Avec 91 000 habitants, la Cité des Papes figure invariablement parmi les villes moyennes les plus attractives. Dévoilé fin janvier dans le Journal du dimanche, le palmarès des villes et villages où il fait bon vivre la plaçait 4e dans le top 5 des communes de 50 000 à 100 000 habitants et plus globalement, à la 11e place des villes de France. Préfecture d’un département à la croisée de trois grandes régions (Rhône-Alpes, PACA, Occitanie), Avignon dispose d’une gare centrale et d’une gare TGV à l’extérieur qui la met à 2h30 de Paris, d’un petit aéroport dont plusieurs liaisons européennes et deux autoroutes (A9 et A7) à proximité. Avec 8 sites universitaires, elle est par ailleurs 9e au palmarès des villes étudiantes selon le classement 2021 d’Arthur Lloyd. Le tourisme y constitue un pôle économique de poids, avec parmi ses fleurons, un rendez-vous estival reconnu comme le plus grand festival de théâtre du monde.
« La ville offre un marché pluriel très actif », annonce Jonathan Le Corronc Clady, président de la FNAIM Vaucluse. L’intérieur des remparts a bénéficié de belles rénovations urbaines et ses quartiers offrent le plus souvent le cadre d’une vraie vie de village. Au confluent du Rhône et de la Durance, la cité représente à elle seule 20 % des transactions du département, des ventes en hausse de 28,3 % en un an. « Pour une ville de cette taille avec une histoire et un patrimoine remarquables, le centre reste assez abordable », précise l’agent immobilier. Dans le coeur historique, les appartements se négocient en ce moment 2340 € le m² moyen, en hausse de 3,4 % en un an (prix médian dans le Vaucluse : 1940 €/m² source Chambre des notaires). Les prix s'envolent dans les rues huppées telles que Victor Hugo, Raspail ou Vernet, dans l'un des quartiers les plus beaux, partie ouest du centre historique. Le m² peut se négocier ici entre 2500 € et 4000 € selon l'emplacement, les prestations, l'immeuble. Il coûte entre 2800 € et 3000 €, au sud est, dans le quartier Banasterie apprécié pour ses belles façades d'hôtels particuliers XVIIe et XVIIIe siècle. « Dans les immeubles haussmanniens, un beau F3 bien placé avec un petit extérieur se paie entre 320 000 € et 400 000 € », indique M. Le Corronc Clady.
70 % des clients actuels investissent dans une résidence principale et parmi eux, 38 % de primo-accédants. Pour démarrer leur parcours résidentiel, ces derniers trouvent encore assez facilement des F3 sans extérieur, voire des biens à retaper entre 1500 € et 2000 € intra-muros. « Les prix varient d'une rue à l'autre », prévient Carla, coach sportif trentenaire, qui a profité des taux toujours très bas pour acheter, à crédit sur 20 ans, un 80 m² au sud des remparts... '' Selon le budget, on peut trouver entre 1000 € et 1700 € le m² à rafraîchir, tout autour de la ville, dans des copropriétés de standing années 1970 », indique la jeune primo accédante. Dans cette ville à la population très mixte, dont 46 % de salariés travaillent dans des PME, les centres de recherches comme l'Inra, des entreprises comme Mac Cormic ou les nombreuses sociétés de service l'Agroparc génèrent une bonne partie d'acquéreurs.
« Beaucoup de gens ont décidé de transformer leurs actifs financiers en immobilier et parmi les acheteurs 10 %investissent dans du locatif », note Maître Jean-Baptiste Borel, notaire. « Le AirBnb est une tendance forte, en effet, et beaucoup de propriétaires font de la location meublée », constate-t-il.
