Dans une décision récente concernant un bail commercial, la Cour de cassation a rappelé que « sauf disposition expresse du bail, le locataire, nonobstant la clause du bail mettant à sa charge l'entretien et les réparations autres que celles de l'article 606 du code civil*, ne peut être tenu des réparations qui sont la conséquence de cette vétusté » (Cour de cassation, Civ. 3ème, 9 mai 2019, n°18-14123).
En effet, sauf clause expresse du bail, il faut appliquer les dispositions de l’article 1755 du Code civil, lequel énonce qu’« aucune des réparations réputées locatives n'est à la charge des locataires quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure ».
Notons que la décision précitée était relative à des travaux d’entretien de parties communes de l’immeuble où se situait le local commercial. Mais la solution vaut également, bien sûr, pour des travaux effectués dans les locaux loués.
La loi Pinel de 2014 a limité les dépenses que l’on peut mettre à la charge d’un locataire commerçant.
Cependant, le décret d’application de la loi « Pinel » du 3 novembre 2014 n’a pas supprimé toute possibilité de mettre à la charge du preneur des travaux liés à la vétusté.
Le nouvel article R. 145-35 du Code de commerce énonce en effet que ne peuvent être imputées au locataire « les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation le bien loué ou l'immeuble dans lequel il se trouve, dès lors qu'ils relèvent des grosses réparations mentionnées à l'alinéa précédent ».
Comme l’indiquent la plupart des auteurs, si on lit a contrario cet article, il signifie que des travaux liés à la vétusté ou de mise aux normes peuvent en revanche être imputés au locataire s’ils ne constituent pas grosses réparations…
Cela suppose toutefois, comme rappelé par la Cour de cassation, une clause claire en ce sens dans le bail.
Mettre des travaux de vétusté ou de mise aux normes à la charge du locataire n’est pas anodin. Comme ce ne sont pas des travaux que l’on met habituellement à la charge du locataire – par défaut, on l’a vu, ces travaux sont à la charge du propriétaire –, le locataire pourrait éventuellement invoquer cette charge « exorbitante » pour demander une réévaluation à la baisse de la valeur locative lors du renouvellement de bail.
* Il s’agit de ce qu’on appelle les « grosses réparations ».
Frédéric Zumbiehl • Juriste UNPI