Prélèvement à la source, établir son revenu net foncier en 2018-2019

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Sous réserve de modification législative, réglementaire ou jurisprudentielle.


Le prélèvement à la source (PAS) de l’impôt sur le revenu soulève beaucoup de questions de la part de nos concitoyens. Concernant plus particulièrement les propriétaires bailleurs, s’ils n’ont pas compris les règles de déduction des charges/travaux suite à la mise en place du PAS, ils ont rapidement convenu qu’ils n’allaient pas en faire en 2018 et 2019, et qu’ils seraient prudents en 2020.

Afin d’éviter certaines aubaines fiscales tout en laissant la possibilité de déduire les travaux, les services de Bercy ont imaginé différents types de charges/travaux : pilotables, récurrents, et d’urgence. Ils ont aussi mis en place le critère de « date d’exigibilité », et la règle dite « de la moyenne ». Essayons de comprendre suite à la parution des notices du bulletin officiel des finances publiques (BOFiP)[1].

 

  • Dans quels cas sont applicables les règles à suivre ?

Les dispositions du PAS applicables aux revenus nets fonciers ne s’appliquent que si le contribuable est soumis au régime réel d’imposition. Sont donc exclus les contribuables qui ont opté pour le régime « microfoncier » avec l’abattement forfaitaire de 30%.

  • Quelles sont les charges concernées ?

Les règles applicables pour le prélèvement à la source viennent déroger au droit commun pour la détermination des revenus nets fonciers pour 2018 et 2019. Deux types de charges sont alors à distinguer selon leur nature « récurrente » ou « pilotable ».

Les charges « récurrentes »

Elles regroupent « les charges de la propriété que le bailleur doit chaque année à raison du bien loué » et sur lesquelles « il ne peut en principe pas influer ». Deux critères sont retenus : le caractère périodique de la charge, mais aussi l’absence de maîtrise de la date d’échéance de la dette en découlant. Ainsi, une liste limitative a pu être dressée :

  • les primes d’assurances ;
  • les provisions pour dépenses, comprises ou non dans le budget prévisionnel de la copropriété, et diminuées des provisions déduites l’année précédente (qui correspondent à des charges non déductibles) ;

Cas des cotisations obligatoires du fond travaux : elles ne sont pas incluses dans les provisions visées par l’article 31 du CGI et ne sont donc pas concernées par les dispositions dérogatoires présentes.

  • les impositions, autres que celles perçues par les collectivités territoriales (taxe annuelle sur les bureaux, les locaux commerciaux et de stockage en Île-de-France, exclues) ;
  • les intérêts des dettes ;
  • les frais de rémunération des gardiens et concierges, des frais de procédure et des frais d’honoraire versés à un tiers pour la gestion des immeubles ;
  • les dépenses supportées par un fonds de placement immobilier au titre des frais de fonctionnement et de gestion de celui-ci.

Les charges « pilotables »

Elles s’entendent comme des dépenses de travaux dont le bailleur maîtrise le calendrier de réalisation et l’année d’imputation. Il s’agit alors, à l’exclusion des travaux de construction, reconstruction et agrandissement, de :

  • dépenses de réparation et d’entretien ;
  • dépenses d’amélioration des locaux d’habitation ;
  • dépenses d’amélioration des locaux commerciaux ou professionnels aux fins de protection contre l’amiante, d’accueil de handicapés.

Cependant, les dépenses d’amélioration, de construction, de restauration ou d’entretien spécifiques aux propriétés rurale (Cf. art 31 CGI) sont acceptées.

  • Quelles sont les modalités de déduction pour 2018 et 2019 ?

Les charges de la propriété sont en principe déduites intégralement au titre de leur paiement effectif par le contribuable, quel que soit l’exercice rattaché. Cependant, par dérogation, les modalités de déduction diffèrent de cette règle de droit commun, selon le caractère « récurrent » ou « pilotable » des charges concernées.

Dérogations pour les charges « récurrentes » de 2018

Une charge foncière afférente à une dette dont l’échéance normale intervient au cours de l’année 2018 ne peut être déduite que pour la détermination du revenu net foncier imposable de l’année 2018. C’est la date d’échéance de la dette, c’est-à-dire son exigibilité légale ou conventionnelle, qui compte et non son paiement effectif.

Prenons le cas d’une prime d’assurance dont l’avis d’échéance mentionne l’année 2018 : elle ne peut être déduite que pour l’exercice 2018, même si le paiement effectif est réalisé en 2017

Ex : prime d’assurance de 100 €, avis reçu le 12 décembre 2017, échéance mentionnée : 5 janvier 2018 pour une période d’assurance allant du 5 janvier 2018 au 5 janvier 2019.
  • Que le paiement soit réalisé en décembre 2017 ou en janvier 2018, la déduction se fera au titre de l’exercice 2018.

