Avec la mise en place du prélèvement à la source, l'impôt sur le revenu de 2018 a été neutralisé sous la forme d’un crédit exceptionnel (année « blanche »). Pour éviter que des propriétaires ne reportent des travaux en 2019 dans un but d’optimisation fiscale, le législateur a introduit pour les revenus de 2019 la règle dite de la moyenne. Ainsi, les dépenses de réparation, d’entretien et d’amélioration[1] (charges considérées comme « pilotables ») acquittées en 2019 ne peuvent être déduites qu’« à hauteur de la moyenne des montants respectivement supportés au titre de ces mêmes dépenses en 2018 et en 2019 » (article 60, II, K, 2° de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017).
Par exception, la règle de la moyenne ne s’applique pas aux :
Les travaux de ce type réalisés en 2019 sont dont déductibles à 100 % dans la déclaration 2020.
En présence à la fois de travaux urgents et non urgents, il faut veiller à n’appliquer la règle de la moyenne qu’aux travaux non urgents. Le Bulletin officiel des impôts donne l’exemple suivant :
« Un propriétaire bailleur paye en 2018 des travaux d'isolation thermique sur un immeuble locatif pour un montant de 6 000 €. En 2019, sur ce même immeuble, la toiture fait l'objet d'une réfection complète à la suite d'une tempête, pour un montant de 30 000 €. Par ailleurs, 4 000 € de dépenses correspondant à d'autres travaux, ne présentant pas un caractère d'urgence, sont réalisées au cours de l'année 2019 (…).
Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2019, le contribuable peut déduire :
Il peut donc, au total, déduire un montant de charge de 35 000 € pour la détermination de son revenu net foncier imposable de l'année 2019 » (BOI-IR-PAS-50-20-10-20180704, n°180).
Un nouveau cadre « 500 » figure dans le formulaire 2044 de 2020 pour aider à appliquer la règle de la moyenne.
On renseignera :
Le total des travaux déductibles du revenu foncier de 2019 est égal aux cases J + (K + L)/2. Il est à inscrire en case N et à reporter dans la ligne 224 de la déclaration.
La déclaration 2072 pour 2020 (à remplir pour les SCI soumises à l’impôt sur le revenu) ne comporte pas de cadre détaillé. Le déclarant fera lui-même les calculs qui s’imposent (l’imprimé rappelle la formule ci-dessus) et renseignera le total des travaux déductibles en ligne 9.
1) Si l’on renseigne en case I du cadre 500 de la déclaration 2044 les travaux urgents réalisés en 2018, ce n’est pas pour les prendre en compte mais au contraire pour les extraire du calcul. En effet, « les dépenses de travaux d’urgence (…) payées en 2018 sont exclusivement déductibles du revenu foncier de l’année 2018 et ne sont pas retenues pour calculer la moyenne des dépenses de travaux déductibles du revenu foncier de 2019 » (BOI précité, n°170).
2) En cas de travaux sur un immeuble acquis en 2019, seule la case M doit être remplie (et le montant est à reporter directement en case N puisque ces travaux sont déductibles à 100 %).
Parmi les travaux déductibles à 100 % (exclusion de la règle de la moyenne) figurent les « travaux d'urgence rendus nécessaires par l'effet de la force majeure » (article 60, II, K, 2° de la loi de finances pour 2017).
L’administration fiscale a publié des commentaires dans lesquels elle identifie plusieurs types de travaux pouvant être qualifiés d’« urgents » :
a) « travaux consécutifs à la réparation des dégâts occasionnés par une catastrophe naturelle (réparation d'une toiture par exemple) » ou « par des actes de vandalisme (réparation d'une porte ou d'une fenêtre à la suite d'un cambriolage par exemple) » ;
b) « remplacement d'appareils dont les dysfonctionnements ne permettent plus la poursuite de la location dans les conditions prévues par le bail ou par la loi (panne d'une chaudière par exemple) » ;
c) travaux « que le contribuable a été contraint de réaliser à la suite d'une décision de justice ou d'une injonction administrative (…) » (BOI-IR-PAS-50-20-10-20180704, n°180).
Ces catégories comportent une part de flou. Aussi, le Bulletin officiel des impôts renvoie à « une appréciation circonstanciée de chaque situation au regard des éléments de fait pour déterminer si les dépenses réalisées constituent des travaux d'urgence ».
Concernant le cas b), certains commentateurs estiment que seul le remplacement d’appareils essentiels à un logement (chaudière, radiateur, chauffe-eau, etc.) peut être retenu au titre des travaux d’urgence. Il est vrai que, entre autres éléments d’interprétation, le seul exemple donné par le BOI est celui du remplacement d’une chaudière. On doit toutefois pouvoir s’en tenir au texte du Bulletin officiel : le remplacement de tout appareil « prévu(…) par le bail ou la loi » (une VMC, une hotte aspirante, un four, etc.) relève des travaux d’urgence[2]. En revanche, cette qualification est sans doute exclue (du moins au titre du cas b) pour les équipements (douche, évier, fenêtre) qui ne sont pas des « appareils ».