La ville a l'avantage d'avoir des universités et « ce marché locatif est aussi très actif avec les étudiants. » Par ailleurs, quatre millions de visiteurs séjournent chaque année ici. Proche de nombreux sites touristiques, Avignon est aussi le point de départ de croisières sur le Rhône et son palais des Papes est l'un des 10 sites les plus visités de France. Les beaux studios bien placés, intra-muros, trouvent ainsi preneur entre 80 000 € et 90 000 €. « Ce n’est pas neutre », confie-t-il. De telles petites surfaces peuvent se louer 400 € par mois et offrir une rentabilité de 4 % à 5 % selon la taille et la localisation. Selon ce notaire, les maisons en location assurent 3 % à 4 % et les locaux professionnels, entre 8 % et 11 %. « Le festival d’Avignon qui prend le relai en juillet des locations étudiantes, permet de louer en une saison, l’équivalent de 3 à 4 mois de l’année. » Avec des rentabilités plutôt intéressantes.
De l'avis général, le dynamisme des ventes se constate dans la ville centre, et tout autour. « Nous retrouvons les migrations de certains Parisiens ou Lyonnais en quête d’une vie plus simple et moins onéreuse, qui cherchent en Provincedes biens plus grands », indique le notaire. « L’ensemble du marché est désormais en tension », ajoute-t-il. Hormis la cité des Papes, essentiellement courue pour les appartements, le marché vauclusien se fait essentiellement sur les maisons avec, pour avantage, d’être relativement peu cher comparé au reste de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Leur prix moyen au m² s'élevait au début du trimestre à 2932 €, soit une augmentation de 15,8 % en un an. ''Cette hausse est phénoménale, c'est la plus forte depuis 2007 », indique Jonathan Le Corronc Clady, directeur du Cabinet House&Co.
Comme partout, les maisons sont plébiscitées depuis la sortie du premier confinement et il n'y a pas de baisse de prix à attendre à court terme. Selon cet agent, la hausse a été artificielle car en partie liée à la baisse du nombre de biens mis sur le marché. « 41 % des personnes qui avaient le projet de vendre pour acheter plus grand ou à la campagne, ou tout autre raison, n'ont pas mis leur bien sur le marché du fait de la pandémie », explique-t-il. Beaucoup prévoient de réaliser leur projet d'acquisition d'ici un an. Il pourrait y avoir ainsi une arrivée massive de biens sur le marché « avec une possible correction des prix, à la baisse. »
A Avignon intra-muros, par contre, ce marché représente seulement 23 % des transactions. Pour trouver des petites maisons de ville avec un jardin il faut chercher dans la première ceinture, à l'ouest et au nord de la vieille ville. Un pavillon de 130 m², année 1980, sur un beau terrain de 800 m² s'est récemment vendu 400 000 €, avec travaux de rafraîchissement à prévoir. Les CSP + qui souhaitent la toute proximité de la ville préfecture, plébiscitent Villeneuve-Les-Avignon, sur la rive droite du Rhône, où de belles maisons se vendent de 3000 € à 4800 € le m², avec d’excellentes prestations. Pour les budgets plus sobres, un marché de report s'est développé à l'échelle du Grand Avignon, une agglomération de 450 000 habitants, dans des communes telles que Entraigues-sur-La-Sorgue ou Vedène au nord, Morières-Les-Avignon et Saint-Saturnin-les-Avignon à l'est, et Montfavet au sud. On peut y trouver des biens à 300 000 € sur un terrain offrant une piscine. Les budgets plus modestes s'éloignent à Orange à 25 minutes de route ou à Carpentras, facile d’accès par voie rapide, voire à Cavaillon à 29 km au sud est par l'A7, où les biens les plus vendus sont des maisons de type T4 cédées entre 220 000 € et 230 000 € voire 250 000 € pour une maison habitable des années 80. Des communes comme l’Isle-sur-la-Sorgues ou Pernes-Les-Fontaines attirent une clientèle plus aisée, le prix médian des maisons anciennes tournant autour de 400 000 €. « Ce marché en plein cœur du département a fortement augmenté », constate le notaire.
