Projet de loi Climat : avant de poser des obligations irréalisables, essayons de remplir les objectifs posés initialement !

Interdire la location de logements F et G est une ambition nécessaire. Interdire la location de logements E, représentant à eux seuls un quart du parc de logements actuellement loués, dans un horizon irréaliste, revient à mettre en péril les conditions de logement à moyen-terme de près de 5 millions de Français.

L’interdiction de location des F et G, un objectif déjà très ambitieux

Le projet de loi Climat et résilience a été déposé en prévoyant une interdiction de louer des logements F et G à horizon 2028. Sur cette contrainte, représentants des bailleurs et de l’immobilier ont été dans une position de vigilance et d’alerte. Nous avons prévenu : c’est un projet nécessaire mais très ambitieux, coûteux et qui implique, pour réussir, que soit prévu un accompagnement à la hauteur pour les bailleurs. Et jusqu’à présent, nous n’avons pas été rassurés sur cet accompagnement. 1,7 million de logements F et G sont actuellement loués dans le parc locatif privé, à 1,7 million de foyers. C’est considérable. Une rénovation de logement G coûte entre 22 000 et 40 000 euros selon le niveau de performance qu’on cherche à lui faire atteindre, D à BBC, « Bâtiment Basse Consommation ».

A horizon 2028, 2 millions de logements actuellement loués comme résidences principales devront ne plus être classés F ou G, à peine de sortir du parc locatif, dont 1,7 million sur le parc privé. De façon basique, si les propriétaires privés n’engagent pas les travaux, 1,7 millions de foyers n’ont plus de domicile. C’est un défi colossal. Nous l’avons dit : ce n’est pas inatteignable, sous réserve que les dispositifs d’accompagnement suivent.

La rénovation des logements E, un objectif inatteignable en 2034 en l’état

Cette interdiction n’est pas encore votée que la majorité affiche la volonté de prévoir un calendrier d’interdiction de location pour inclure les logements classés E, à horizon 2034. Nos organisations relèvent le niveau d’alerte quant à la capacité du parc à suivre, sans danger pour le Logement en France. 

Les logements E, représentent 25% du parc. En pratique, avec cette nouvelle contrainte, E, F, G, nous allons avoir 12 ans, pour rénover près de la moitié du parc locatif privé en France : les logements E, F et G représentent 3,6 millions de logements, sur les 7,3 que compte le parc privé locatif français.

Sans doute le parc locatif, notamment privé, a du retard dans sa rénovation. Mais rappelons aussi deux états de fait : 

  • Le CITE avait exclu les bailleurs depuis 2014. Ma Prime Rénov’ ne les réinclut que depuis quelques mois, et encore, les dossiers ne peuvent pas être déposés auprès de l’ANAH avant le 1er juillet 2021. 
  • Jusqu’en octobre dernier, la copropriété a été le point aveugle des raisonnements d’accompagnement. Or, près des trois quarts des G du parc locatif privé sont situés en appartements, donc vraisemblablement en copropriété. 70% des logements classés E sont situés en appartements. Il n’est pas nécessaire de rappeler la temporalité des travaux en copropriété et il faut mettre en garde sur la capacité à avoir rénové tous les logements G, d’ici 2025, soit dans trois ans. A cet égard, rappelons que l’un des instruments de la rénovation des copropriétés, c’est le Plan pluriannuel de travaux, dont les modalités d’entrée en vigueur s’étalent de 2023 à 2025. 

Et le rééquilibrage ne se fera pas sur le reste du parc. Au moins 11,7 millions de logements, soit 32% de la totalité du parc de logements ne pourra plus être louée (il n’existe par principe aucune statistique sur le classement énergétique des logements vacants et des résidences secondaires), dans 12 ans. 

Les bailleurs du parc privé locatif ont choisi d’investir dans la pierre et ils assurent un rôle social déterminant. Le parc privé locatif est indispensable au logement des Français. La moitié du parc actuellement loué rénovée en douze ans ? 450 000 rénovations/an ? Sait-on le faire ? 

Quelles conditions d’accompagnement ? 

Dans une version minimale – sortir les logements pour les amener à un classement « D » – la rénovation du seul parc privé locatif E, F et G, représente 56 milliards d’euros ; les amener à un niveau « Bâtiment basse consommation » représentera un coût de 88 milliards d’euros. Et on ne parle ici que du parc actuellement loué, habité par des foyers, dont c’est la résidence principale. 

Cette contrainte vient poser une exigence sans précédent sur la filière construction et sur les bailleurs. C’est une exigence financière, mais aussi une exigence de ressources humaines. A terme, si nous ne parvenons pas à mettre en œuvre cette obligation, ce ne sont pas les bailleurs qui se retrouveront sans logement. Ce seront les locataires qui seront sanctionnés.

De même, attention aux conditions de l’accompagnement. Sur les logements F ou G, il serait malhonnête de faire croire qu’une rénovation « globale » garantit toujours un niveau de performance supérieur, de type « BBC ». Il serait tout simplement faux de penser qu’on parviendra à amener tout le parc E, F ou G à un niveau A, B ou C. 

Accompagner mieux la rénovation globale, oui, prévoir un accompagnement minimal pour des ménages qui n’atteindraient « que » le D, ne garantirait pas le maintien dans le parc locatif des logements menacés d’en être exclus. Au contraire, ce serait inciter les bailleurs de F ou G à ne pas entreprendre les travaux de rénovation qui leur paraitront inaccessibles. 

 

Les professionnels de l’immobilier joignent leur voix à celle de l’Union Nationale des Propriétaires Immobiliers pour proposer des solutions d’accompagnement qui permettront aux logements actuellement loués d’être effectivement rénovés :

  • Pour lever un frein juridique évident à la rénovation des logements actuellement loués, créer un congé pour travaux d’économies d’énergie importants
  • Créer les conditions fiscales garantissant la soutenabilité financière pour les bailleurs des travaux de rénovation énergétique :
    • Défiscalisation de Ma Prime Rénov’ pour les bailleurs, alors qu’aujourd’hui, non seulement elle n’est pas déduite, mais en plus elle est fiscalisée ;
    • Doublement du déficit foncier, si le montant des travaux est composé pour 40% de travaux d’économie d’énergie (collectif ou individuel), pour donner un « coup de boost », à très court terme
    • Application d’une 3e ligne de quittance simplifiée pour partager le bénéfice des travaux de rénovation énergétique
    • A défaut de volonté de supprimer l’IFI, déduction de l’assiette d’imposition les logements loués qui ne sont pas classés F ou G par le DPE
Et pour éviter que des logements ne quittent durablement le parc locatif faute de capacité du propriétaire actuel, à assumer des travaux, prévoir l’éligibilité au DENORMANDIE dans l’ancien, sur tout le territoire, des biens F et G.

Contact presse :
pressunpi@unpi.fr

Télécharger le CP