La hausse des taxes foncières est importante et parfois excessive, comme le montre le cas de Grenoble, mais elle n’est pas inéluctable. La signature de chartes avec les élus est un bon moyen d’inciter les communes à plus de modération dans la pression fiscale.
La présentation par l’UNPI ce 14 octobre de l’observatoire des taxes foncières montre que la hausse des taxes foncières est importante.
Mesurée sur 5 ans, la taxe foncière a progressé en 5 ans de plus de 10 % (+10,8 % de 2013 à 2018) alors que l’inflation a été très limitée sur cette période (+3,8 %) et les loyers encore plus sages (+2,3 %).
Sur dix ans, l’écart est plus net encore : les taxes foncières se sont envolées de plus d’un tiers (+34,7 %) alors que l’inflation était sous la barre des 10 % (+9,9 %) ainsi que les loyers (+9,3 %).
Si on s’attache à l’analyse de la part départementale de la taxe foncière, on constate qu’en 2018, le taux moyen d’imposition était de 19,70 % et que cette part a augmenté en 5 ans de +10,63 %. La hausse sur dix ans est de +39,5 %. Trois départements ont plus que doublé leur imposition en dix ans : Paris (+247,94 %), le Val d’Oise (+118,79 %) et les Yvelines (+114,37 %).
Dans les grandes villes, le taux moyen d’imposition est de 43,19 % en 2018.L’imposition en 5 ans a progressé en moyenne de +10,8 %. Deux villes affichent des progressions dépassant le seuil de 20 % : Lille (+23,81 %) et Nice (+23,15 %). À l’inverse, 5 villes sont sous la barre des 5 % (Amiens, Nancy, Le Havre et Saint Étienne). Caen est la ville la plus vertueuse, sa hausse est de +2,12 %.
Pour 2019, la hausse de la part départementale de la taxe foncière est de 2,23 %, principalement due à la valorisation de 2,20 % des valeurs locatives. La plupart des départements n’ont pas fait évoluer leur taux. Deux départements toutefois les ont augmentés : Les Lande (+17,50 %) et les Ardennes (+3,24 %) ; en Corse du Sud la hausse est liée à un ajustement des taux avec la Haute Corse, dans le cadre du regroupement des deux départements. En Haute Corse, la hausse est de +0,89 %. Trois départements font preuve de modération et diminuent leur taux. Parfois de façon insuffisante comme dans le Bas-Rhin (+2,12 %) pour compenser la hausse des valeurs locatives mais suffisamment pour permettre une baisse de la fiscalité dans le Morbihan (-0,38 %), les Alpes Maritimes (-2,90 %) et les Deux Sèvres (-3,14 %).
Dans les grandes villes de France, Vitry-sur-Seine est la seule ayant augmenté son taux communal. Pour Aix et Poitiers, c’est la hausse du taux intercommunal qui explique la progression de la taxe.
Quant à Strasbourg, le relèvement du taux de la taxe spéciale d’équipement annule la baisse du taux départemental.Dans trois villes, Perpignan, Bordeaux et Caen, la baisse du taux communal ne permet pas de compenser totalement la majoration de 2,2 % des valeurs locatives (voir tableau).
Sur dix ans, la hausse des taxes foncières dans les grandes villes est en moyenne de +34,9 % (dont +14,6 % liée à la hausse des valeurs locatives). 5 villes dépassent 50 % de hausse, Paris en tête avec une augmentation de +80,9 %, suivie par Argenteuil (+64,0 %), Nantes (+54,90 %) ; Saint-Denis (+54,80 %), et Nice (+52,20 %). Aix en Provence affiche la hausse la plus modérée avec +17,9 %.
De très nombreux contribuables de Grenoble ont reçu un courrier de l’administration fiscale leur annonçant une revalorisation des bases. L’UNPI a obtenu la communication d’une centaine de ces lettres dont il ressort une hausse moyenne de +13 % des taxes. Le directeur départemental des finances publiques a reconnu que 100 000 courriers avaient été adressés en Isère, à la demande des élus locaux. Le ministère de l’action et des comptes publics a quant à lui indiqué que 134 000 courriers avaient été adressés, aux contribuables mais… pour l’ensemble du pays.
La taxe foncière à Nice a chuté de -4,5 % en 2019. Cette situation s’explique car en 2018, la taxe foncière avait fortement progressé en raison d’un nouveau prélèvement en faveur de la métropole. À la suite de l’action déterminée de l’UNPI des Alpes-Maritimes, le maire de la ville, Christian Estrosi avait signé le 23 octobre 2018 une “charte d’engagement” par laquelle il s’engageait à baisser le taux communal. Cet engagement a été tenu puisque le taux a baissé de plus de deux points. Les habitants de Nice ont en même temps profité d’une baisse du taux départemental.
Christophe Demerson a en conséquence appelé l’État et les collectivités territoriales, via leurs associations, à conclure un pacte de fiscalité avec les propriétaires.
Il n’est plus possible en effet que les propriétaires soient ainsi tenus d’assumer les ajustements budgétaires des collectivités. Il faut aussi un gel de la revalorisation générale annuelle des bases, qui n’est plus adapté dans un contexte d’inflation quasi inexistante.
Bertrand Desjuzeur