A noter : selon une réponse de la Direction générale des Finances publiques adressée à Jean Pinsolle, président de la Chambre des propriétaires du Grand Paris, « le départ d'un locataire ne caractérise pas à lui seul le caractère d'urgence susceptible de remettre en cause l'application de la règle de la moyenne » (La revue de l’Habitat, n°652, nov./déc. 2019, p.8). Autrement dit, des travaux en vue de relouer un bien ne peuvent être considérés comme urgents que s’ils entrent dans l’une des catégories détaillées ci-dessus.
La déduction des charges de copropriété dans le cadre de la déclaration des revenus fonciers revêt à la base une certaine complexité.
De manière classique, il convient de déduire en 2020 l’ensemble des provisions de charges de copropriété supportées en 2019 (ligne 229 de la déclaration 2044 ou ligne 14 de la déclaration 2072). Ce n’est qu’en 2021 que devront être réintégrées les provisions déduites en 2020 qui correspondent à des dépenses non déductibles ou récupérables auprès du locataire. Dans la déclaration établie en 2020, il faut d’ailleurs procéder à cette même régularisation des provisions de 2018 déduites lors de la déclaration 2019 (case 230 de la déclaration 2044 ou ligne 16 de la déclaration 2072).
La loi de finances pour 2017 ajoute à cette complexité.
Tout d’abord, les provisions de charges étant considérées en principe comme des charges « récurrentes », les provisions payées en 2019 mais correspondant à des échéances de 2018 ne doivent normalement plus être déduites en 2020[3]. Il faut ici prendre avec des pincettes l’intitulé de la case 229 de la déclaration 2020 (« provisions pour charges payées en 2019 »).
Une seconde difficulté réside dans le caractère en réalité hybride des provisions de charges. En effet, si celles correspondant au budget prévisionnel sont « récurrentes », les provisions « travaux » sont assimilées à des charges « pilotables ». En conséquence, comme les travaux réalisés en direct par des propriétaires, elles subissent la règle de la moyenne, « sous réserve des adaptations rendues nécessaires pour tenir compte du décalage temporel dans les modalités déclaratives de ces provisions » (BOI-IR-PAS-50-20-10-20180704, n°230).
Le BOI propose l’exemple suivant :
« Soit un copropriétaire bailleur supportant des provisions pour charges de copropriété au titre des dépenses de travaux [hors budget prévisionnel] (…) d'un montant de 4 000 € en 2018, 3 000 € en 2019, 3 500 € en 2020 et exigées par le syndic pour chacun de ces montants au titre de chacune de ces trois années. Pour des raisons de simplicité, il est considéré que les travaux réalisés par la copropriété présentent tous un caractère déductible (…).
Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2019, le contribuable peut opérer une déduction de 5 000 € :
Pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2020, le contribuable peut opérer une déduction de 2 000 € :
1) La règle de la moyenne ne s’applique pas pour les lots de copropriété acquis en 2019 (BOI précité, n°250). Sont donc exclues la déduction supplémentaire de 50 % des travaux déductibles provisionnés en 2018 dans la déclaration établie en 2020 (charges absentes de facto) et la réintégration de 50 % des travaux déductibles provisionnés en 2019 dans la déclaration 2021.
2) Même en l’absence de rappel sur ce point du BOI, elle ne s’applique pas non plus aux provisions payées en 2018 et 2019 pour faire face à des travaux d’urgence décidés d’office par le syndic. Ces travaux sont en effet considérés comme non pilotables (voir § 1). Dans la déduction de 50 % des provisions de travaux de 2018 en 2020 et la réintégration de 50 % de celles de 2019 en 2021 il faudra donc veiller à exclure ces provisions spéciales. Rappelons par ailleurs que, indépendamment des règles dérogatoires ici commentées, ces provisions spéciales sont déductibles en case 229 (ou ligne 14) uniquement si elles correspondent à des travaux déductibles (BOI-RFPI-BASE-20-70-20130107, n°40).
Nul doute que, du fait des règles dérogatoires liées à la mise en place du prélèvement à la source, la déclaration des revenus fonciers de 2019 est semée d’embûches. Cette complexité appelle un surcroît de bienveillance de la part des services fiscaux…
[1] Pour les locaux professionnels et commerciaux, seuls sont déductibles les dépenses d’amélioration « destinées à protéger ces locaux des effets de l'amiante ou à faciliter l'accueil des handicapés » (art. 31, I, 1°, b bis du Code général des impôts).
[2] Si un appareil n'est pas imposé par la réglementation (voir notamment le décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent), il faut donc qu'il soit mentionné dans le bail pour que son remplacement soit intégralement déductible.
[3] On rencontre ici une seconde règle destinée à dissuader des contribuables de reporter des paiements en 2019 en raison de l’année « blanche ». Ainsi, les charges « récurrentes » (primes d’assurance, provisions de charges de copropriété, impôts, etc.) « dont l'échéance intervient en 2018 ne sont déductibles que pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2018 » (article 60, II, K, 1° de la loi de finances pour 2017). En copropriété, une provision correspondant au budget prévisionnel « est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l'assemblée générale » (article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965), tandis qu’une provision pour travaux est exigible aux dates « votées par l'assemblée générale » (article 14-2).
Frédéric Zumbiehl
Source : 25 millions de propriétaires • N°mai 2019
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