. En général, on achète, puis on revend quand la famille s'agrandit et c'est le troisième achat qui est le bon, celui de ses rêves. Ce sont des paliers importants et l'accompagnement d'un professionnel de l'immobilier me semble nécessaire. L'économie de 2 à 3 000 euros n'est pas à faire à ce moment-là », conclut-il.
Source : https://www.sudouest.fr/economie/immobilier/immobilier-a-bordeaux-les-agences-en-ligne-menacent-elles-l-avenir-des-agences-traditionnelles-7388406.php