Un arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 septembre 2019 remet sur le devant de l’actualité la question de l’encadrement des loyers.
Le dispositif imaginé par la loi Alur pour encadrer les loyers subit donc un nouveau rebondissement.
À la suite d’un recours exercé par l’UNPI afin de contester la légalité de l’arrêté fixant les loyers de référence à Paris, le tribunal administratif de Paris avait annulé cet arrêté. L’argument qui avait motivé la décision est que le texte fixait des loyers de référence pour la seule commune de Paris, alors que, à suivre les textes de la loi Alur, l’encadrement aurait dû s’appliquer pour l’ensemble de l’agglomération.
La décision avait été confirmée par la cour administrative d’appel. Or, en juin dernier, le Conseil d’État, a annulé l’arrêt d’appel. Quelle est alors la situation juridique applicable ?Saisie d’un litige entre un bailleur et un locataire, la cour d’appel de Paris s'est prononcée sur la portée de cette annulation du Conseil d’État :“l’annulation par le Conseil d’État, par arrêt du 5 juin 2019, de l’arrêt de la cour administrative d’appel ayant confirmé l’annulation de l’encadrement des loyers issu de la loi Alur, laisse subsister pour l’heure, la décision initiale du tribunal administratif et, partant, l’annulation de l’encadrement des loyers selon le dispositif issu de la loi Alur, dans l’attente de la décision de la cour administrative d’appel de Paris, devant laquelle l’affaire a été renvoyée.”
En conclusion et considérant qu'il n’est pas possible de préjuger de la décision de la juridiction de renvoi, la cour d’appel de Paris sursoit à statuer jusqu’à ce que la légalité de l’arrêté préfectoral litigieux ait été définitivement tranchée par la juridiction administrative.(CA Paris, 13 septembre 2019).
En conclusion, pour les baux qui ont été conclus, sous l’empire de la loi Alur et avant la mise en œuvre du nouvel encadrement des loyers issu de la loi Élan, les loyers ne font plus l’objet d’encadrement… dans l’attente de la décision de la CAA de renvoi. Par ailleurs, en application de la loi Élan de novembre 2018, et après parution de nouveaux textes d’application, l’encadrement est à nouveau entré en vigueur à Paris le 1er juillet 2019.
Rappelons en effet que la mairie de Paris ayant, en application de la loi Élan, demandé l’application de l’encadrement dans la capitale, deux textes ont été publiés :
Sur le fond, et dans le cadre du dispositif de l’encadrement, le bailleur avait pratiqué un complément de loyer. Ce dispositif est expressément prévu par la loi Alur et désormais par la loi Élan (art. 140). Il permet de dépasser le loyer de référence majoré “pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique”.
Mais la loi ne précise pas les caractéristiques justifiant le complément de loyer.
Dans cette affaire, le bailleur avait justifié le complément de loyer par la présence d’une cuisine aménagée et équipée, de parquets en points de Hongrie en chêne, et d’une cheminée en marbre.La cour d’appel ayant sursis à statuer, elle ne s’est pas prononcée sur cette question. La question reste donc à trancher…
Rappelons que la version d’origine de la loi Alur prévoyait des caractéristiques “exceptionnelles” pour justifier un complément de loyer mais que le Conseil constitutionnel avait censuré le mot “exceptionnel”.
Sous réserve de l’interprétation des tribunaux, on peut penser que la seule présence des éléments mentionnés dans cette espèce ne paraissent pas justifier le complément de loyer car ils sont communs à de très nombreux appartements parisiens.
Toutefois, tout dépendra du sens que voudront bien donner les tribunaux à cette expression…
Dans les baux d’habitation, la sous-location est en principe interdite, sauf accord du bailleur (art. 8 de la loi du 6 juillet 1989).
Quelles sanctions encourt le locataire s’il passe outre à cette interdiction ?Le bailleur peut se prévaloir de cette infraction aux clauses du bail et obtenir la résiliation du contrat (Civ. 3e, 22 avril 2002).
Mais une autre sanction peut aussi être appliquée, comme vient de l’indiquer un arrêt de la Cour de cassation, à l’encontre d’un locataire à Paris, qui avait mis son appartement en location pour des séjours touristiques via Airbnb.Le logement avait été vendu et l’acquéreur, apprenant cette irrégularité, avait demandé au locataire de lui rembourser les sous-loyers indûment perçus. La cour d’appel l’avait condamné, et la Cour de cassation a confirmé la décision, au motif que “les sous-loyers perçus par le preneur constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire”. (Civ. 3e, 12 septembre 2019).
La règle ne s’applique pas bien sûr si la sous-location a été autorisée par le propriétaire.Le bailleur dispose donc d’une arme très efficace pour interdire à son locataire de sous-louer ; l’informer que la sanction est l’obligation de lui rembourser les sous loyers qui seraient perçus en violation de l’interdiction.
Cet arrêt est aussi un argument que pourront brandir les communes qui luttent contre les locations touristiques excessives…