Il existe désormais plusieurs moyens de partager son logement, que l’on soit propriétaire occupant ou locataire. Citons la colocation, instituée par l’article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989, mais également la mise à disposition par un propriétaire d’une partie de sa résidence principale (en meublé ou non) ou encore, la location touristique temporaire, type « Airbnb ». Nous envisagerons ici essentiellement deux autres modes de partage du logement : la sous-location classique et la sous-location issue du nouveau contrat de cohabitation intergénérationnelle et solidaire instauré par la loi E.L.A.N. du 23 novembre 2018.
En vertu de l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989, « le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement, sauf avec l’accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer. Le prix du loyer au mètre carré de surface habitable des locaux sous-louer ne peut excéder celui payé par le locataire principal. Le locataire transmet au sous-locataire l’autorisation écrite du bailleur et la copie du bail en cours.
En cas de cessation du contrat principal, le sous-locataire ne peut se prévaloir d’aucun droit à l’encontre du bailleur ni d’aucun titre d’occupation.
Les dispositions de la présente loi ne sont pas applicables au contrat de sous-location. »
Le principe est donc l’interdiction de sous-location, sauf avec l’accord écrit du bailleur.
Tout d’abord, l’autorisation doit être écrite.
Le formalisme est donc assez simple, le locataire principal adresse une demande écrite au bailleur, aux termes de laquelle il sollicite son autorisation pour sous-louer tout ou partie des locaux à telle personne.
La disposition essentielle est relative au prix du loyer pour les locaux sous-loués.
En effet, le texte exige que lorsque le bailleur donne son accord, celui-ci doit porter également sur le montant du sous-loyer.
Le prix du loyer au mètre carré de surface habitable des locaux sous-loués ne peut excéder celui payé par le locataire principal.
De cette exigence, découle la nécessité d’être très précis quant à la consistance des locaux sous-loués, notamment si la sous-location ne porte que sur une partie du logement.
Les tribunaux exercent un contrôle strict sur cette question, n’hésitant pas à condamner le locataire principal à restituer le trop versé de loyer au sous-locataire, en cas de non-respect des dispositions relatives au prix du sous-loyer au mètre carré.
Dans la mesure où le locataire principal a l’obligation de remettre au sous-locataire, non seulement l’autorisation écrite du bailleur, mais également une copie du contrat de bail, le sous-locataire peut aisément vérifier, de manière indiscutable, que le montant de son sous-loyer est conforme au prix du loyer au mètre carré.
Le but bien compris de ce texte, est de protéger le sous-locataire contre un risque d’enrichissement du locataire principal, au détriment du sous-locataire, mais également du bailleur.
La loi du 6 juillet 1989 ne prévoit aucune autre disposition concernant le formalisme du contrat de sous-location. Il peut donc s’agir d’une convention rédigée librement.
Dans la mesure où l’article 8 (dernier alinéa) dispose que « les autres dispositions de la loi ne sont pas applicables au contrat de sous-location », le contrat de sous-location ne peut pas être établi sur le modèle du contrat de bail soumis à la loi du 6 juillet 1989.
Ainsi, le sous-locataire ne bénéficie pas des dispositions protectrices de la loi, contrairement au locataire « principal », rendant la situation du sous-locataire extrêmement précaire.
Il en est ainsi en cas de cessation du contrat principal, puisque, toujours selon l’article 8, « le sous-locataire ne peut se prévaloir d’aucun droit à l’encontre du bailleur, ni d’aucun titre d’occupation. »
Le contrat principal lie uniquement le bailleur et le locataire. Dès lors que le bail cesse à l’initiative du bailleur (par l’effet d’un congé ou d’une résiliation judiciaire) ou à l’initiative du locataire principal (par l’effet d’un congé), le sous-locataire ne dispose d’aucun droit au maintien dans les lieux, à quelque titre que ce soit, vis-à-vis du bailleur.
Il doit nécessairement quitter les lieux, au plus tard le même jour que le locataire principal.
Ainsi, lorsque c’est le locataire qui donne congé en cours de bail, celui-ci s’impose au sous-locataire qui ne peut revendiquer aucun droit au maintien dans les lieux. Vis-à-vis du locataire principal, il doit restituer les lieux en bon état de réparations locatives, non pas sur le fondement de la loi du 6 juillet 1989 mais en vertu des articles 1719 et suivants du code civil.
Le seul lien juridique qui peut exister entre le bailleur et le sous-locataire apparaît en cas de non paiement du loyer par le locataire principal. Dans ce cas, sur le fondement de l’article 1753 du code civil, le bailleur est en droit de réclamer directement au sous-locataire le paiement du loyer, mais bien sûr, dans la limite du montant du sous-loyer.
Le locataire qui pratique une sous-location sans autorisation peut se voir poursuivi par son bailleur en restitution des sous-loyers perçus.
Le sous-locataire est également en droit de réclamer à son « bailleur », locataire principal, restitution du trop-versé de loyer, notamment lorsque les conditions financières de la sous-location ne respectent pas les dispositions de l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 concernant le prix du loyer au mètre carré de surface habitable qui ne doit pas excéder celui payé par le locataire principal.
La question se règle plutôt par l’allocation de dommages-intérêts plutôt que par la résiliation judiciaire du bail.
En effet, les tribunaux apprécient souverainement les circonstances et prononcent rarement la résiliation du bail au seul motif d’une sous-location non autorisée, étant rappelé que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du bail en cas de sous-location non autorisée serait réputée non écrite.
Le bailleur veillera à faire juger le caractère illicite de la sous-location de manière à obtenir le départ (volontaire ou forcé) du sous-locataire. Le sous-locataire qui se maintiendrait dans les lieux, malgré l’interdiction de sous-location constatée par décision de justice, serait considéré comme occupant sans droit ni titre.
Le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire est une création de la loi E.L.A.N du 23 novembre 2018.
La cohabitation intergénérationnelle solidaire permet à des personnes de soixante ans et plus de louer ou de sous-louer à des personnes de moins de trente ans une partie du logement dont elles sont propriétaires ou locataires dans le respect des conditions fixées par un contrat intitulé « contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire » prévu à l'article L. 631-17 du code de la construction et de l'habitation.
Il n’est donc pas soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989.
L’objectif est de « renforcer le lien social et de faciliter l'accès à un logement pour les personnes de moins de trente ans. »
La contrepartie financière doit être modeste.
Par dérogation à l'article 8 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, lorsque la personne de soixante ans et plus est locataire de son logement, elle informe préalablement le bailleur de son intention de sous-louer une partie de son logement à une personne de moins de trente ans dans le cadre d'un contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire, sans que le bailleur puisse s'y opposer.
Autrement dit, contrairement à la sous-location « classique », soumise à l’accord du bailleur (lequel peut donc tout à fait refuser), dans le cadre du contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire, le bailleur doit en être informé préalablement, mais ne peut pas refuser.
Cette forme de sous-location s’impose au bailleur.
La durée du contrat et la contrepartie financière sont librement convenues entre les parties.
Lorsque l'un des cocontractants décide de mettre fin au contrat, le délai de préavis applicable est d'un mois.
Le contrat peut prévoir, en complément de la contrepartie financière, la réalisation, sans but lucratif pour aucune des parties, de menus services par la personne de moins de trente ans, sans pour autant que cela crée un lien de subordination, de sorte que le code du travail ne peut pas s’appliquer.
Me Frédérique Polle • Avocat
Source : 25 millions de propriétaires • N°mai 2019
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