 

De même, pour les appels de fonds d’une copropriété dont la date d’exigibilité a été fixée par l’assemblée générale : si un propriétaire bailleur reçoit en septembre 2018 un appel de fonds pour le 4e trimestre 2018, et dont l’exigibilité a été fixée au 1er octobre 2018, la déduction doit être faite au titre de l’année 2018 quand bien même le bailleur n’a payé qu’en janvier 2019.

Selon les mêmes principes, il n’est pas tenu compte de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie, mais bien sa date d’exigibilité ; les intérêts d’emprunt sont déduits selon la date figurant sur l’échéancier du prêt ; la déduction des frais d’administration et de gestion s’appuie sur le contrat remis au contribuable (mandat de gestion locative, convention d’honoraires, etc.)

Dérogations pour les charges « pilotables » en 2019, directement supportées par le contribuable [2]

Remarque préliminaire : la déduction des charges pilotables en 2018 s’opère selon les conditions de droit commun pour la détermination du revenu net foncier.

  • Principe

Les charges pilotables précédemment listées s’apprécient globalement sur les années 2018 et 2019 en effectuant une moyenne des montants de charges déductibles sur ces deux années. C’est la règle de la moyenne :

« Le montant des dépenses de travaux admis en déduction pour la détermination du revenu net foncier imposable de l’année 2019, est égal à la moyenne des charges de l’espèce respectivement supportées au cours des années 2018 et 2019 ».

  • Attention : ces dispositions s’appliquent bien locatif par bien locatif.

Ex : Un propriétaire bailleur paye en 2018 des travaux de réfection de la toiture d'un immeuble locatif pour un montant total de 30 000 € et en 2019 des travaux de ravalement sur ce même immeuble pour un montant de 15 000 €.

Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2018, le contribuable peut déduire la totalité de la dépense, soit 30 000 € (application du droit commun). Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2019, le contribuable peut déduire une charge de 22 500 €, correspondant à la moyenne des dépenses de travaux payées au cours des années 2018 et 2019 [(30 000 + 15 000) / 2].

Ainsi, une partie des travaux est bien perdue par le bailleur. Cependant, par l’effet des déficits reportables, la situation peut être tirée à l’avantage de ce dernier lorsque les charges de l’année 2018 sont 2 fois supérieures aux revenus fonciers + 10 700 € (Cf. n° mars 25 Millions de Propriétaires).

  • Exceptions 

Dans certains cas, la règle « de la moyenne » ne s’applique pas afin de tenir compte de la situation du contribuable. Ainsi, pour l’année 2019, sont intégralement déductibles :

  • les travaux d’urgence : force majeure (catastrophe naturelle, vandalisme, appareil dysfonctionnant ne permettant plus la location du bien, etc.) , décision d’office du syndic, suite d’une décision de justice (ex : arrêté de péril) ;
  • les travaux effectués sur un immeuble classé ou inscrit en 2019 au titre des monuments historiques ;
  • les travaux effectués sur des immeubles acquis en 2019
Ex : Un bailleur paye en 2018 des travaux d'isolation thermique sur un premier immeuble locatif pour un montant de 6 000 €. Sur ce même immeuble, 4 000 € de dépenses correspondant à des travaux ne présentant pas un caractère d'urgence sont par ailleurs réalisées au cours de l'année 2019.

Ce contribuable acquiert un second immeuble en mars 2019, qu'il met en location dès le mois de juin 2019, après avoir réalisé et payé 4 000 € de divers travaux. Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2018, le contribuable peut déduire la totalité de la dépense, soit 6 000 € (application du droit commun) au titre du premier immeuble locatif. Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2019, le contribuable peut déduire :

  • au titre du premier immeuble locatif : une charge de 5 000 €, correspondant à la moyenne des dépenses de travaux payées au cours des années 2018 et 2019 [(6 000 + 4 000) / 2]
  • au titre du second immeuble locatif : une charge de 4 000 €, correspondant à la totalité des dépenses de travaux payées sur ce bien acquis en 2019.

Ainsi, le PAS génère une forte injustice : la perte de travaux déductibles par la règle « de la moyenne ». L’inintelligibilité de l’impôt pour les contribuables bailleurs va créer un double risque : la chute des travaux dans le parc immobilier, et donc sa paupérisation, et une baisse d’activité pour les artisans. Rappelons que l’observatoire CLAMEUR en février 2018 annonçait une chute à 14% des travaux à la relocation du parc privé. Inquiétude qui risque de s’amplifier dès 2019. 

 

[1] BOI-IR-PAS 50-20-10-20180704

[2] Le cas des charges pilotables supportées par l’intermédiaire des provisions pour charges de copropriété ne sera pas traité ici.


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