Le syndic de copropriété dispose d’un pouvoir propre ; il a même l’obligation d’agir en recouvrement des charges impayées par les copropriétaires débiteurs, au nom du Syndicat de copropriétaires (Article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis). A défaut, sa responsabilité pourrait être recherchée.
Il n’a pas besoin d’une autorisation spécifique de l’assemblée générale des copropriétaires (hormis le cas de la mise en place d’une saisie immobilière contre un copropriétaire défaillant pour laquelle une résolution spécifique en assemblée générale est nécessaire).
Le Conseil Syndical peut aussi inciter le syndic de copropriété en cas de carence.
Le Syndic de copropriété doit, en cas de retard ou de carence d’un copropriétaire, adresser une lettre de rappel à ce dernier (ou éventuellement par courrier électronique si le copropriétaire a expressément accepté ce procédé).
Ensuite, il adressera par lettre recommandée avec accusé de réception, une mise en demeure officielle d’avoir à régler sous trente jours les sommes dues. Il précisera qu’à défaut, une procédure de recouvrement pourra être mise en place à son encontre.
Si le copropriétaire n’a toujours pas réglé, une sommation de payer par Huissier de Justice peut éventuellement lui être adressée.
Enfin, avant toute action judiciaire, il peut être envisagé tous les modes de règlement amiables des différends (conciliation, médiation,…). Ceci étant particulièrement vrai lorsqu’il ne s’agit pas d’un « simple impayé » mais que celui-ci est lié à d’éventuelles contestations sur les travaux effectués par la copropriété ... La solution pourrait ainsi être plus globale et éviter un contentieux qui peut parfois s’avéré être lourd et long.
N.B. Un copropriétaire pourrait toujours solliciter des délais de paiement et par exemple un échelonnement de l’arriéré pourrait être mis en place.
En fonction du montant de l’arriéré, de l’urgence à recouvrer ces sommes, de l’état de la copropriété et des moyens à mettre en œuvre, le Syndic de copropriété décidera avec l’aide des professionnels du droit (Avocats, Huissiers de Justice) de l’action en Justice à mettre en place.
Si la créance en principal est inférieure à 10 000 €, le Tribunal d'Instance sera compétent ; pour une créance supérieure, ce sera le Tribunal de Grande Instance.
Une requête aux fins d’injonction de payer peut être déposée auprès du Greffe du Tribunal avec l’intégralité des pièces justifiant de la créance du Syndic.
Si le Juge estime la créance fondée, il rend une ordonnance d’injonction de payer qui sera signifiée au débiteur par Huissier de Justice. Le copropriétaire défaillant peut la contester en formant opposition par une déclaration au Greffe dans un délai d’un mois.
En cas d’opposition par le copropriétaire, le Greffe informe le Syndic et convoque les parties à une audience au fond. Un jugement sera alors rendu selon la procédure classique.
A défaut d’opposition, le Syndic sollicitera l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance et c’est cette décision qui permettra ensuite l’exécution forcée par Huissier de Justice le cas échéant.
S’agissant d’une procédure orale, et sans représentation obligatoire d’Avocat, le Syndic peut faire délivrer par voie d’Huissier de Justice une assignation devant le Tribunal pour demander une condamnation à titre provisionnel à l’encontre du copropriétaire défaillant au paiement des charges impayées. Cependant l’ordonnance de référé ne pourra être rendue qu’en l’absence de contestation sérieuse qui pourrait être soulevée tant par le débiteur que par le Magistrat.
Il s’agit d’une procédure rapide et relativement peu coûteuse, qui permettra le couvrement forcé par l’Huissier de Justice, des sommes visées dans l’ordonnance.
L’ordonnance peut être frappée d’appel mais bénéficiant de l’exécution provisoire de droit, elle peut faire l’objet d’une exécution forcée.
