Le régime juridique et fiscal de la location saisonnière

LÉGISLATION/RÉGLEMENTATION - Longtemps considérée comme l’un des éléments essentiels d’une stratégie d’investissement patrimonial, la location saisonnière est aujourd’hui attaquée de toutes parts. Il est plus que jamais nécessaire de maitriser le régime juridique qui lui est applicable tant les contraintes règlementaires se sont accumulées ces dernières années.

Que recouvre la notion juridique de « location saisonnière » ?

L’appréhension globale du régime juridique de la location saisonnière reste un exercice malaisé. Il n’en existe pas de définition légale unifiée. Cette notion est appréhendée par divers dispositifs législatifs venant lui rattacher des régimes variés.

Certaines caractéristiques se détachent plus nettement de l’analyse de ces dispositifs : il s’agit de la mise en location de locaux à usage d’habitation, meublés, ne constituant pas la résidence principale du locataire. Mais en pratique, ce qui la caractérise c’est sa durée : les locaux sont donnés à la location pour de courtes durées.

C’est bien parce que cette activité est accusée de faire sortir un nombre important de logements du parc de biens immobiliers à usage d’habitation que le législateur a entendu l’encadrer strictement, sinon en restreindre le développement.

C’est cette caractéristique qui a justifié la création d’un certain nombre de régimes juridiques spécifiques à la location saisonnière.

Les démarches préalables à la mise en location saisonnière

L’immatriculation de l’activité

Une déclaration de création d’activité doit être souscrite dans les 15 jours qui suivent la date de début de l’activité de location saisonnière.

Depuis le 1er janvier 2023 cette démarche doit être exclusivement réalisée en ligne, via le guichet unique des formalités des entreprises, sur le site de l’INPI.

Attention, il est primordial de faire démarrer l’activité à la date d’acquisition du local donné en location sous peine de ne plus pouvoir déduire les frais d’acquisition du bien.

La vérification du règlement de copropriété

Pour les locaux situés dans des immeubles d’habitation, il est nécessaire de vérifier que le règlement de copropriété permet la mise en location saisonnière du logement.

En toute hypothèse, il reste préférable de sensibiliser les locataires sur les règles applicables à la copropriété, notamment en termes de nuisances sonores.

Les démarches administratives préalables

Outre une déclaration préalable de mise en location obligatoire dans la grande majorité des cas, une autorisation liée au changement d’usage du local est requise dans les communes de plus grande taille.

Pour rappel le changement d’usage s’entend de la location d’un « local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile » (c. de la construction et de l’habitation, art. L631-7).

L’obtention de cette autorisation peut être conditionnée à la mise en place d’une compensation : le propriétaire doit pouvoir justifier de la transformation d’un autre local, affecté à un usage autre que l’habitation, en un logement, ce qui s’évèrera impossible dans la grande majorité des cas.

Par ailleurs, une obligation déclarative renforcée donnant lieu à enregistrement est applicable dans ces mêmes communes.

Lorsque l’activité de location porte sur un logement constituant la résidence principale du bailleur (c’est-à-dire un logement occupé au moins huit mois par an) et que ce logement est donné en location moins de 4 mois par an, les conditions de location sont plus souples.

Le régime administratif applicable à la location saisonnière est résumé dans le tableau ci-dessous :

La délégation de l’application de la réglementation aux plateformes numériques

En pratique le contrôle du respect de la règlementation par les loueurs à été mis à la charge des plateformes numériques :

  • Obligation d’information des loueurs de leurs obligations administratives préalables – la mise en ligne de l'annonce de location est conditionné à l’obtention d’une déclaration sur l'honneur attestant du respect de ces obligations.
  • Obligation de communication, sur simple demande des communes, du nombre de jours au cours desquels le meublé a fait l'objet d'une location par leur intermédiaire
  • Obligation de s’assurer que le propriétaire n’offre plus à la location un logement déclaré comme résidence principale lorsque ce meublé a été loué plus de cent vingt jours au cours d'une même année civile.

Ces obligations sont assorties d’amendes pouvant aller jusqu’à 50 000 euros par logement en cas de manquement.

La mise en location du bien 

Les caractéristiques minimales d’un logement donné en location saisonnière

La location saisonnière n’est pas concernée par les normes de décence applicables aux locations longues durée (décret n°2002-120 du 30 janvier 2002).

Néanmoins, lorsque le bien ne satisfait pas à un état normal de décence et qu’il n’est pas équipé des éléments mobiliers indispensables à l’habitabilité minimum du logement, le locataire peut refuser de prendre possession des lieux et être indemnisé.

En pratique : afin d’éviter toute problématique liée à l’inexécution contractuelle, il est recommandé de mettre à disposition des locaux répondant aux critères de décence applicables aux locations d’habitations principales et disposant d’un ensemble mobilier suffisant pour permettre au locataire de dormir, manger et vivre convenablement dans le logement. A cet égard il peut être utile de se référer à la liste établie par l’article 2 du décret 2015-981 du 31 juillet 2015.

La contractualisation de la relation avec le bailleur

C’est ici le droit commun du louage, bien plus libéral que celui de la location meublée à titre de résidence principale, qui s’applique (c. civ. Art. 1714 et s.).

Bien qu’un contrat écrit reste obligatoire et que certaines mentions doivent impérativement y figurer (coût total de la location, montant de la taxe de séjour, durée du séjour, dates d’arrivée et de départ, conditions de paiement, superficie habitable, etc…), ce régime est extrêmement souple. Notamment la fixation du montant du loyer et de la durée du bail est libre. La réalisation d’un état des lieux n’est pas non plus obligatoire, même si cela est fortement recommandé.

Bien entendu, la signature du bail peut se faire par signature électronique dont la valeur juridique est désormais identique à celle de la signature manuscrite.

La fiscalité applicable

L’imposition des loyers

Le principe général, énoncé par l’article 35, I, 5° bis du CGI, est ici l’imposition des revenus de l’activité de location saisonnière dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (ci-après « BIC ») en raison de sa nature commerciale. Peu importe à cet égard que la location soit réalisée ou non de façon habituelle. 

Le régime micro-BIC est applicable dès lors que le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 77 700 € HT : l’impôt est calculé sur la base des loyers perçus après application d’un abattement de 50 %.

Au-delà de ce chiffre d’affaires, ou sur option du bailleur, c’est le régime réel qui s’applique. C’est ici que le régime de la location meublée prend tout son intérêt puisqu’il permet non seulement d’imputer sur les loyers les charges de la propriété (notamment les frais d’acquisition et les intérêts d’emprunt), mais surtout d’amortir le bien.

En pratique : il sera souvent plus intéressant d’opter pour le régime réel, seul régime permettant de dégager un résultat fiscal déficitaire. Ce déficit fiscal est reportable sur une période de 10 ans en régime LMNP, mais seulement sur des revenus de même nature.

Le principe d’exonération de la TVA 

L’activité de location meublée est par principe exonérée de TVA. Il n’en va autrement que lorsque des prestations de services accompagnent la location.

Les taxes locales

Les loueurs de meublés en saisonnier sont assujettis à la CFE, sauf exonération en cas de location de la résidence principale. Dans cette dernière hypothèse la taxe d’habitation est due.

Par ailleurs les loueurs doivent collecter la taxe de séjour dont le tarif exact est fixé par délibération du conseil municipal. Le classement des logements en meublés de tourisme permet de bénéficier d’un tarif spécifique plus avantageux.

 

Par Kevin Lannuzel, avocat

Source : 25 millions de propriétaires et vous • N°574 ; juin 2023

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