Les propriétaires doivent être considérés comme des investisseurs économiques à part entière !
25 Millions de propriétaires donne la parole à des responsables politiques ou issus de la société civile. Ce mois-ci, Yves Censi, ancien député de l’Aveyron auteur de la loi Censi-Bouvard, intervient. Réagissez et écrivez-nous sur les réseaux sociaux @UNPI_FR @unpinationale #proprios
Aucun acteur économique – particulièrement dans l’immobilier locatif privé – ne peut se désintéresser de l’utilité de sa contribution au financement des
politiques publiques ... à condition qu’il les juge globalement efficaces et favorables à l’intérêt général ! C’est là que le bât blesse. Les responsables politiques font appel au sens de la responsabilité des... citoyens pour compenser une action publique jugée inique ou inefficace : on se souviendra de l’appel public à abaisser les loyers, lancé aux propriétaires consécutivement à la diminution les APL. De même, l’injonction de confiance adressée aux petits investisseurs immobiliers relève de la pensée magique : la confiance ne se décrète pas, c’est au Gouvernement et au législateur d’en créer les conditions. Or, ces dernières ne sont pas réunies.
La réalité est que depuis la crise des subprimes et des dettes souveraines survenues entre 2007 et 2011, l’Etat et les Gouvernements paraissent n’avoir qu’une obsession : éponger les déficits publics par des mesures fiscales dites de rendement afin d’accroître les recettes de l’Etat. Entendons par là : rendement immédiat. Les réformes de l’Etat par la baisse de la dépense publique (« dépenser mieux pour dépenser moins ») paraissent un lointain souvenir en regard de la forte inflation fiscale qui est venue contrarier les avantages de la faiblesse des charges d’intérêt, au risque que les sources de richesse ne se tarissent elles-mêmes (en matière de placements, les rendements de l’impôt sont toujours neutralisés par les transferts d’investissements sur les secteurs moins taxés). Cette obsession, hélas, ne laisse plus beaucoup de place aux mesures efficientes de pilotage de l’économie du logement durablement créatrices de valeur. Par contre, elle crée de l’instabilité juridique et fiscale et de la complexité : ce couple délétère qui brise la confiance.
Mettons en vis à vis les placements préférés des Français : l’immobilier et les produits d’assurance-vie (cette dernière représentant environ 40% des actifs mobiliers, le reste se partageant entre les actions et les produits d’épargne dits règlementés). Qu’observons-nous ? Curieusement, les propriétaires ne sont plus considérés par la puissance publique comme des investisseurs, mais comme des rentiers renvoyés de facto à une France du XIXème siècle. Pourtant, la rente est définie en économie comme étant « sans risque et sans effort », ce qui s’applique très mal à l’investissement dans la pierre en regard de la majorité des produits d’épargne. L’effort financier et personnel consacré à l’entretien, aux normes, aux diagnostics et à la gestion, a fortiori locative, y est notamment incomparable. Hélas, le dénigrement politique des propriétaires est toujours annonciateur d’un orage fiscal imminent. La création de l’IFI, les malus écologiques et la menace d’une augmentation des DMTO en sont une traduction concrète.
On notera que les professionnels de l’immobilier font l’objet de la même critique à charge, trop souvent désignés comme étant, avec les propriétaires, responsables des hausses de la part du logement dans les dépenses des ménages. En somme c’est tout un secteur qui serait, contre toute logique, considéré comme stérile et improductif ! Or, à y regarder de plus près, l’augmentation des loyers au cours des vingt dernières années n’est que peu supérieure à l’inflation (30%), tandis que les prix à l’achat ont plus que doublé. Ainsi les fausses solutions d’encadrement des loyers et de limitation des honoraires des commercialisateurs de biens défiscalisés aboutissent en fait à raréfier les capacités d’investissement et d’entretien. Quant au rendement net immobilier, il stagne aujourd’hui autour de... 1%.
Pourtant, la filière représente environ 10% du PIB national sans intégrer les marchés indirects. Elle n’est pas délocalisable. La pénurie de construction demeure un enjeu national considérable. L’appel aux financements privés dans le logement et les résidences reste une solution pertinente, dans un contexte de pénurie d’argent public. Autant de raisons qui militent en faveur d’une reconnaissance de la valeur économique des propriétaires.
La dynamique d’un placement est motivée par deux facteurs : la confiance et la juste rémunération d’un risque mesuré. Depuis toujours, les Français se détournent des placements à risque. Il est certain que le financement d’une Start up Nation ne se fera pas à marche forcée en voulant transférer les investissements d’un marché immobilier inutilement maltraité vers n’importe quelles valeurs mobilières ! Ce serait une situation perdant-perdant.
Yves Censi
Ancien député de l’Aveyron auteur de la loi Censi-Bouvard