Protéger les bailleurs pour favoriser les locataires
Que l’on soit d’accord ou non avec ce gouvernement, il faut lui reconnaître une véritable cohérence dans son action avec la libération de pans entiers de notre économie. Malheureusement, et sans que je puisse me l’expliquer, dès qu’il s’agit d’immobilier, il en va différemment.
Dans le projet de loi ELAN, on voit même resurgir le dispositif d’encadrement des loyers ! L’idée d’encadrer les loyers lors de la mise sur le marché du bien ou encore de maîtriser la hausse du loyer à la relocation peut paraître séduisante. Mais la vraie question que le gouvernement ne s’est pas posée est de savoir si, dans les faits, cette mesure sera réellement efficace pour les locataires. Le bon sens et l’expérience me permettent de répondre catégoriquement non.
Les conséquences de cette mesure, mise en oeuvre à plusieurs reprises dans notre histoire, sont connues et toujours catastrophiques : fuite des investisseurs donc diminution des logements disponibles pour les locataires,
parallèlement, un parc locatif qui se dégrade compte tenu de la baisse de la rentabilité et un IRL systématiquement appliqué alors que ce n’est pas nécessairement le cas quand les loyers sont libres.
Le triptyque " taxation, réquisition et encadrement " porté par certains est mortifère pour le marché locatif. Nous l’avons observé précisément dans nos chiffres : il a eu des conséquences immédiates avec un départ massif des investisseurs et une chute du nombre d’acquisitions réalisées à titre d’investissement locatif.
Sachons tirer des leçons de nos erreurs passées ! Aujourd’hui, tout le monde s’accorde pour déplorer le retrait du marché des investisseurs institutionnels, les " Zinzins ", qui proposaient, notamment à Paris et en Île-de-France, des loyers modérés. Pourquoi regretter ce désengagement et proposer un mécanisme qui aura les mêmes conséquences sur les investisseurs privés ?
J’ai un rêve : qu’un jour, les Politiques fassent confiance aux propriétaires bailleurs et qu’ils ne les considèrent plus seulement comme des vaches à lait. Parfois, il faut revenir aux fondamentaux : pour qu’un locataire ait un logement, il faut qu’il y ait un bailleur.
Aujourd’hui en France, le parc locatif repose essentiellement sur les particuliers (96 % selon l’ANIL). Il est donc grand temps de les considérer davantage comme des partenaires et se poser les bonnes questions. Qu’est-ce qui aujourd’hui décourage un bailleur à louer son bien alors qu’il pourrait en tirer un revenu complémentaire ? Je suis persuadé que pour doper l’offre locative en France, il faut bannir l’encadrement des loyers, cesser les effets d’annonces erratiques mais au contraire miser sur la pérennité des dispositifs et rééquilibrer les rapports locatifs en accélérant les procédures contre les locataires de mauvaise foi.
Les bailleurs ont besoin de considération, de soutien et de respect. Ils sont les maillons essentiels du lien social sur notre territoire et offrent des solutions de logements à des ménages qui, pour des raisons pratiques ou économiques, ne peuvent pas acheter mais ne peuvent pas non plus compter sur l’offre publique de logements. En France, le logement est considéré comme le temple de la famille, ce n’est pas un simple actif même s’il joue un rôle moteur pour l’économie. En 2017, la France consacre 41,9 milliards d’euros d’aides pour le logement – dont la majorité pour les APL – alors que les recettes fiscales générées par l’immobilier ont atteint 73 milliards soit un solde positif de près de 33 milliards. Malgré ce constat, je n’ai jamais demandé d’argent public pour soutenir le marché immobilier de l’ancien, en revanche je dis qu’il est urgent de restaurer la confiance des propriétaires.
En résumé, si le gouvernement souhaite augmenter l’offre locative pour répondre aux besoins des locataires – et je ne partage pas cet objectif - il a deux voies à suivre : sécuriser les bailleurs pour que leurs biens soient mis sur le marché et encourager la construction pour développer une nouvelle offre.
Laurent Vimont
Président de la filiale française du groupe immobilier Century 21