En cas de contestation relevée par le Juge des Référés ou lorsque la créance du Syndicat est susceptible d’une contestation ou bien si une saisie immobilière du lot de copropriété est envisagée, il sera fait le choix d’une procédure au fond : soit devant le Tribunal d'Instance, soit devant le Tribunal de Grande Instance auquel cas la représentation par Avocat sera obligatoire.
Un jugement sera rendu qui peut être susceptible d’appel et il n’est pas forcément assorti de l’exécution provisoire.
La procédure en la forme des référés pour les charges provisionnelles
Il s’agit d’une procédure spécifique, qui était relativement peu utilisée, mais qui va trouver un nouvel essor avec la loi ELAN.
Il peut être alors sollicité la condamnation du copropriétaire à payer ces provisions outre les autres provisions non encore échues à l’issue du délai de 30 jours, après la mise en demeure de régler.
Le Président du Tribunal de Grande Instance du lieu de situation de l’immeuble statue comme en matière de référé et rend une ordonnance qui a la même nature et la même portée qu’un jugement au fond et qui est susceptible d’appel.
Désormais, depuis la loi ELAN, cette « super procédure de recouvrement de charges » concerne :
Le paiement des charges s’impose à tous les copropriétaires sans dérogation possible. Le Syndic doit prouver le caractère certain, liquide et exigible de la dette.
A l’appui de sa demande, le Syndic justifiera en général : des procès-verbaux des assemblées générales pour les exercices concernés par la dette (PV approuvant les comptes ou adoptant le budget prévisionnel de l’exercice à venir), les appels provisionnels trimestriels pour les exercices concernés, les appels de régularisation annuelle des comptes, les décomptes des régularisations annuelles des charges pour les mêmes exercices, un état récapitulatif/décompte détaillé de la créance, les mises en demeure, les notifications du PV d’assemblée générale au copropriétaire défaillant, voire le contrat de Syndic et le règlement de copropriété).
Les charges impayées doivent faire l’objet d’une action en Justice dans un délai maximum de 5 ans (il était de 10 ans avant la loi ELAN).
Il est demandé au Tribunal en général, que le copropriétaire défaillant soit condamné à payer au Syndic différentes sommes :
Les condamnations varient en fonction de chaque dossier, des habitudes des Juridictions compétentes et des demandes formulées par le copropriétaire défaillant.
Le vendeur d’un lot a l’obligation de présenter au Notaire chargé de la vente une attestation du Syndic certifiant qu’il n’a aucune dette à son égard.
A défaut, le Syndic peut obtenir le paiement de ces sommes au moment de la vente en adressant au Notaire une opposition par Huissier de Justice dans un délai de quinze jours de la notification ; elle mentionne les sommes dues au moment de la vente lot par lot, année par année, sachant que le privilège du Syndicat des copropriétaires ne peut aller au-delà de l’année en cours et des 4 années antérieures.
Les sommes ainsi bloquées chez le Notaire seront reversées au Syndic sauf en cas de litige.
Au vu des décisions de Justice obtenues, l’Huissier de Justice peut mettre en place toutes les mesures de recouvrement forcé à l’encontre du copropriétaire défaillant (saisies-attribution de comptes bancaires du débiteur ou des loyers versés en cas de location, saisie-vente des biens mobiliers ou de véhicule, saisies des rémunérations…).
Par contre, s’il est envisagé la saisie immobilière des lots de copropriété du débiteur, une résolution spéciale d’un PV d’assemblée générale de copropriété avec autorisation spécifique pour la saisie immobilière est nécessaire (même parfois pour des sommes relativement faibles par rapport à la valeur du bien).
Il est conseillé de solliciter un Avocat spécialisé pour la rédaction de la clause du PV d’assemblée générale et la mise en place de la saisie immobilière.
A côté des mesures d’exécution forcée, des garanties sur l’immeuble du débiteur peuvent être mises en place en amont par l’Huissier de Justice ou l’Avocat pour obtenir à terme, le règlement des sommes dues.
Me Isabelle Faivre Avocat
Source : 25 millions de propriétaires • N°février 2019
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