Fiscalité des propriétaires : une hausse sans fin ?
Votre magazine donne la parole à des responsables politiques ou issus de la société civile. Dans ce numéro, Virginie Pradel, avocat fiscaliste, Présidente de l’institut de recherche fiscale et économique Vauban, prend la parole. Réagissez et écrivez-nous sur les réseaux sociaux @UNPI_FR @unpinationale #proprios.
A n’en pas douter, les propriétaires sont parmi les malheureux boucs émissaires fiscaux du quinquennat Macron. Ceux que notre président, son gouvernement et sa majorité qualifient à l’envi de « rentiers » voient en effet les mauvaises nouvelles s’enchaîner. Après l’annonce d’une possible nouvelle hausse des droits de mutation, de l’instauration d’un bonus-malus en fonction de la déperdition énergétique, de la révision des valeurs locatives, du maintien de la taxe d’habitation pour les 20 % de Français les plus «aisés» (dont une majorité est propriétaire), notre président s’est récemment déclaré séduit par l’idée d’imposer certaines plus-values immobilières sur les résidences principales, tandis que le délégué général de LREM, Stanislas Guérini, a réclamé une hausse de l’IFI et de l’impôt sur les successions pour les « gros patrimoines ». Or, ce dernier impôt vise aussi l’immobilier.Une question s’impose : pourquoi nos dirigeants sont-ils autant obnubilés par la hausse des impôts sur l’immobilier alors que la France est déjà championne d’Europe des prélèvements «récurrents» opérés sur les propriétaires ? Selon Eurostat, ces derniers ont représenté plus de 7 % des prélèvements globaux opérés en 2016 (soit plus de 72 milliards d’euros), contre 3,4 % en moyenne dans la zone euro et seulement 0,8 % en Allemagne (soit environ 13 milliards d’euros).
Pour rappel, s’agissant de la taxe foncière, le taux moyen de prélèvement (rapport entre le total des cotisations émises, y compris les taxes annexes, et les bases nettes communales) a flambé, selon les statistiques de la DGFIP, de 10 points en 13 ans passant d’environ 37% en 2004 à près de 47% en 2017. Résultat : entre 2004 et 2017, les recettes de la taxe foncière ont flambé de près de 20 milliards d’euros (+ 87 %).
Autre hausse notable : celle de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (teom), des droits d’enregistrement lors de l’acquisition d’un bien immobilier « ancien » (leur taux global est passé de 5,09 % du prix de vente à 5,80 % dans la quasi-totalité des départements), des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine immobilier (leur taux global est passé de 0,5% en 1996 à 17,2% en 2018) et de la surtaxe d’habitation instaurée en 2015. Son taux est passé en 2017 de 20% à 60% dans plusieurs communes telles que Paris ou Nice. Sans oublier l’instauration dans plusieurs centaines d’intercommunalités en 2018 de la taxe Gemapi (dite taxe « inondation ») qui peut s’élever jusqu’à 40 euros par habitant. Sans oublier également l’instauration de l’IFI et ses conséquences : une focalisation accrue de l’administration sur le patri- moine immobilier et un risque corrélativement plus élevé de revalorisation de ce dernier. En somme, la fiscalité des propriétaires est déjà confiscatoire : gageons donc que nos dirigeants ne l’augmenteront pas encore davantage d’ici à la fin du quinquennat.
Virginie Pradel
Avocat fiscaliste, Présidente de l’institut de recherche fiscale et économique Vauban