Le marché du neuf est un peu moins représentatif car la promotion immobilière est en berne du fait de la crise sanitaire, notamment. « Ce marché, plutôt local, est intéressant et représente 350 réservations par an », indique Arnaud Bastide, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) de Provence-Alpes-Côte-d’Azur. A Avignon même, le marché est actuellement en tension faute de biens disponibles. « Il y a 200 lots en cours, soit à peine 6 mois de stock alors qu’il en faudrait 12 sur un marché normal », rappelle le promoteur. La ville centre porte ce marché réalisé à 60 % par des investisseurs vauclusiens avec, sur l’aire avignonnaise. « Le m² moyen actuel est à 3450 € quand il valait 3035 € en 2019 », indique Arnaud Bastide. Soit, en deux ans, une hausse de 14 % sur les prix de réservation. Avec une rentabilité brute de 3,8 %. « Les loyers, eux, n’ont pas pris 14 % en 2 ans », rappelle le promoteur. Le stock qui s’amenuise faute de permis et de ralentissement général, met en tension toute la chaîne. « L’ancien aussi puisque c’est sur ce marché que l’on achète, quand il n’y a pas de logement neuf. »
Des logements collectifs sortent toutefois sur plusieurs ZAC en cours. « Un éco-quartier de 1000 logements est prévu d’ici 10 ans à Joly Jean, au sud est des remparts », annonce Paul-Roger Gontard, adjoint au maire, délégué au développement territorial et urbain et aux grands projets. Eiffage livre le premier programme en 2022. Près de 1000 logements neufs vont aussi sortir de terre quartier Bel Air, et un nouveau secteur va s’ouvrir à l’urbanisation, pour 400 logements, près de la gare de Montfavet. « Le NPNRU[1] en cours à Avignon va s’étaler sur 15 ans et permettre, entre autres, de renouveler un quart des logements de la ville. » Le Plan local d’urbanisme qui devrait être mis en application au 2e semestre, vise la production de 6000 logements par an, neufs ou réhabilités, d’ici 2032. La Ville et l’agglomération du Grand Avignon ont par ailleurs, en 2019, donné le coup d’envoi d’Avignon Confluence, nouveau pôle urbain qui va s’articuler sur une centaine d’hectares, autour de la gare TGV. Il devrait accueillir à terme, 6000 habitants d’ici 15 ans.
Trois questions à Yolande Rouvière, présidente de l’UNPI 84
Comment se porte ce marché et qui le fait ?
Ce marché est plutôt dynamique et de façon constante, malgré les obligations de plus en plus nombreuses qui incombent aux propriétaires. Ceux qui le portent ne sont pas les primo accédants, car le marché immobilier du centre-ville et de sa première ceinture est relativement cher. La clientèle est le plus souvent locale et souvent constituée de propriétaires anciens qui achètent pour louer et se constituer un complément de retraite.
Quelles sont les principales difficultés évoquées par vos adhérents ?
Les personnes qui ont acheté dans une copropriété ne sont pas maîtres de leurs dépenses. Ils sont souvent confrontés à la gestion d’un syndicat et sont amenés à faire des travaux imposés, qu’ils n’auraient pas engagés seuls, le parc immobilier du centre étant souvent vétuste. C’est compliqué, cela revient cher. Les charges de copropriété aussi sont un problème. Sans parler des contraintes toujours plus nombreuses.
Quelle est la réalité du marché locatif avignonnais ?
Avignon est une ville plutôt pauvre, louer à l’année un appartement ancien devient difficile lorsque des logements neufs, achetés en défiscalisation, sont proposés à l’extérieur de la ville. Il faut souvent être prêt à proposer de légères remises, et si l’on n’augmente pas son loyer, les impôts locaux eux, continuent de croître. Il y a par ailleurs un impôt sur les locaux vacants qui incombe aux propriétaires qui ne veulent pas louer mais aussi à ceux qui n’y arrivent pas, qui n’ont pas les moyens de mettre en conformité... Et le nouveau texte sur le Diagnostic de performance énergétique va ajouter de nouvelles contraintes.
Myriem Lahidely, Journaliste
Source : 25 millions de propriétaires • N°560 mars 2022
[1] Nouveau programme national de renouvellement urbain